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Forum RPG - Londres au XIXème siècle. Incarnez Vampires, Loups-Garous, Lycanthropes, Homonculus, Chimères, Alchimistes, Hunter...et choisissez votre camp dans une ville où les apparences n'ont jamais été aussi trompeuses...
 
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Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842]

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Maria Moonshire
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MessageSujet: Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Icon_minitimeJeu 8 Fév - 0:10

- Dame Maria?

La voix cristalline de Sophie me tira de mes pensées. Assise sagement dans un fauteuil de cuir, j'avais passé les vingt dernières minutes à observer l'extérieur de ma demeure, analysant silencieusement les va-et-vient des oiseaux nichant aux creux des combles face à moi.
Détachant mon regard de ce spectacle naturel, je me tournais doucement dans mon siège pour observer mon interlocutrice, souriant paisiblement.


- Oui?
- Votre... Votre bain est prêt.

M'étirant doucement, je quittais mon reposoir pour me diriger vers la baignoire qui m'attendait. Silencieusement, je retirais les quelques dentelles qui recouvraient encore les parties les plus intimes de mon corps, ne me souciant guère du regard de la jeune femme présente. Plongeant une jambe, puis l'autre, je m'engouffrais finalement dans ce vaste liquide chaud, lâchant un long soupir de plaisir et satisfaction une fois mon corps presque totalement immergé. Fermant les yeux quelques instants pour savourer cette relaxation bienvenue, j'humais l'air pour ressentir toute l'essence des parfums se dégageant de l'eau, mêlant dans l'air une odeur délicate de cerises. Laissant de nouveau mon esprit vagabonder, une myriade d'images se mélangeaient dans mon esprits avec les saveurs olfactives que dégageait mon bain. Un instant, je me retrouvais dans un champ de tulipes, courant naïvement parmi ces dernières tout en savourant l'innocence de ce moment. L'instant d'après, je me retrouvais transportée au cœur de contrées exotiques et totalement étrangère, dont on ne m'avait parler qu'en souvenir d'exploration, et dont les cerisiers en fleurs donnaient aux parcs des allures poétiques, romantiques. Le romantisme... Cette valeur si importante aux yeux des gens croisant ma route, plaçant cette pratique au cœur de ce qu'ils appellent amour...

- Dis moi Sophie. Ton client, hier soir, il venait des terres de l'Ouest, n'est-ce pas?

Je n'attendis pas la réponse de cette dernière pour me retourner dans la baignoire, plaçant mes bras sur le battant où reposait précédemment ma nuque, fixant de mon regard écarlate la jeune prostituée qui, comme je m'y attendais, n'avait pas quitté la pièce lorsque j'étais entrée dans mon bain.

- Je.. Oui, il m'a dit venir de la compagnie des Indes orientales. C'était un marchand parait-il, bien qu'il me semblait assez idiot pour négocier quoique ce soit..
- Ahh... Les Indes. Je me demande quels genres de saveurs et plaisirs inconnus nous pourrions trouver là bas. As-tu déjà voyagé chaton?
- Non, je suis navrée. Je n'ai jamais mis pied en dehors de Londres. Quand je vois les dangers nous guettant déjà ici, je n'ose imaginer ce que le reste du monde recèle!
- Et pourtant... Pour ma part je ne peux qu'imaginer le plaisir que doit procurer pareils voyages. J'ai dans l'idée d'un jour pouvoir me déplacer de manière aussi lointaine. Quand je vois ce que les hommes et femmes rapportent de leurs déplacements depuis la gare... Ca me donne tellement envie de découvrir le monde et les plaisirs que cache ce dernier!

Un petit rire s'échappa de la gorge de la rousse qui me tenait compagnie.

- Vous semblez si passionnée soudainement.
- Le plaisir de découvrir de nouveaux horizons. D'en apprendre plus sur les autres, sur soi. Et puis les cuisines exotiques! Imagine les mets et saveurs que ces pays peuvent te faire découvrir, les plaisirs culinaires, ou charnels, qu'ils ont à nous proposer.
- Tout cela me semble passionnant, en effet, mais je crains ne pas vivre assez longtemps pour être témoin de pareilles merveilles, nos vies sont courtes et dirigées par le Très-haut après tout.

Ma mine se referma alors légèrement à cette mention. Nos vies sont courtes, pas vrai? Cette phrase n'est valable que si l'on est certain de sa propre vieillesse, de sa fin. Qu'en est-il si l'on ne vieillit pas? Si le temps n'as aucune prise sur nous? Goûterai-je un jour aux plaisirs exotiques de l'Inde, des états-unis, de France, du Japon? Mes plaisirs seront-ils toujours aussi abondants si je quitte ma demeure actuelle? Soupirant doucement, je reprenais mon air amusé précédent et me laissais glisser doucement au fond de l'eau, m'immergeant complètement pendant quelques secondes sous le regard circonspect de Sophie avant de ressortir soudainement la tête, mêlant mon regard à celui de la demoiselle.

- Peut-être que je ne suis pas humaine et que j'ai déjà vu tout ça, qui sait?

Court silence, puis le rire cristallin de Sophie résonna de nouveau dans la pièce.

*
*   *


Il était quatorze heures, peut-être quinze, lorsque je m'étais décidée à partir pour la grande bibliothèque de Londres. A vrai dire, je ne sais toujours pas quelle idée saugrenue m'avait traversé l'esprit et m'avait forcée à quitter le bain chaud et la compagnie de Sophie. Quoiqu'il en fut, je marchais à présent d'un pas jovial vers le gigantesque édifice, évitant les rues "malfamées" pour me mêler à la populace londonienne, jouant parfois de mes charmes pour qu'on me laisse passer. Je prenais à vrai dire un malin plaisir à voir le regard jaloux des futures épouses des "gentlemen" qui  faisaient le nécessaire pour qu'aucune flaque ne vienne m'éclabousser plutôt que de s'occuper de leurs promises.
A ce propos, je crois que ma tenue d'alors était légèrement inadaptée pour une visite de bibliothèque. Peu m'importait en vérité, j'étais séduisante et cela me plaisait. Ma robe, tombant légèrement sur mes épaules, se trouvait maintenue par des attaches en "corset" se trouvant dans mon dos. Les manches tombaient quand à elles jusqu'à la naissance de mes poignets et de fins gants de soie blanche tranchaient avec la couleur sanguine de la robe. Un collier au rubis écarlate cernait ma gorge, serré contre ma peau par un fin ruban blanc, tandis que deux boucles d'oreilles tombaient sur les côtés de mon visage fin. Mes cheveux quand à eux étaient attachés  dans une queue de cheval haute, terminant leur chute aux creux de mes omoplates. Finalement, une coiffe noir et blanche ornait le tout et un fin voile de dentelle barrait mon visage dans un doux quadrillage brodé, un peu à la manière des voiles que portent les veuves mais d'une manière plus travaillée et séduisante. Une broche à la pointe aiguisée attachait le tout.

Au bout d'un moment, je parvenais à la bibliothèque, et y pénétrais d'une manière nonchalante, respectant cependant les "protocoles" en vigueur, et demandant à pouvoir consulter différents ouvrages. Parcourant par la suite les différentes catégories que possédait le bâtiment, je flânais sans livre précis en tête. Je butinais telle une abeille sur tous les ouvrages qui attiraient ma curiosité, les plaçant chaque fois sur une table précise ne m'arrêtant cependant que rarement à cette dernière. Seulement pour vérifier qu'aucun doublon ne s'y trouvait. Malgré ma recherche non structurée, je faisais cependant attention à bien déposer les ouvrages de manière rangée et ordonnée, les plaçant par ordre alphabétique et par thèmes. Sans même m'en rendre compte, le temps défilait et cela faisait bien une bonne demi-heure que je passais aux travers des rangées d'ouvrages, me servant lorsque quelque chose attirait mon œil curieux. Finalement, je me dirigeais vers la table où je me souvenais avoir déposé mes futures lectures, bien décidée à tout lire.
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Alastor Drake
Membre de l'Ombre
Alastor Drake
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Race : Vampire
Classe sociale : Haut bourgeois
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Age : 341 ans
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Proie(s) : Les Humains, mais il les choisit avec soin pour éviter les meurtres inutiles.
Secte : Indépendant.
Clan : Cappadocien.
Lignée : Aucune.
Rang Pyramidal : Premier.
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MessageSujet: Re: Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Icon_minitimeMar 13 Fév - 21:38

[HRP/ Suite d"Un pas dans le Sanctum Sanctorum"/HRP]



Un murmure écrit noir sur blanc

Maria Moonshire et Alastor Drake

"Ô toi, capitale décadente
Laisse donc tes piètres enfants
Dormir et rêver sagement
Loin de ta flamme ardente"


Le 20 mai 1842
Annexe de la Bibliothèque
Bureau d'Alastor Drake


Alastor ne dormait plus. Cela faisait deux jours qu'il peinait à trouver le sommeil et son humeur était plus mauvaise que jamais. La raison de son agitation était-là, devant lui, sur ce bureau qu'il commençait à exécrer : un livre, volumineux, aux pages jaunies par le temps, et qui semblait sourire de son mystère. Le manuscrit babylonien que la jeune Spencer lui avait transmis déjouait ses méthodes les plus abouties. Jamais ouvrage de ce genre ne lui avait donné autant de fil à retordre que celui-ci. L'archiviste sentait son sang bouillir: son incapacité à traduire un paragraphe entiers commençait à toucher à son orgueil.
Mais ce qui devenait inquiétant, c'était que son travail allait finir par en pâtir. En effet, depuis qu'il avait l'objet en sa possession, le Conservateur tâchait de le déchiffrer et de donner sens à la légende qu'il recelait. Il y passait ses nuits, mais il y passait désormais également ses journées, délaissant de plus en plus les rayonnages de la Bibliothèque et ses travaux de comptable. Cela devenait problématique.
Alastor Drake était un Vampire qui ne divisait pas son temps comme les autres. Il dormait généralement entre 2h et 8h du matin, et entre 12h et 15h, afin de pouvoir être actif à la fois une partie de la nuit et une partie de la journée. Ainsi, le public pouvait le rencontrer dans l'enceinte de la Bibliothèque le matin, entre 9h et 11h, mais aussi l'après-midi, entre 16h et 19h.
Mais, depuis deux jours, on ne le voyait plus errer dans les salles, entre les étagères et les bureaux, entre les globes et les pupitres. Cela était si rare que les étudiants et grands habitués de la Bibliothèque commençaient à murmurer qu'il était malade. L'on s'étonnait: son planning - réglé à la minute près - ne souffrait généralement pas de la moindre anicroche. Le Conservateur était réputé pour sa ponctualité à toute épreuve et son impatience lorsqu'il s'agissait de devoir remettre son travail au lendemain. C'était un homme zélé et terriblement efficace. Qu'il décale ses heures relevait de l'extraordinaire. Son absence à son poste dénouait un peu les langues et soulevait de nombreuses questions.

