[Commencement des Rps de Gaspard et Julia]

Gaspard poussa la grande porte de chêne du Salon, quelques têtes se tournèrent vers lui, d’autres lui adressèrent un salut modéré. L’aristocrate passa une main dans ses cheveux et entra d’une démarche assurée, presque féline, dans cette pièce où tous parlaient, que se soit lentement, d’une manière enjouée où endormie. Oui, il était tard et oui c’est à cette heure seulement qu’un grand homme comme monsieur Sorel arrivait dans un salon mondain. Il était habillé élégamment et sa cape flottait derrière lui à la mesure de ses pas. Gaspard prit place sur l’un des fauteuils et posa sa cane-épée à porté de main. Installé confortablement, il regarda ce qu’il se passait autour et entreprit d’écouter indiscrètement les conversations. IL pouvait se le permettre, il était un homme fortuné et intimidant. Peu de personnes osaient simplement croiser son regard, encore moins le soutenir. Mais l’aristocrate se fichait de ses marques d’attention, ce qu’il aimait la dedans, c’était que lui et lui seul engageait la conversation avec les autres.
A sa droite, des hommes parlaient de tout sauf de littérature ce qui fit sourire Gaspard. Les hommes se ressemblent tous. Lui aussi était un homme, mais un homme peu ordinaire à qui les années avait apporté une certaine sagesse. Peu de temps après, tous firent silence. Un homme dont l’aristocrate ignorait le nom, allait présenter un ouvrage. Gaspard tendit l’oreille et écouta attentivement, mais son intérêt n'était pas grand. A la fin de la présentation, il commença à y avoir débat et le brouhaha recommença.

Le lycanthrope vit un serveur passer non loin de lui avec une carafe de vin rouge et quelques verres, il leva la main faisant ainsi comprendre qu’il était intéressé. Le serveur s’approcha et déposa le tout sur la table basse. Il servit un verre et le tendit à Gaspard.

- C’est un Château Lafitte monsieur Sorel.

L’aristocrate acquiesça, prit le verre entre ses mains et sentit ses arômes. Cassis. Cèdre. Gaspard porta le vin à ses lèvres. Ses papilles s’éveillèrent soudainement, appréciant l’ôte sucré et frai qui comblait ses sens. Ce vin mature gardait une souplesse exquise que le lycan trouva à son gout. Alors qu’il dégustait, ses yeux rencontrèrent ceux d’une belle jeune femme, dont le charme le laissa totalement indifférent. Cependant quand son regard la quitta, il sentit un picotement au bout des doigts, ce qui le fit hausser un sourcil. Les réactions de l’inconscient sont impénétrables. Il fixa discrètement son attention sur ce qui se disait aux côtés de la demoiselle, mais ce n’était que des bavardages qui ne l’intéressaient guère, jusqu’au moment où la jeune femme prononça le mot vampire. Quelques têtes s’étaient tournées vers elle, soit étonnée ou outrée. Il est vrai que ce sujet est dur à aborder quand on n’est pas en petit comité. Beaucoup ignorent l’existence des êtres de la nuit, que se soit les vampires, les loups-garous ou encore les lycanthropes, et la plupart des croyants les assassines où en sont eux-mêmes. Gaspard était tout de même étonné d’entendre cela sortir de la bouche d’une femme si jeune, qui pourtant fréquentait les salons.
La conversation aurait pu devenir intéressante, mais aucun des interlocuteurs de mademoiselle Thanas n’y accordait d’importance. L’aristocrate reprit donc le flot de pensées qui encombraient son cerveau et bût une nouvelle gorgée de vin. Il faudrait entreposer un caisson ce grand cru dans l’une de ses caves, il était trop bon pour s’en priver.
Gaspard Sorel se souvint alors qu’en entrant dans le salon, il avait aperçut un nouveau tableau, d’un geste fluide il empoigna sa cane-épée, se leva de tout son haut et dirigea ses pas vers ledit tableau disposé sur le mur est. La fois dernière, était placé à cet endroit une reproduction de autoportrait aux deux cercles de Rembrandt, cependant il avait été remplacé par une gravure sombre où se mêlaient nature et ruines dans une harmonie douteuse. C’était comme si la nature reprenait ses droits sur ce qu’avait construit les hommes. L’aristocrate regarda le nom de l’artiste qui avait créé cette œuvre : Doré. C’était un nom qui lui était inconnu et bien qu’il ne soit pas grand amateur de gravures, il se promit de chercher quelques informations sur cet homme. Qui sait, peut-être deviendrait-il célèbre. Le lycanthrope se retourna et chercha des yeux la demoiselle Thanas. Cependant la foule d’hommes et de femmes l’empêchait de voir si elle était toujours assise au même endroit.