Appuyé sur son bureau, il ruminait une fois de plus,
poussant la limite de ses propres forces. Près de lui, un verre de sang froid gisait, glacial, presque aussi brun que le bru de noix qu'il utilisait pour noter ses réflexions sur son petit calepin blanc.


- Je vais devenir fou... souffla-t-il une nouvelle fois en agrippant la racine de ses cheveux. Cela n'a pas de sens...

Il abandonna rageusement sa plume dans son encrier bordé d'encre sèche et poussa un grand soupir d'exaspération. D'un geste brusque, il remonta ses lunettes sur l'arrête aiguisée de son nez et serra les dents avant de reprendre sa lecture comme un scientifique qui craint de perdre la réaction chimique qu'il a sous les yeux.
Les trois coups que l'on donna contre la porte de son bureau ne le tirèrent pas de ses réflexions. Plongé dans son travail, il ne sembla même pas les avoir entendus. Il fallut donc que sa secrétaire, la douce Jézabel, ne s'avance au milieu de la pièce et toussote doucement pour le faire revenir dans un semblant de réalité.


- Hem...hem...Monsieur ? Vous devriez être en train de mettre à jour les fonds. Vous les avez déjà délaissés hier...

Alastor frappa du poing sur la table et lui jeta un regard noir par-dessus ses lunettes rectangulaires. Son soupir en dit long. Il détestait être interrompu et c'était loin d'être le bon moment pour lui faire une telle remarque.

- Vous n'avez donc rien d'autre à faire que de venir jouer les donneuses de leçons ?

Le silence se fit. Puis, face au petit sourire que lui fit la jeune femme, il respira un grand coup pour tâcher de se calmer.

- Je suis fatigué, fit-il finalement dans un grognement en guise d'excuse. Puis, il tourna le dos à la belle pour reprendre son travail.

- Vous devriez faire une pause. Laissez donc de côté ce livre, reprit la secrétaire d'un ton doux.

- Pfff... Alastor ôta ses lunettes et les laissa tomber sur son torse au bout de leur chaînette argentée. Vous avez raison.

Le bibliothécaire abandonna ses notes et quitta son bureau. Il passa devant la jeune femme, sans ajouter un mot, et disparut dans les couloirs de son domaine. Jézabel jeta un regard en direction du volume que l'archiviste avait refermé et soupira doucement. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas vu son collègue aussi fatigué.
Il fallait dire que la période semblait être aux rencontres désagréables...Entre le comte Keisuke qui était venu le menacer sous son toit, Raphaël Veneziano dont ils avaient dû garder le chevet et limiter les pouvoirs, miss Grey qui s'était presque installée aux côtés du réfugié et Sarah Spencer qui était venue fouiller les origines des Vampires...le pauvre homme avait peiné à se concentrer sur son travail.


- Vous comptez rester plantée-là ? fit une voix grave derrière elle.

Jézabel sursauta. Alastor lui jeta un regard sceptique avant de l'obliger à reculer un peu pour le laisser passer. La jeune femme cilla lorsqu'il la frôla de sa veste noire. Son regard tomba sur le verre que son collègue tenait dans sa main droite. Le liquide rouge sang qui s'y trouvait contrastait fort avec ses doigts d'un blanc de craie. Une Blood Tablett, ou deux, diluée(s) dans l'eau...histoire de reprendre des forces.


- Allons, retournez travailler Miss Rainworth. Le Vampire s'assit contre son bureau et lui indiqua la porte d'un coup de tête. J'arrive.

La jeune secrétaire lui sourit et quitta la pièce pour retourner dans son propre bureau. Elle savait que son collègue allait enfin arpenter de nouveau les allées de la Bibliothèque et se détendre.

*********

La Bibliothèque

Vers 16h15, Alastor avait quitté son domaine pour retrouver les couloirs de la grande bâtisse. Il avait reboutonné son col légèrement ouvert pour le fermer très haut sur son cou et avait repositionné en son centre sa broche montée d'une pierre rouge. Ses lunettes avaient retrouvé leur emplacement fétiche, sur son nez fin, et il avait réorganisé sa crinière d'ébène, sans pour autant la domestiquer.
Dans l'ombre des rayons, le Vampire tâchait maintenant d'oublier ses derniers échecs de traduction. Il errait entre les volumes, comme n'importe quel client à la recherche d'un ouvrage à consulter, à ceci-près qu'il connaissait par coeur les lieux et qu'il n'avait pas à consulter les index pour trouver ce qu'il désirait feuilleter.
Ses longs doigts passaient parfois sur la tranche d'un ouvrage, comme pour en vérifier la solidité, la propreté ou le titre gravé entre les nerfs de son dos. Ses yeux bruns parcouraient les lettres dorées des plus prestigieux et s'attardait volontiers sur les plus grands spécimens. En réalité, loin de délaisser son travail, le Conservateur était en train de vérifier que chacun était à sa place. Il calculait également le prix qu'il faudrait mettre dans la restauration des plus fragiles et l'espace qu'il restait dans les étagères pour accueillir de nouveaux "pensionnaires".
Tandis que le Conservateur se détendait à sa manière, quelques étudiants et lecteurs lui jetaient des petits coups d'oeil discrets. Sans pour autant le déranger, ils s'étonnaient de le revoir parmi les vivants. Avait-il été malade ? Avait-il dû se déplacer pour gérer les fonds de la Bibliothèque ? Le revoir en intimidait certains, mais d'autres trouvaient sa présence rassurante, ou du moins l'assimilaient-ils à une forme de sécurité et de disponibilité du personnel qui leur plaisait.
Les regards curieux et les avis des clients importaient peu le Bibliothécaire. Sans se soucier des petites vagues que sa silhouette soulevait dans l'esprit des visiteurs, Alastor continuait son petit tour des rayons. Il semblait hermétique à la vie qui circulait entre ses murs. Son visage, impassible, paraissait totalement absorbé par la contemplation de ses ouvrages préférés.
Cependant, lorsque son chemin croisa celui d'une jeune femme à la mise sanguine, sa concentration fléchit et ses yeux glissèrent sur la belle. Ses longs cheveux blonds, presque blancs, et la teinte de sa robe lui rappelèrent le Comte. Un léger frisson le parcourut. Puis, il attarda un peu le regard sur sa robe. Son décolleté n'était guère conventionnel...Il la trouvait particulièrement "voyante".
Alastor n'était pas excessivement prude, mais il aimait que les codes soient respectés, surtout dans son domaine. Ce manque de respect des règles fondamentales de leur société l'exaspérait lorsqu'il s'agissait de conserver l'image de la Bibliothèque. Perturbé, le Conservateur laissa sa main trouver machinalement un livre dans le rayon qu'il était en train de vérifier. Son manque d'attention lui fit oublier que sa couverture quelque peu rugueuse raccrochait toujours celles de ses voisins...
Le boucan que firent les trois livres qui tombèrent à ses pieds fit sursauter une paire clients et Alastor lui-même étouffa un cri de surprise. Il se pencha en avant pour ramasser les ouvrages et émit un grognement de mécontentement. En se redressant, il jeta un nouveau regard à la jeune femme qui l'avait déconcentré. Son sourire fut forcé.


- Excusez-moi pour le bruit, fit-il en replaçant les livres dans l'étagère.

Made by Neon Demon


Crédit image: trouvée sur ce site.


L'homme sans passé n'est que ruine future.
Alastor Drake
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Maria Moonshire
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MessageSujet: Re: Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Icon_minitimeVen 16 Fév - 19:51

Je fus particulièrement surprise lorsque le bruit assourdissant des ouvrages résonna dans l'allée. Non pas à cause du bruit lui même, mais plutôt de la réaction du type que je venais de croiser. J'avais eu le temps, en quelques regards rapides, d'observer son air global. Droit, strict, austère mais éléguant. Le genre d'homme qui ne réagit pas aussi fortement à mes charmes. Me retournant un peu plus vers lui tandis qu'il ramassait les livres, j'analysais plus en détail les courbes de son visage fin. Ses traits étaient beaux, assez fins. Ses yeux châtains et la couleur de ses cheveux apportaient un contraste remarquable avec le teint de sa peau et sa mine froide. En parlant de cette dernière, le sourire qu'il m'adressa me paraissait faux, exagéré. Sans doute était-ce là un simple sourire de politesse, comme il m'est coutume d'user dans mon établissement, ou bien cet homme était mal à l'aise. A sa manière de s'excuser, et à la façon qu'il avait de se mouvoir juste avant cet "incident", je devinais qu'il s'agissait là d'un employé de la bibliothèque, voir même de l'un de ceux la dirigeant vu son air "noble".
Tentant de plonger mon regard dans le sien au travers du voile quadrillé me barrant une partie du visage, je cherchais aux travers de ses yeux une émotion, quelque chose, sans même trop savoir pourquoi.


- Ce n'est pas grave, ne vous inquiétez pas. Mais faites attention, c'est une bibliothèque ici, le bruit y est prohibé.

Je ponctuais ma phrase par un léger sourire, m'excusant par la suite d'une manière délicate afin de continuer ma route. Cet homme était peut-être une personne de choix dans ce lieu, mais je n'étais pas venue ici pour séduire, tout du moins, pas spécifiquement pour cela, et préférais pour l'heure m'adonner aux plaisirs de la lecture.
Retournant à ma table, je constatais avec satisfaction que mes livres étaient toujours en place. M'asseyant doucement et ouvrant le premier ouvrage à ma portée, je laissais au préalable mes doigts gantés glisser le long de la couverture, savourant les moindres relief du cuir utilisé pour scellé cet écrin de savoir. Un soupir s'échappa de ma bouche lorsque mes yeux parcoururent les premiers lignes de ce qui semblait être un recueil des différentes maisons royales d'Angleterre, pré-existantes à la monarchie actuelle. Le livre en soit n'était pas des plus captivants, mais le savoir qu'il renfermait me satisfaisait pour le moment, et j'aimais à découvrir l'histoire associée aux différentes maisons. Un court passage de la narration parla d'une bataille ayant eu lieu à York, la ville qui m'avait vue naître. Un sourire niais s'étira quelques secondes sur mon visage, alors que je me rappelais ma vie passée.

*
*  *


- Il fait froid.
- Evidemment Maria, nous sommes en hiver.
- Ais-je dit que cela me déplaisait, Alvin?

Mon regard se mêla à celui de l'alchimiste qui me faisait face. Son regard, me jugeait comme un père jugeant son enfant. Plein de bienveillance et d'amour. Sa main, calfeutrée dans un gant de cuir, caressa ma joue tendrement, avant que ses lèvres ne s'apposent contre les miennes quelques secondes. Me délaissant par la suite, Alvin se dirigea vers le petit portail qui délimitait notre maisonnée, puis pointa du doigt une direction.

- Viens, j'aimerais de montrer quelque chose.

Silencieuse, je le suivais aveuglément. Quelques minutes s'écoulèrent puis, nous parvinrent finalement au lieu qu'Alvin avait indiqué. Une large bâtisse nous faisaient face, siégeant aux côtés de l'église centrale de la ville. Suivant mon amant alors qu'il pénétrait dans le bâtiment, la chaleur qui s'échappa de l'intérieur et qui s'enveloppa autour de mes joues me procura une douce sensation de bonheur, comme un baiser déposé délicatement sur ma peau de porcelaine au petit matin, alors que je suis encore emmitouflée dans mes draps. Ma chaleur corporelle, captive de ces derniers, me servant de cocon. Après la chaleur, se fut les bruits métalliques qui captivèrent mon attention, me décalant légèrement sur la droite d'Alvin afin d'observer la scène qui nous faisait face. Un duel d'escrime.
Amusée, je tapotais doucement l'épaule de l'alchimiste.

- Tu es venu ici pour parier sur le meilleur gentleman? Ou bien pour trouver un partenaire idéal?

Le petit rire qui s'échappa de sa gorge tranchait d'une douceur sans égale, comparativement à son visage brusque et sa barbe épaisse.

- Je suis ici pour me battre. Ou plutôt, te faire une démonstration. Quand tu étais au bor... Quand tu travaillais avant de vivre chez moi, je n'ai jamais eu l'occasion de te démontrer mes talents!
- Tu en as? Vraiment?

Mon sourire taquin le fit rougir d'une manière inattendue, alors qu'il m'indiquait les sièges où je pouvais m'asseoir pour l'observer. Rejoignant plusieurs dames, ces dernières me fixèrent d'un regard amical mais faux, traduisant leur mépris à mon égard. Sans doute étaient-elles de "hautes" naissances. Peu m'importait en réalité.
Plusieurs duels passèrent, et bien qu'au début ces derniers ne m'attiraient pas particulièrement, mon regard sautant de personnages atypiques en personnages atypiques, je devais admettre qu'au bout de quelques passes et feintes, mon attention était prise aux fers des fleurets. Quand arriva finalement Alvin sur la "zone de duel", mon cœur accéléra étrangement, comme si je mettais quelque chose en jeu. Ce dernier m'adressa un sourire discret avant de saluer son adversaire, un home brun aux cheveux bouclés et à la moustache taillé. Les premières feintes me captivèrent avec une force insoupçonnée. Je fixais le spectacle comme si la vie de l'alchimiste en dépendait, tandis que les autres dames semblaient tout aussi attentives que moi. Un point fut marqué par Alvin, puis un par son adversaire, un certain Guillaume.
Les minutes passèrent, et le duel ne trouvait aucun vainqueur. Malgré le statut-quo qui se dégageait, aux grands déplaisir des spectatrices, je restais pour ma part captivée par ce spectacle. Soudain, Alvin et Guillaume se tournèrent tous deux vers moi. Haussant un sourcil, je les dévisageais, l'un, puis l'autre.


- Oui?
- Alvin, aux vues de nos exploits martiaux respectifs, me propose d'enrichir notre duel par un pari. Qu'en dites-vous? Avez-vous une idée de ce que nous pourrions parier gente dame?
- Bien sûr, moi.

Leurs sourcils s'haussèrent en même temps, et ils manquèrent de par leur réaction de me déclencher un fou rire, tandis que les dames autour de moi s'offusquaient, certaines plaçant un éventail devant leurs lèvres afin de cacher le venin qu'elles devaient cracher à mon égard.

- Plait-il?
- Je prends beaucoup de plaisir à vous regarder tous deux combattre, mais je ne crains qu'Alvin n'aie pas pareil richesse à parier que vous même, Sir Guillaume. Alors je me mets en pari. Si Alvin gagne, vous lui donnerez de quoi payer notre loyer pour le mois. Si vous gagnez, je suis votre pour la nuit.

Le regard d'Alvin m'incendia tandis que celui de Guillaume s'emplit d'une lueur perverse.

- Je ne suis qu'une dame, mais je suis certaine de savoir moi aussi manier le fleuret.

Ma remarque souleva des "oh!" dans le publique, et un rire concordé d'Alvin et Guillaume, et de quelques messieurs eux aussi présent pour assister au duel.

- Je suis d'accord.

Les yeux de la foule se ruèrent alors sur Alvin.

- Cela reste pour moi la plus grande des motivations, je ne veux pas voir ma dulcinée dans les bras d'un autre. Le duel n'en sera que meilleur, sir?
- J'en suis pareillement mon ami. Même si je vous ai déjà dit de ne pas m’appeler "sir".
- Parfait alors.

Ils se saluèrent de nouveau puis reculèrent tous deux de plusieurs pas, se remettant en garde. Ils se battaient pour moi, et j'avoue que le plaisir que cela me procurait réchauffa mon corps bien plus que les feux présents dans la bâtisse. Après quelques secondes, ils s'élancèrent tous deux.

*
*  *


Une silhouette attira mon regard, me faisant quitter mes souvenirs et ma lecture en cours. Le type au collier rubis, celui qui avait fait tomber les livres après m'avoir croisée, me dominait, fixant soit ma lecture, soit ma personne. Ce qui me troubla le plus, ce ne fut pas sa manière de se tenir, droite et rigide, ni l'air contradictoire qu'il dégageait, ou le simple fait de me fixer. Non, ce qui me perturbait le plus, c'est que je ne savais pas depuis combien de temps il était là. Ma lecture m'avait elle tant captivée?
Redressant la tête vers lui, j'étendu un sourire discret, alors que mes doigts parcouraient doucement les reliefs du motif de la maison des Tudors.


- Vous faîtes de l'escrime?

Ricanant doucement à ma propre remarque, qui n'avait ni sens, ni lieu d'être, je reprenais tant bien que mal un calme forcé, confuse.

- Veuillez m'excuser, j'étais dans mes pensées et cette phrase est sortie toute seule.

Mon regard passa alors rapidement des livres, étalés méthodiquement sur la table, mais étalés, à celui de mon "interlocuteur".

- Navrée pour cela également, c'est ma première visite ici et j'avoue m'être sûrement un peu emportée quand aux nombres d'ouvrages que je pourrais lire aujourd'hui. Vous êtes employé ici n'est-ce pas? Vu comment vous arpentiez les allées. Dîtes moi, auriez-vous une oeuvre spécifique à me conseiller?

Plaçant un fin ruban rouge sur la page que je consultais avant de refermer le livre, je replongeais mon regard dans celui impassible du bibliothécaire.


- Et j'en oublie mes manières. Je me nomme Maria, Maria Moonshire, enchantée.
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Alastor Drake
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MessageSujet: Re: Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Icon_minitimeVen 23 Fév - 17:46



Un murmure écrit noir sur blanc

Maria Moonshire et Alastor Drake

"Impertinence ou innocence ?"