La conversation avait tourné court. Merdéria Palan avait soutenu à Julia que les créatures de la nuit étaient un mythe, une rumeur de petites gens. Le ton avait prit de la force et la jeune femme avait prétendu devoir rentrer pour prendre congé. Monsieur de La Phalère et elle avaient salué Merdéria le plus courtoisement possible et ils s’étaient levés. Après avoir remit leurs manteaux, de neige et de fourrure pour Julia, de toile et d’ombre pour Antoine de La Phalère, ils saluèrent de quelques gestes leurs connaissances et allèrent vers la sortie d’un pas rapide, Julia précédant son ami.

- Je trouve ce Monsieur Palan d’un rationnel affligeant ! Il…

Ayant un instant tourné la tête vers Monsieur de La Phalère, Julia n’avait pas regardé devant elle. La jeune femme percuta ainsi brusquement un homme. Ses mains se posèrent en réflexe sur son torse habillé de doux vêtements, elle sentit un agréable parfum réveiller ses sens et elle recula le teint rosé manquant de tomber en arrière. Elle fut retenu de justesse par son ami surpris de l’arrête soudain de la belle.

- Oh ! Je suis confuse, excusez-moi !

Surprise, elle reconnu l’homme à la chevelure de feu qu’elle avait aperçu tout à l’heure. C’était une étrange situation : à croire que le destin voulait absolument les faire se rencontrer. Julia remarqua alors une particularité qu’elle n’avait pas vu de loin chez lui : mises à part sa beauté et sa prestance, il possédait des yeux d’une couleur étrange. Son iris était de braise et sa pupille étroite lui donnait un air attentif, sauvage…Cet homme l’attirait…Un lien inexplicable pour le moment la rattachait à lui. Voyant que Talia ne détournait plus le regard de l’homme, Monsieur de La Phalère intervint entre eux.

- Veuillez nous pardonner cet empressement monsieur nous allions sortir.

Il salua d’un signe de tête courtois l’homme et tendit son bras à Julias pour qu’elle le prenne et qu’ils quittent le salon.

- Attendez Antoine, nous ne nous sommes même pas présentés. Fit la jeune femme en ignorant l’invitation du gentleman.Je m’appelle Julia Thanas et voici Monsieur de La Phalère. C’est la première fois que je vous voit et pourtant vous me semblez être un habitué. Remarquez, d’habitude je ne sors pas si tard.

Julia sourit. C’était vrai qu’elle ne venait pas au salon de Fitzrovia à cette heure et que si elle y était ce soir ce n’était que parce qu’Antoine avait réussit à convaincre sa mère.

Gaspard les yeux perdus dans le vague se disait que cette soirée avait vraiment été étrange, surtout après avoir entendu cette jeune femme parler de vampires. Etait-il possible qu'elle en connaisse? Peut-être en était elle une. Le lycanthrope inspira profondément, il était temps de partir. Il jetta un dernier regard vers le tableau de ce cher et inconnu Doré, en pensant que si cet homme avait vécu au XVIIème siècle, ses gravures auraient certainement étées plus reconnues. Soudain, une personne le bouscula, sous le choc, il fit un pas en arrière, en tendant tout de même la main pour ratraper la femme qui s'était trop vite reculée et qui venait de manquer de faire une chute. Cependant il referma ses doigts sur le vide et vit qu'un homme avait soutenu la jeune femme. L'aristocrate reconnu alors mademoiselle Thanas et l'homme qui l'accompagnait. La demoiselle s'excusa et Gaspard pinca les lèvres, puis les entrouvrit. Il n'avait pas envie de paraître outré devant cette jeune personne, pas aujourd'hui.

- Je vous en pris, ne vous excusez pas, je suis le seul fautif.