Le 20 mai 1842
La Bibliothèque


En entendant la réponse de la jeune femme à laquelle il venait de faire quelques excuses, pour le bruit occasionné par sa maladresse, Alastor crut qu'il allait s'étouffer. Son coeur fit un bond prodigieux dans sa poitrine, sous l'effet de la surprise, et il ne put s'empêcher de considérer la belle avec hauteur, un sourcil levé, comme s'il eût affaire à une gamine d'une rare insolence. Avait-il bien entendu ? Venait-elle réellement de lui rappeler qu'ils se trouvaient dans une bibliothèque et que le bruit y était prohibé ? C'était aussi surprenant qu'offensant. Un patient qui prescrirait des médicaments à son médecin aurait eu autant d'audace que cette petite ignorante ! N'était-il pas, lui, gérant des lieux ? Pensait-elle donc n'avoir affaire qu'à un passant quelconque qui viendrait en ces murs pour son loisir sans en connaître les règlements ? C'était à mourir de rire ! Sauf qu'Alastor était tout sauf un amateur de ce genre de plaisanterie...
Figé sur place, le Conservateur regarda la jeune femme s'éloigner pour regagner sa table de lecture. Il ne lui avait pas répondu, pour éviter d'être trop agressif, mais le goût amer de la soumission lui resta dans la bouche. Pour respecter ce fameux "silence" qu'une bibliothèque digne de ce nom réclamait, et pour éviter de froisser une "lady", le Vampire avait préféré se taire plutôt que de lui grogner dessus qu'elle était face à l'un des plus éminents archivistes et chercheurs de la capitale. A quoi bon ? Avait-il besoin d'être reconnu au point d'étaler sa frustration à la première personne qui ne le situait pas ? Lui-même ne la remettait pas...Peut-être l'aurait-il dû ?
Alastor réfléchit. L'avait-il déjà croisée ? Non, il s'en serait souvenu, surtout si elle avait toujours eu de tels cheveux. C'était étrange. Était-elle donc nouvelle en ces lieux ? Non, il avait l'impression de la connaître. Sans doute ne s'attardait-il pas assez sur les femmes de "ce genre", plantureuses et légèrement excentriques. Jézabel lui avait déjà fait la remarque : à ne s'occuper que des nobles et bourgeois du sexe fort, il finissait par laisser de côté tout un pan de la société qu'il ferait mieux d'observer avec plus d'attention. Les rumeurs allaient d'ailleurs bon train quant aux désirs du conservateur qu'il était. On le disait amoureux de ses livres et des boiseries de la Bibliothèque, plus que des femmes ou de l'argent. On le soupçonnait même de porter le deuil de son passé avec trop de ferveur pour que cela ne révèle pas chez lui un penchant pour son propre genre...
Le Vampire fronça encore les sourcils. Le sourire que cette femme lui avait jeté avant de s'en aller avait presque été condescendant. Du moins était-ce ainsi qu'il l'avait pris. En avait-elle seulement eu conscience ? Peut-être qu'il fabulait. La fatigue ne l'aidait pas à demeurer très lucide. Décidément, aujourd'hui il n'était pas disposé à accepter ce genre de quiproquo ridicule.
Levant les yeux au ciel, Alastor grogna son mécontentement et termina de ranger les malheureux livres qu'il avait fait tomber. Il tâchait de paraître calme mais, au fond, il fulminait. Entre sa traduction qui n'avançait pas et cette petite insolente qui venait de le prendre pour un simple client ou un vulgaire commis, cette journée s'annonçait franchement fort peu plaisante !
Une fois les ouvrages remis à leur place, l'archiviste se redressa et replaça ses lunettes sur l'arrête de son nez, avant de continuer sa petite inspection des lieux. Il avait encore de nombreux rayonnages à inspecter et il n'était plus temps de se préoccuper des petites péronnelles.

Au bout d'une bonne demi-heure de ce travail de repérage et de vérification, Alastor dut revenir sur ses pas sans s'en rendre compte puisqu'il retomba sur la jeune femme en rouge. Marquant un arrêt en l'apercevant à son bureau, il l'observa d'un oeil nouveau.
Finalement, à part son décolleté un peu provoquant, la demoiselle n'était pas aussi déplacée que ce qu'il avait pensé au premier abord. Sa voilette noire, finement dentelée, dissimulait en partie un visage plutôt doux et agréable à regarder. La broche qui l'attachait à sa coiffure de neige était ravissante et sa robe, quoiqu'un peu trop ouverte au col, demeurait tout à fait correcte. Elle semblait faite d'un tissu de qualité et, malgré sa couleur quelque peu voyante, elle ne remontait pas au-dessus des chevilles.
Alastor se surprit à chercher du regard le titre du volume qu'elle était en train de consulter. Cette femme l'intriguait. Comment pouvait-elle avoir besoin de tant d'ouvrages à la fois ? Ne savait-elle donc pas trier et ranger au fur et à mesure les volumes dont elle interrogeait le savoir ? Quelle déplaisante façon de gérer son espace ! Tout était étalé à qui mieux mieux, sans ordre.
La curiosité poussa le Vampire à approcher son bureau. Lentement, il finit par se placer derrière elle pour jeter un coup d'oeil sur les pages qu'elle tournait avec un sourire emprunt d'une étrange passion. Le Conservateur se pencha un peu en avant et reconnu les symboles que la jeune femme observait. Les maisons royales pré-victoriennes ? Mais que cherchait-elle donc ? Était-ce pour un travail de recherche ?

Bientôt, la belle sursauta en sentant sa présence et ses grands yeux d'un brun soutenu pénétrèrent les siens. Alastor n'eut aucune expression face à sa surprise. Fidèle à lui-même, il se contenta de se redresser, les mains dans le dos, pour l'écouter. La question que la jeune femme lui posa ne sembla avoir aucun rapport ni avec la situation présente, ni avec le livre qu'elle tenait devant elle. Le Vampire prit son sourire et son ricanement pour de nouvelles marques d'insolence. Aussi ne répondit-il pas, mais son regard en dit long sur son dédain. Il avait l'impression de se trouver dans la peau d'un précepteur qui doit composer avec une élève particulièrement récalcitrante.
Il soupira doucement, tandis que la belle s'excusait pour sa question sans queue ni tête. Elle lui expliqua alors que c'était sa première visite de la Bibliothèque et qu'elle se rendait maintenant compte qu'elle s'était sans doute "emportée" par rapport au nombre de livres qu'elle pourrait consulter dans la même journée. Enfin, elle lui demanda conseil et se présenta.
Alastor tâcha de se départir de sa froideur. Il lui sourit, par convention, et fit mine de vouloir la rassurer tout en la renseignant.


- Hé bien...Vous avez effectivement une drôle de façon d'organiser votre espace de travail, Mademoiselle, répondit-il en indiquant d'un geste circulaire les ouvrages étalés sur le bureau. En général, nous ne sortons pas plus de trois livres à la fois. Les étudiants ont pris l'habitude de ranger les ouvrages au fur et à mesure qu'ils les consultent. Je vous invite à en faire de même.

Maria Moonshire...Ce nom lui disait quelque chose mais il ne parvenait pas à le situer. Si c'était bel et bien la première fois que la belle entrait dans la Bibliothèque, cela était relativement logique qu'il ne la connaisse pas. Cependant, le Vampire avait l'habitude de maîtriser tous les potins de la capitale et se trouver face à une femme aussi "voyante", sans en savoir grand chose, le frustrait un peu. D'aucuns diraient que c'était-là l'occasion pour lui d'en apprendre un peu plus sur elle.

- Enchanté, Mademoiselle Moonshire, fit-il en esquissant une petite courbette, la main sur le coeur, avant de se redresser. Monsieur Drake, pour vous servir. Comme vous l'avez habilement deviné, je suis employé à la Bibliothèque. Je suis ici en tant qu'archiviste, conservateur et traducteur. Je suis également comptable à mes heures et précepteur pour les jeunes enfants qui ont des prédispositions un peu particulières...

Le Vampire marqua une pause. Il regarda la jeune femme par-dessus ses lunettes rectangulaires et lui sourit un peu plus franchement.

- Quant à l'escrime, j'en ai fait, il y a longtemps. Mais je doute de savoir encore manier le fleuret avec autant de facilité qu'alors.

Alastor sentit sa tension s'apaiser. Même s'il détestait les mondanités, car parler pour parler l'horripilait, satisfaire sa curiosité lui faisait toujours le plus grand bien. Et puis, la douce voix de la jeune femme et sa politesse venaient d'effacer ce qu'il avait pris pour de l'insolence un peu plus tôt. Finalement, si elle était nouvelle dans les parages et qu'elle venait se perdre dans la Bibliothèque, c'était qu'elle appréciait la culture et qu'il pourrait lui être utile.

- Vous conseiller une oeuvre spécifique sans connaître vos goûts me semble difficile, Mademoiselle. Quel type de livre souhaiteriez-vous lire et pourquoi ? Je vois que vous vous intéressez aux membres de la Couronne...Qu'êtes-vous venu chercher en ces lieux ? Est-ce par loisir que vous avez sorti tous ces ouvrages ou travaillez-vous sur un quelconque projet qui concerne ces prestigieuses maisons ?

Alastor s'éloigna un peu de la jeune femme pour réorganiser les livres qui traînaient sur le bureau. Il entreprit de les classer selon les rayons d'où ils étaient tirés afin de faciliter leur rangement.

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MessageSujet: Re: Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Icon_minitimeMer 28 Fév - 0:03

Je devais l'admettre, le voir toucher aux livres pour les réorganiser à sa manière manqua de me faire sourire. J'avais fait en sorte de les placer d'une manière qui, visiblement, ne lui convenait pas malgré le fait que cette organisation m'avait laisser plus de confort. J'avais donc affaire à un homme n'aimant pas qu'on touche à son domaine, sa bulle, son autorité. Je le regardais donc en silence, légèrement amusée.
Je fus cependant étonnée de sa réponse vis à vis de l'escrime, m'étant excusée pour cette question stupide, j'avoue que ses mots me perturbèrent légèrement, d'autant qu'ils tranchaient avec la précédente aura frigide et strict qu'il m'avait renvoyé. Me replaçant dans le fond de mon siège, j'analysais ses mouvements d'une manière qui m'étonna presque. Ses gestes étaient précis, sans aucun mouvement inutile, limitant le temps que cela prenait et l'effort requis. Refixant mon regard vers son visage, j'haussais doucement un sourcil face à ses lunettes rectangulaires. M'avait-il réellement appelée "mademoiselle"?


- Je pensais que tous les livres que vous triez actuellement auraient parlé à ma place quand à mes goûts et le type d'ouvrages que je souhaite découvrir. Tous les types me vont pour être parfaitement franche. Pour répondre à votre autre question, je ne suis ici que par plaisir de la lecture et l'envie d'en découvrir plus, d'apprendre et savourer le savoir détenu en ces lieux, entre autres choses.

Désignant de la main plusieurs ouvrages sur l'histoire d'Angleterre, j’enchaînais.

- Un ami que je connaissais autrefois m'avait dit que pour connaître l'histoire d'un pays, il fallait en apprendre plus sur l'histoire de ceux qui le dirigeaient. Ceci explique ma lecture sur les maisons royales. Et aux vues de ma lecture, j'avoue avoir été ignorante de bon nombres de sujets, mais comprend ainsi mieux grâce à cette lecture certains fonctionnement de notre pays, comme sa religion par exemple. Sinon, je dois bien vous avouer que ma question était plus tournée vers vous, et non pas pour mes propres désirs.  Comme je vous aie avoué, chaque livre me conviendrait, mais j'étais curieuse de savoir ce que vous, l'un des "maîtres" de ce lieu, pouvait estimer comme un ouvrage "supérieur" aux autres. Un grimoire vous ayant plus marqué que les autres? Un conte qui vous remémore votre passé et vous réchauffe le cœur peut-être?

J'émis un léger sourire, assez franc.

- Ne prenez pas ma question comme quelque chose de personnel je vous prie. Mais si quelqu'un connaissant la plupart de ces ouvrages peut me conseiller un livre avec assez de ferveur pour me transmettre son amour pour ce dernier, je pense qu'il pourrait alors s'avérer particulièrement plaisant à découvrir. Oh, et vous vous disiez précepteur n'est-ce pas? Vous faites dans l'éducation globale ou seulement ce qui a trait à la lecture et aux lettres? Qu'est-ce que vous appelez "prédispositions particulières"? Je vous avoue que ma curiosité a été piquée à vif, même si je ne crains qu'elle ne soit un peu intrusive.

Mes yeux pénétrèrent alors de nouveau les siens, et s'y perdirent. La froideur qui s'en dégageait me fascinait d'une manière presque mystique. J'avais connu bon nombre d'hommes blasés, ou qui se donnaient volontairement un air de gros dur froid et sans émotion. Mais ce personnage... Il dégageait autre chose. Une impression étrange, qui me faisait frissonner à la fois de peur et d'envie, presque érotique.
Détachant finalement mes yeux de son visage, je replaçais mon attention sur les ouvrages se trouvant de moi, soupirant doucement alors que je me relevais.


- Je devrais aller au moins ranger les livres que je ne pourrais lire aujourd'hui. Vous m'avez dit que nous ne devions garder que trois exemplaires maximum c'est bien cela? En ce cas je devrais peut-être commencer à ran...

La fin de ma phrase s'étouffa dans ma gorge tandis que mes yeux accrochèrent un jeune couple passant derrière le bibliothécaire. Ce dernier n'avait rien de particulier, mis à part le fait que le damoiseau ressemblait au client de Sophie, celui des compagnies orientales. Lorsque son regard croisa le mien, ce dernier fit mine de ne pas me reconnaître, comme bon nombre d'époux voulant masquer leur adultère et leur culpabilité d'avoir visité un bordel. Quoique, pour son cas, j'avoue qu'il eut été possible qu'il ne se souvienne vraiment, de rien, étant donné l'état d’ébriété dans lequel il avait été la veille. Sa femme me dévisagea à son tour, mais son regard était cette fois emprunt à une jalousie mal placée. Si les femmes nous en voulaient très souvent pour les actes de leurs hommes, il était assez ironique de constater que pour nous, ces derniers n'avaient rien de spécial. Il n'étaient que des clients parmi tant d'autres. Et ce même s'ils nous livraient des phrases qu'ils ne disaient à personne d'autres, et assouvissaient bien souvent leurs fantasmes dans nos bras et non celui de leur chère et tendre épouse. De plus, la particularité qu'avaient les gens de s'offusquer pour de pareils banalités demeurait pour moi un mystère entier. Pourquoi être désabusé si son amant en voit une autre, si au final il revient nous voir? Si le plaisir qu'il éprouve avec une femme qui n'est pas nous est supérieur, pourquoi le laisser dans une prison émotionnelle si on se dit "l'aimer"?
A plusieurs reprises, les filles m'avaient parlé des clients se disant "amoureux" d'elles, et de ce qu'elles mêmes, parfois, ressentaient. Je tentais aux travers de ces jeunes femmes d'en apprendre plus sur ce sentiment qui m'était étranger, et je constatais bien souvent que ma vision était en parfait opposition avec ce que cette société estimait comme correct. Enfin, ce n'était là qu'une futilité de mon esprit, et non une question de vie ou de mort.

Reportant mon attention sur le conservateur alors que le couple quittait mon champ de vision, j'en profitais pour refermer le livre sur les maisons royales avant de plonger mon regard en direction de mon interlocuteur.


- Veuillez m'excuser, je pensais avoir reconnu un ami. Je disais donc que peut-être devrais-je d'abord ranger les ouvrages excédant avant de m’atteler au reste de ma lecture.
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MessageSujet: Re: Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Icon_minitimeVen 16 Mar - 16:38



Un murmure écrit noir sur blanc

Maria Moonshire et Alastor Drake

"Quand l'histoire rencontre l'art."


Le 20 mai 1842
La Bibliothèque


Livre par livre, Alastor réorganisait les trouvailles de Maria avec une attention particulière. Au bout de quelques secondes à peine, il avait déjà édifié des piles, par genres et cotes, afin de faciliter leur rangement. Ses longs doigts fins parcouraient les tranches de chaque livre. Ils passaient doucement sur leur cuir bombé de nerfs avant de les prendre à pleine main et de les placer sur la bonne pile.
Sans se préoccuper du regard inquisiteur que jetait sur lui la jeune femme à ses côtés, le Vampire songeait déjà à une nouvelle façon de trier les ouvrages historiques. Il était rare que les visiteurs ne s'intéressent à l'histoire de l'Angleterre. Si Miss Moonshire ne les avait pas sortis de leurs rayons aujourd'hui, sans doute auraient-ils attendu de nombreux autres mois avant que l'on ne s'occupe de leur existence. Alastor pensa qu'il était temps de fabriquer des panneaux neufs pour mettre en valeur les plus intéressants d'entre-eux ou pour protéger les plus fragiles. Il allait devoir être d'autant plus méticuleux que la jeune femme reviendrait certainement continuer ses recherches.
Maria lui expliqua alors qu'elle pensait qu'il la conseillerait facilement maintenant qu'il était en train de trier les différents ouvrages qu'elle avait tiré de leur sommeil. Le Vampire acheva de poser l'un d'entre-eux "à sa place" (du moins temporaire) avant de lui jeter un regard oblique par-dessus ses lunettes rectangulaires. Il suivit des yeux sa main qui décrivait un arc de cercle pour indiquer les livres qu'elle avait rassemblés et l'écouta justifier ses recherches. Apparemment, un ami lui avait conseillé de se renseigner sur son pays en passant par l'étude des familles royales.


- Voilà un ami bien avisé, fit le Conservateur d'un ton neutre. Et il le pensait. Il lui semblait évident qu'il était nécessaire de connaître l'histoire de son propre pays pour en comprendre toutes les facettes.

Cependant, la belle finit bientôt par lui avouer qu'elle était surtout venue pour son plaisir personnel et qu'il venait de piquer sa curiosité : elle souhaitait désormais savoir quels livres un homme de son genre lui conseillerait. Apparemment, la jeune femme semblait partir du principe que son éducation et sa position au sein de la Bibliothèque lui conférait une espèce de science à laquelle il serait bon de s'abreuver. Evidemment, cette perspective n'était pas pour déplaire au Vampire quelque peu imbu de son savoir...
Maria prenait des pincettes pour arriver à ses fins : elle s'excusait pour sa curiosité, qui pouvait paraître déplacée, et faisait attention à ne pas le froisser avec ses questions quelque peu intimes. Néanmoins, cela ne l'empêcha pas de les poser. Sa nature semblait la pousser à découvrir de nouvelles choses et à s'instruire. Alastor appréciait cette démarche, qu'il trouvait d'ailleurs chez trop peu de visiteurs à son goût.
La jeune femme lui demanda même de lui expliquer un peu son rôle de précepteur et ce qu'il appelait "prédispositions particulières". C'était effectivement des questions quelque peu intimes mais le Vampire les prit avec plus de bienveillance que pouvait l'annoncer son regard sombre. Derrière son masque glacial se cachait un pédagogue qui appréciait grandement donner aux visiteurs de quoi satisfaire leur curiosité. Il ne se dévoilait pas réellement, jamais, mais discuter de son travail ne le gênait nullement, au contraire, le partager le motivait.

Alastor laissa le jeune femme plonger son regard dans le sien. Un éclat étrange y brillait, comme une pierre au fond d'un ruisseau. L'homme se rendit alors compte que ses iris étaient d'un brun presque rouge, comme les siens lorsqu'il buvait du sang. Une idée le frappa alors brutalement : n'était-ce pas une Vampiresse ? Ces yeux étranges, ce subtil éclat d'intelligence qui y régnait, ces longs cheveux d'un blond presque blanc, cette peau de porcelaine, cette robe un peu trop échancrée...De nombreux êtres de la nuit arboraient ce genre de physique avantageux et voyant. Mais...il ne sentait aucune aura. A moins qu'elle ne la cache avec brio, ce n'était pas une Longue-Dent. Alastor intensifia un peu son regard. A quoi pensait-elle ? Qui était-elle réellement ? Pour le savoir, il allait devoir prolonger cette conversation.
Ainsi Alastor allait-il répondre à Maria lorsque celle-ci se leva pour esquisser un geste vers les piles de livres afin de les ranger. Elle ne lui laissa pas le temps de converser, comme si elle craignait réellement que ses questions ne soient trop personnelles. Le Conservateur lui jeta un regard étrangement doux. Qu'elle se lève pour ranger ses livres et ainsi s'en tenir aux règles qu'il venait de lui expliciter montrait qu'elle était de bonne volonté. Cela fut plaisant pour le Vampire qui avait cru pendant un instant que son petit discours moralisateur ne soit encore tombé dans l'oreille d'un sourd.
Un couple attira soudain l'attention de la jeune femme qui s'interrompit, perplexe. Alastor lui jeta un regard interrogateur tandis que le duo s'éloignait. Maria s'excusa. Apparemment, elle avait cru reconnaître un ami. Un ami ? Réellement ? Le Vampire n'était pas né de la dernière pluie : il avait remarqué le regard courroucé de la femme au bras de ce qui était sans doute son mari. Un ancien amant oui. Mais qu'importe ? Cela ne l'intéressait pas le moins du monde.
Toussotant brièvement pour aider Maria à reprendre pied dans leur conversation, il fit un geste pour l'arrêter.


- Laissez. Je rangerai pour cette fois. C'est trois par trois, oui. Maintenant que vous avez compris notre système, vous en emprunterez moins la prochaine fois. Allons, vous pouvez vous rasseoir.

Le Conservateur lui indiqua la chaise qu'elle venait de quitter et ajusta une pile de livres près de lui, comme pour occuper ses mains.

- Vous voulez donc savoir ce que je lis ? Hé bien...Disons que ce qui me plaît est peu courant, fit-il en laissant finalement de côté les piles de livres pour se tourner plus franchement vers son interlocutrice. Je lis de tout, parce que je souhaite connaître le contenu de ce que nous mettons à dispositions des visiteurs, mais je suis plutôt attiré par des ouvrages d'une certaine « lourdeur », dirons-nous. Comme je vous l'ai dit, mes compétences ne se limitent pas au catalogage : je suis également archiviste et traducteur. J'apprécie donc les textes anciens et les formats encyclopédiques, que d'aucuns trouveraient affreusement rébarbatifs.

Le Vampire réfléchit un peu en se frottant le menton. Il ne répondait pas vraiment à la question posée par la jeune femme. S'il devait avoir une œuvre préférée, laquelle serait-ce ? Il ne s'était jamais attardé sur le sujet. C'était d'ailleurs étrange comme constat. Que lisait-il « par plaisir » ? Peu de choses au final...Il passait son temps à travailler, à déchiffrer, à compiler, à trier...Prenait-il seulement parfois une heure pour se plonger dans la lecture afin de s'évader ? Non. Cela ne lui arrivait pas. Ce qu'il lisait comportait toujours un intérêt intellectuel, édifiant, scientifique ou tout bonnement « pratique ». Le « plaisir » de lire, chez lui, passait par son utilité.
Après quelques minutes de silence, éminemment réflexives, le Vampire se frotta le menton et grogna un peu ce que son introspection révélait. C'était frustrant de ne pas pouvoir répondre rapidement à cette femme. Elle venait de le mettre devant l'un des aspects les plus rigides de sa personnalité.


- Je ne lis pas pour mon loisir, finit-il par avouer sur un ton quelque peu raide. Je n'ai pas réellement d'ouvrage « favori ».

Son visage perdit de sa superbe. Il fronça les sourcils et réfléchit encore. Quel livre utilisait-il le plus souvent ? Lequel avait-il consulté le plus ? Une idée lui vint alors.

- Je m'intéresse aux vitraux, reprit-il soudain avec une légèreté surprenante. J'aime comparer les techniques d'assemblage, la structure du verre, les pigments utilisés...Je consulte donc souvent des ouvrages techniques ou artistiques qui traitent ce sujet.

C'était la vérité. A bien y réfléchir, il passait beaucoup de temps sur les oeuvres qui compilaient les techniques des vitraux et prenait même des notes dans le même temps qu'il concevait lui-même des croquis de vitraux.

- J'apprécie énormément les oeuvres de Théophilus Presbyter. Je ne sais pas si on vous en a déjà parlé ?

Une envie soudaine d'instruire un peu la belle prit l'archiviste et, comme pour sympathiser avec elle, il s'assit en partie sur la table de travail et continua d'un air passionné :

- Théophilus Presbyter était un moine allemand, du XIème-XIIème siècle. Il a écrit le "Schedula diversarum artium", un traité sur les différents arts techniques du Moyen-Âge. Il s'attardait volontiers sur les vitraux, ce qui m'intéresse, mais aussi sur les mosaïques ou l'orfèvrerie. J'ai lu une des premières versions de son traité, dont une imprimée par Lessing, mais si vous voulez vous pencher sur son travail, je vous conseille d'attendre la traduction que Sir Charles Winston nous a promise, même si je doute qu'il ne s'y atèle avant quelques années.

Alastor marqua une pause. Puis, il se souvint de la seconde question de la belle. Quittant la table, il se redressa un peu et rajusta ses lunettes sur son nez.

- Je peux vous montrer ce livre si vous le désirez. Après tout, c'est mon rôle au sein de cet édifice. Il sourit brièvement à la jeune femme et frôla du bout des doigts la pierre rouge qu'il arborait sur son col. Vous vouliez également savoir ce que j'entendais par "précepteur", dit-il en la regardant d'un peu haut. C'est simple : les familles les plus nobles de la capitale me payent pour que j'éduque un peu leur charmants bambins le soir venu, lorsqu'ils quittent leurs prestigieuses écoles. L'âge n'a pas d'importance, mais disons que je n'accepte que les jeunes prodiges...Voilà ce qu'il appelait "prédispositions particulières": de l'argent et du potentiel inné. C'était un élitiste qui se revendiquait. Je déteste perdre du temps, ajouta-t-il pour bien appuyer son discours déjà très prétentieux.

Avisant Jézabel qu'il avait remarquée depuis un moment dans les rayons non loin d'eux, Alastor fronça les sourcils et s'interrompit. Il lui fit un signe de tête pour lui faire comprendre qu'il était temps qu'elle surveille l'heure plutôt que ses conversations. La secrétaire comprit le message et s'éloigna avec un petit sourire en coin qui ne manqua pas de crisper le Conservateur. Ce dernier soupira un peu trop fort pour que Maria ne se rende pas compte de son exaspération. Le Vampire passa une main dans ses longs cheveux noirs pour les remettre en arrière et tourna le dos à la secrétaire qui disparaissait déjà vers l'entrée du bâtiment et l'accueil.


- Allons bon, vous auriez dû venir avec votre mari : ma secrétaire va encore me faire des remarques désobligeantes, grommela-t-il en adoptant un air consterné. Elle lit trop de romances. Je devrais lui interdire certaines sections...

Étouffante ! Jézabel devenait réellement étouffante ! Depuis le passage de Raphaël Veneziano et d'Eulalia Grey, elle s'était mise en tête de le pousser à trouver une compagne. C'était exaspérant ! Il avait la désagréable impression d'être épié et surtout d'être en présence d'une enfant capricieuse qui s’immisçait dans sa vie privée.
Son regard trouva de nouveau celui de Maria. C'était une belle femme, aux formes généreuses et au visage plaisant. Elle n'était pas son genre, c'était certain, mais il ne pouvait pas nier qu'il lui trouvait un charme mystérieux. Jézabel pouvait bien se faire des idées : il trouvait cette femme bien plus agréable à regarder qu'elle !
Ronchon, le Conservateur se détourna de Maria et rougit presque de ses pensées. Avait-il réellement envie de prouver à sa secrétaire qu'il était capable de s'intéresser aux femmes ? Hors de question ! Il allait plutôt se contenter de faire son travail, en restant aussi détaché qu'à son habitude.
En touchant du bout des doigts les livres qu'il devait ranger, une brusque envie de sortir le prit : le petit manège de Jézabel venait de ré-exciter la colère que le manuscrit babylonien avait déjà réveillé chez lui quelques heures auparavant et il se sentit soudainement à l'étroit au milieu des tables de travail et des rayons. Respirer l'air frais lui ferait sans doute le plus grand bien. Cela ne manquerait pas d'alimenter les fantasmes de sa secrétaire mais, finalement, il s'en moquait éperdument.


- Avez-vous déjà visité l'église St George's Bloomsbury ? demanda-t-il à Maria d'un air entendu. Elle est à quelques rues d'ici. Elle est un peu délaissée et sombre, mais vous y trouverez quelques vitraux qui portent les emblèmes de Sa Majesté et de sa famille. Si vous vous intéressez aux lignées royales et à la symbolique qui les accompagne, peut-être qu'ils vous plairons ? Je pourrais vous les décrire si vous le souhaitez, je les connais par coeur.

La perspective de se promener dans le transept pour y respirer l'odeur si caractéristique de son pavage humide et d'y observer une nouvelle fois les grandes voûtes et les vitraux qui la composaient, l'enchantait. Jézabel avait raison : cela faisait trop longtemps qu'il restait enfermé et qu'il ne fréquentait personne. La traduction de son manuscrit babylonien l'avait rendu plus aigri que jamais et l'avait emprisonné dans son espace mental. Il fallait dire aussi que la menace du Comte pesait encore sur sa tête comme une véritable épée de Damoclès et qu'il n'avait pas pu sortir à sa guise sans craindre un mauvais coup...
Un éclat sur un encrier lui rappela alors au Vampire qu'il n'était que 17h-17h30 et que le soleil brillait encore dans le ciel. Il se rendit compte qu'il ne pouvait pas sortir, du moins sur l'heure, mais aussi que ses soupçons envers Maria n'avaient vraiment pas de fondement : puisqu'elle était arrivée en plein jour, elle ne pouvait pas être une buveuse de sang. Décidément, jamais encore il n'avait eu autant de mal à raisonner qu'en ce jour ! Il se contredisait et perdait toute notion du temps !


- Malheureusement, je dois ranger un peu tout ça et faire mon service jusqu'au bout...fit-il réellement déconfit de ne pas avoir le loisir de quitter les lieux. Peut-être que vous ne pouvez pas attendre la fermeture ? ajouta-t-il par politesse.

Déjà, il considérait qu'il n'était pas utile d'être en sa compagnie pour apprécier sa future promenade du soir. Mais, comme il venait de lui proposer de lui montrer les vitraux, il se sentait désormais obligé de l'inclure dans sa sortie.


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Alastor Drake
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Maria Moonshire
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Maria Moonshire
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Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Empty
MessageSujet: Re: Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Icon_minitimeLun 7 Mai - 11:13

Lorsqu'il m'indiqua la chaise, je me reposais dessus sans trop me faire prier. J'avoue que j'appréciais sa compagnie et pouvoir repousser le rangement des livres me plaisait assez. Croisant mes doigts tout en m'appuyant légèrement contre la chaise, je l'écoutais comme une enfant écoutant sa leçon du jour. Sa mine était plus sombre lorsqu'il m'avoua n'avoir aucun livre favori. Il lisait pour l'utilité? Pour le travail? Cela m'étonnait un peu. J'avoue avoir du mal à saisir ce concept humain. Pourquoi se forcer à faire quelque chose qui ne nous fournit aucun plaisir? A quoi bon se forcer la main? Cependant, je pouvais comprendre dans son cas précis, il se devait de connaître relativement les sujets abordés par ces œuvres, et il se devait également d'étendre ses propres connaissances. Plus il me parlait, plus il me semblait clair que je m'adressais à la personne la plus cultivée que je n'ai jamais vue. Sa question me tira de mon observation. Décroisant les mains, je passais l'une d'elle dans mes cheveux, cherchant dans ma propre mémoire.

- Je crains ne pas le connaître malheureusement. Instruisez moi.

Je le vis se poser sur la table et affichait un sourire plus doux encore. Il parlait franchement et j'aimais cela. Les vitraux... Je devais avouer que leur beauté ne m'était pas inconnue. A plusieurs reprises, Alvin m'avait autrefois emmenée dans divers édifices religieux pour en observer. Pour lui, c'était important que je puisse découvrir des choses aussi belles. Et il avait eu raison. Le travail minutieux dont avaient fait preuve les créateurs de ses peintures était remarquable. Même si depuis mon arrivée à Londres, je n'en avais pas observé un seul, ne me rendant que très peu vers les lieux où l'on pouvait généralement en profiter. En revanche, ceux de York m'étaient totalement connus, et je me demandais si mon interlocuteur les connaissait? Sûrement, vu l'étendu de ce que semblait être ses connaissances en la matière.
Sa remarque sur son métier de précepteur me fit sourire d'avantage, surtout face à l'air noble et hautain qu'il prenait en m'expliquant ses méthodes. Je retins cependant une remarque qui me titillait l'esprit. Je ne voulais pas le froisser de nouveau.

Lorsqu'il soupira à l'observation de ce qui semblait être son assistance, un petit rire mesquin s'échappa de ma gorge à ses propos. Moi? Mariée? Cette perspective étira chez moi un nouveau sourire.


- Pour venir avec mon mari. Il aurait sans doute déjà fallu que j'en ai un. J'ai connu un Homme autrefois, mais ce dernier n'est plus. Désolée si ma présence provoque des problèmes vis à vis de votre secrétaire, je m'en excuse. Ce n'était pas mon intention.

Fixant mon interlocuteur, j'haussais un sourcil à son attitude, mais reprenais bien vite un air plus doux et serein lorsqu'il s'adressa de nouveau à moi.

- Je serais plus que ravie de les observer avec vous Mister Drake. Votre compagnie est agréable et vous semblez parfaitement connaître votre sujet. Que rêver de mieux pour découvrir les œuvres dont vous me parler? Et ne vous en faites pas, je peux parfaitement vous attendre. Après tout, je comptais lire cet ouvrage jusqu'à la fermeture de cet établissement, donc il n'y a vraiment aucun soucis. Je vous attendrai à l'extérieur du bâtiment. A tout à l'heure donc?

Mon sourire était parfaitement franc. J'avais à présent hâte que la journée ne passe et que nous puissions partir découvrir les vitraux dont il m'avait parlé. Reprenant ma lecture, je dévorais avec appétit les écritures parsemant le papier, impatiente. Je me sentais aventurière, à m'imaginer parcourir une vieille bâtisse pour en découvrir les secrets ornés sur ses murs. C'était enfantin et stupide, mais cette perspective attisa en moi un feu que je ne connaissais que trop bien. Prise dans mes pensées et ma lecture, je ne voyais alors pas le temps passer. Si bien que le soleil entama sa longue descente à l'horizon. Fermant l'ouvrage que je venais de terminer, je le replaçais sagement dans son rayon puis saluais l'accueil tout en quittant finalement le bâtiment.

Prenant une grande inspiration, je respirais l'air londonien non sans plaisir. La température était encore plus qu'agréable, et mon observation de la foule se dirigeant de ci de là sur le pavé déclencha en moi une sensation de bien être surprenante. Peut-être m'étais-je trop d'impatience dans la promenade que m'avait promis Drake. Silencieuse, je me plaçais presque contre le mur de la bibliothèque, observant les personnes et les environnements présents, les mains jointes devant moi. La légère brise présente balayait dans les cieux quelques pollens tardifs, transportés de balcon en balcon, tandis qu'au sol, la poussière se dispersait peu à peu. Mon regard se perdit alors dans le vague, laissant mon esprit vagabonder lentement sur diverses choses. Des fois, mon attention se portait sur sur quelques personnes, analysant leurs mouvements, leurs attitudes. D'autre fois, je posais simplement mon regard sur des habitations ou des carrosses, prenant plaisir à m'imaginer aux balcons de ces dernières ou dans le moyen de transport, en compagnie d'un grand prince. Je ne voyais pas vraiment le temps passer ainsi, mais il fit rapidement un peu plus sombre, et la perspective que celui qui m'avait invitée ne vienne pas m'effleura l'esprit. Je ne lui en aurais pas spécialement voulu à vrai dire. Je ne le connaissais pas, et il avait sans doute ses propres obligations. Cependant, j'avoue que je préférerais visiter la bâtisse en sa compagnie. Seule, j'y prendrais sûrement beaucoup moins de plaisir.

Mon regard s'accrocha alors sur un jeune couple qui se baladait non loin de là. Le calme et la sérénité dont ils faisaient preuve laissa transparaître sur mon visage un sourire en coin. Je m'imaginais comment se passait leur relation. Suivaient-t-ils leurs instincts et s'adonnaient-ils aux plaisirs de la chair? Ou bien restaient-ils dans les vieilles traditions humaines et se contentaient-ils de simples flirts platoniques et inintéressants? Les humains avaient ce don, cette volonté de vouloir paraître chaste, quand dans leur fort intérieur ils n'étaient que des bêtes assoiffés de plaisir. Naturellement, certains étaient véritablement prudes, et "parfaits" dans leur moral, mais cela était bien trop rare pour se vérifier. Et puis, il fallait être honnête, j'avais beaucoup de mal à saisir le concept même de l'union "sacré". Si deux êtres s'attiraient l'un à l'autre, pourquoi fallait-il instaurer des règles à cet effet? Pourquoi rester bloqué et frustré face à ses propres envies? Il ne s'agissait pas de tuer la femme que l'on aimait, simplement de lui fournir un plaisir partagé.

Je passais facilement de bonnes minutes dans mes pensées à réfléchir à cette question, si bien que le couple avait déjà disparu de la rue depuis pas mal de temps, me faisant fixer l'horizon silencieusement, pensive. Je remarquais alors la présence dans le coin de mon champ de vision. Tournant la tête, je cherchais à cerner du regard la personne m'ayant sortie de mes pensées, espérant qu'il s'agissait de monsieur Drake.
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Alastor Drake
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Alastor Drake
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MessageSujet: Re: Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842] Icon_minitimeMer 19 Sep - 16:47



Un murmure écrit noir sur blanc

Maria Moonshire et Alastor Drake

"A travers ton éclat cristallin,
Je découvre mes pensées de demain."


Le 20 mai 1842
La Bibliothèque


Cela faisait bien longtemps qu'Alastor Drake n'avait pas trouvé le temps si long. Quelle ironie pour un Vampire ! Mais en ce jour, le conservateur qu'il était avait perdu toute patience. Son corps lui-même ne cessait de lui réclamer de l'air frais ! Il fallait dire qu'à force de travailler sur son grimoire babylonien et de ranger les rayons, sans compter qu'il devait subir les remarques de sa secrétaire qui ne cessait de l'importuner, il avait fini par soupirer bien plus que de coutume et de rêver de s'exiler loin de son sanctuaire.
Ainsi, même si la Bibliothèque avait toujours été son repaire et qu'il préférait largement oeuvrer sur ses traductions plutôt que de se mêler au commun des mortels pour badiner mondanités et stupidités, Alastor ne parvint-il plus à se sortir de la tête l'idée qu'il était l'heure pour lui de quitter son poste et d'aller flirter sous le ciel étoilé et la pâleur des rayons de lune au travers des vitraux de Bloomsbury...Il continua de ranger ses livres et de rendre service aux clients de l'édifice, mais il fit cela avec mauvaise humeur et une mollesse que peu lui connaissaient.
Jézabel elle-même le trouva bien plus étrange que d'habitude. Jamais l'homme n'avait autant consulté sa montre à gousset. Avait-il soif ? Cela devint inquiétant lorsqu'il fut presque 17h. Profitant de le croiser soudain entre deux rayonnages, la belle blonde l'interpella doucement en chuchotant afin d'enquêter sur le nouveau mal qui rongeait son maître.


- Vous vous sentez bien, Monsieur ? Puis-je faire quelque chose pour vous ?

Sur le moment, Alastor lui jeta simplement un regard noir, comme pour la dissuader de continuer de l'importuner plus longtemps. Puis, lorsqu'il comprit que son attitude avait poussé la jeune femme à l'interroger de la sorte, il soupira et rangea le livre dont il s'occupait avec un peu de colère.

- Je veux sortir. Voilà. J'ai besoin d'air.

La secrétaire fronça les sourcils et réfléchit un peu. Puis, elle sourit, d'un air entendu, comme si elle venait de comprendre clairement ce qu'il se passait chez son maître. Elle chercha un peu du regard les tables d'études avant de ramener ses yeux clairs dans ceux du Conservateur.

- Ah ! Oui...Je comprends...Mais vous savez, vous n'allez plus attendre longtemps. Regardez...Le soleil est presque couché. Les rideaux sont déjà gris. Je fermerai les portes derrière-vous, ne vous inquiétez pas.

Alastor lui jeta un regard surpris. Qu'avait-elle à prendre un tel ton ? Qu'avait-elle cru comprendre ? Bientôt, il saisit le quiproquo au sujet de Maria et grogna d'un air mauvais :

- Allons ! Mêlez-vous de ce qui vous regarde !

Sur ces mots, le Vampire tourna les talons et refusa de voir davantage sa secrétaire aujourd'hui. Son petit sourire en coin qui signifiait volontiers "je vois, vous avez une proie en vue, une amante sous le coude", le rendait malade. Quelle impertinence ! Comme s'il avait à se justifier de quoi que ce soit ! D'ailleurs, s'il sortait ce soir avec la jeune femme qu'il avait croisée tout à l'heure, ce n'était pas pour la courtiser, encore moins pour la saigner. C'était simplement un hasard. Leur discussion lui avait rappelé les vitraux : lui avait envie de les revoir et elle de les découvrir, autant se rendre ensemble à l'église. Rien de plus. C'était du moins ce dont le Vampire tentait de se convaincre.

Le temps passa. ll passa lentement, mais sûrement. Enfin, l'horloge sonna l'heure de la fermeture et les allées se vidèrent de leurs occupants. Alastor laissa le soin à sa secrétaire de fermer le bâtiment derrière lui et s'en fut dans l'air du soir, avec une cape et un haut-de-forme. Et ce fut sans aucun regret.
Dans le contexte actuel, cette sortie était en réalité une véritable folie. Même s'il faisait partie des Vampires assez puissants pour pouvoir tenir tête au Prince de la ville, Alastor n'était pas assez fou pour oublier qu'il était régi par les lois vampirique de la cité et que son dernier affront à l'encontre du Comte le plaçait dans une situation des plus délicates. Il avait tout de même soustrait au grand Vampire sa proie et son ennemi...sous son nez...Raphaël Veneziano était de nouveau en cavale, à cause de lui. D'ailleurs, Chastity Stephenson lui avait presque fait promettre de le récupérer, "au nom de la science" et pour "sa survie"...Quelle panade ! Peut-être qu'il allait tomber sur un des hommes de main du Comte ou sur un serviteur de cette fille d'inventeur ? Et si on venait lui demander des comptes, devant Maria ? Il y avait-là un grand risque de conflit...


*Au Diable ces idioties !*

Après tout, que risquait-il ? Un coup de poignard dans le dos ? Non...Une simple discussion houleuse et désagréable. Et puis, si la soirée dégénérait, n'avait-il pas lui aussi plus d'un atout dans sa manche ? Bien sûr que si. Il n'était plus temps de revenir en arrière et de se contraindre aux seules limites du sanctuaire.

Le Conservateur sortit donc et trouva facilement la jeune femme aux longs cheveux blancs avec laquelle il devait se rendre à l'église pou observer les fameux vitraux dont ils avaient parlé quelques heures auparavant. Il arriva lentement, avec retenue, et esquissa une courbette lorsqu'il fut à ses côtés.


- Miss Moonshire...Navré de vous avoir fait attendre...Permettez.

Le Vampire donna son bras à la jeune femme et leur marche put enfin commencer. Alastor n'était pas le compagnon idéal pour ce genre de promenade galante, loin de là. Silencieux, froid et apparemment détaché des vivants, il semblait plutôt agir comme un automate auquel l'on aurait indiqué un lieu où se rendre avant de tourner la clé dans son dos.
Cependant, il sentit qu'il était nécessaire qu'il fasse quelques efforts afin de ne pas donner à leur rendez-vous une tinte trop mélancolique ou rancunière, vis-à-vis de leur minuscule prise de bec au sujet des emprunts et du rangement des livres.


- Je suis désolé si je vous ai paru un peu crispé tout à l'heure. Je suis fatigué par mon travail. Cette promenade me fera le plus grand bien. Je suis enfermé dans la bibliothèque toute la journée et toute la nuit. Il est temps que je respire un peu, finit-il par dire sur un ton amer. Saint George's Bloomsbury n'est pas loin...

Alastor avait hâte qu'ils arrivent à l'église et qu'ils puissent se plonger dans la contemplation des vitraux. Meubler la conversation tandis qu'ils marchaient relevait pour lui de l'effort nauséabond que tous les hypocrites sont obligés de faire à longueur de temps. Le Vampire ne pouvait que très difficilement imiter ces gens-là et faire semblant d'être ravi de se trouver en "bonne" compagnie. La solitude était sa maîtresse depuis si longtemps qu'il ne savait plus ce qu'était une telle sortie.

- Je suis également navré d'avoir évoquer un mari que vous n'avez pas. J'aurais dû remarquer que vous n'aviez pas de bague. C'était fort maladroit de ma part, reprit-il doucement en tâchant de continuer la conversation. N'avez-vous pas de prétendant ? Une femme de votre âge, si je puis me permettre, et avec tant de...présence, a sans doute bien des partis prêts à lui offrir une belle vie, n'ais-je pas raison ?

En réalité, Alastor se moquait éperdument de la vie sentimentale de cette jeune femme. Mariée, veuve ou libre, cela ne l'importait pas le moins du monde. Il n'était pas là pour creuser son passé ou pour lui ouvrir les yeux sur son avenir. Il meublait, tout simplement, en rebondissant sur un sujet déjà évoqué dans l'enceinte de la bibliothèque. C'était plus facile.
Heureusement pour le vieux Vampire, la flèche de l'église fut bientôt en vue et son parvis, surmonté d'un immense fronton flanqué de six colonnes blanches leur ouvrit les bras.


- Nous sommes arrivés. Vous voyez ces colonnes ? Leur chapiteau est du style corinthien, c'est-à-dire avec des feuilles. Hawksmoor, l'architecte, a fait ça bien n'est-ce pas ? Elle est impressionnante...

Alastor aimait beaucoup cette église pour son aspect quelque peu antique et sa blancheur. Il aimait tourner autour le soir et observer son clocher.

- Si vous observez bien son clocher, vous pourrez constater qu'il est en gradin. C'est une pyramide échelonnée sur plusieurs degrés. Et la statue qui la surplombe est celle de Saint Georges, bien évidemment.

Tel un guide, Alastor montra ainsi à Maria les différents aspects de la structure externe de l'édifice. Il fut patient et passionné. Une étincelle de plaisir brillait dans son regard, comme si l'air frais du soir et la vue de ce bâtiment avait réveillé la vie qui s'était endormi derrière son masque de conservateur rigide au sein de la bibliothèque.

- C'est malheureux qu'un bâtiment pareil peine à demeurer occupé. Il est presque à l'abandon. Je l'ai d'ailleurs signalé et un programme de restauration est en cours. Le Conservateur soupira, mélancolique. Méfions-nous, c'est devenu un lieu mal fréquenté la nuit...Le prêtre qui s'en occupe est souvent absent.

En entrant dans l'édifice, Alastor et Maria trouvèrent des bougies allumées et une délicate odeur d'encens. Apparemment, le prêtre était là ce soir et l'église avait été entretenu en journée. Le Vampire respira l'air en souriant légèrement, heureux de constater que ce n'était pas aussi dramatique que ce qu'il venait de dire.
Lentement, le duo entreprit de faire le tour des vitraux. Alastor s'arrêta à chacun d'entre-eux pour expliquer à la jeune femme ce qui y était représenté et pour discuter des différentes techniques de mise en couleur et de découpage du verre. Il lui indiqua que les jointures en plomb étaient parfois très difficiles à faire mais que c'était un matériaux nécessaire et malléable à souhait. Il prit le temps de détailler les effets et de dater les dessins pour instruire la belle. Il alla même jusqu'à lui poser des questions pour voir ce qu'elle savait et pour la pousser à la réflexion plutôt que de l'abreuver bêtement de son savoir sans lui faire travailler l'esprit.

Au bout d'un moment, ils se retrouvèrent devant un grand vitrail qui représentait Jésus sur la croix. Alastor tiqua un peu et se tue. Il se sentait fatigué mais également traversé de nombreux souvenirs cruels.


- Maria, fit-il soudain sans quitter le vitrail des yeux, croyez-vous en Dieu ?

Made by Neon Demon


L'homme sans passé n'est que ruine future.
Alastor Drake
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Un murmure écrit noir sur blanc. [Maria, Alastor] [20/05/1842]

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