Ce qui devait être vrai, étant donné qu'il n'avait normalement rien à faire dans le passage à rêvasser. L'aristocrate rendit son salut à l'accompagnateur de la demoiselle et s'aprêta à sortir à leur suite. Mais la jeune femme prit la parole et se présenta elle, ainsi que son ami. Gaspard regarda la demoiselle dans les yeux et inclina légèrement la tête.

- Je me nomme Gaspard Sorel et suis fort heureux de faire votre connaissance. Il prit la main de la demoiselle et la baisa. Ensuite il se recula. Sachez qu'il n'est pas étonnant que vous ne m'ayez jamais vu s'il n'est pas dans vos habitudes de fréquenter le salon à ses heures.

L'aristocrate jeta un oeil vers la porte puis revint à Julia. Allait-il aborder le sujet de but en blanc? Non. Les convenances humaines ne permetteraient une telle familiarité, çe serait déplaçé. Surtout que la conversation qu'il voulait engager, concernait des paroles qu'il avaient surprises, et donc qu'il n'auraient jamais du entendre. Ou tout du moins, ne pas les aborder. Il vaudrait mieux attendre un moment plus propice, un prochaine rencontre éventuellement. S'il le fallait, Gaspard reviendrait plusieurs fois cette semaine, plus tôt, afin d'apaiser les questions qui le taraudaient.

- Je ne voudrais pas vous retarder plus que je ne l'ai déjà fait, veuillez de nouveau accepter mes excuses. Au revoir Il inclina la tête vers Julia et monsieur de La Phalère, puis avança vers la porte, pour se retourner avant de l'avoir dépaçée. Il se regarda vers la jeune femme. Vous reverrais-je un jour?

Question osée.

Gaspard s’étonna de sa chance en entendant la jeune femme lui indiquer son lieu de résidence, cependant Julia et son ami durent s’éclipser rapidement, ce qui ne laissa pas le temps à l’aristocrate de répondre. Celui-ci regarda la jeune femme s’éloigner au bras de monsieur de La Phalère et envia étrangement cet homme. Il ne désirait pas cette femme, simplement il voulait connaître ses secrets. Un simple désir de réponses, rien d’autre. Le lycanthrope jeta un œil derrière lui et sortit. Sa demande n’avait attiré aucune personne et cela le rassura, même si quelqu’un d’aussi haut placé que lui aurait pu résoudre un problème en levant simplement son petit doigt.
Un homme lui tendit son manteau, il le prit sans le mettre, mais une fois dehors, il se rendit compte du froid mordant et se ravisa. Il déposa sa cane épée sur le muret et se revêtit. Du coin de l’œil il observait un couple d’amoureux qui s’embrassait à pleine bouche au beau milieu de la rue. Bien qu’il fasse nuit, il trouva cela déplacé, c’était d’un manque de pudeur apparent. Même son attitude avec mademoiselle Thanas était moins provocante que celle-ci, surtout que d’après ce qu’il voyait, ces personnes étaient habillées de façon bourgeoise. Il soupira et son souffle forma un nuage de fumée, il la suivit du regard jusqu’à ce qu’elle se dissipe et aperçut la lune. Celle-ci n’était pas encore pleine, mais l’heure de la métamorphose viendrait bientôt.
Gaspard reprit sa canne-épée et s’aperçut alors dans le couple qu’il avait aperçut, la demoiselle ne désirait surement pas cette étreinte. L’aristocrate savait que cela ne le regardait pas, mais ses veilles manières de gentilhomme datant maintenant de plus de deux siècles, ressurgirent en lui. Il s’approcha à grand pas du couple et s’éclaircit la gorge.

- La rue n’est pas le meilleur endroit pour passer inaperçu à embrasser une fille qui ne le désire guère. Dit-il d’un ton hautain.

Il se rendit compte que les deux personnes tenaient en fait celles qu’il venait de quitter il y avait à peine une minute. Cela le choqua un instant. Peut-être aurait-il mieux valu qu’il se taise. Cependant, le mal était fait. Et de toute manière, il n’avait rien à se reprocher, les convenances étaient avec lui, et l’avis de la jeune femme aussi. Enfin l’espérait-il.

- Je n’aurais jamais cru vous revoir si vite, dit-il à l’adresse de l’un comme de l’autre.

Cette remarque était à double sens, il était à la fois heureux de revoir Julia Thana, mais pour son accompagnateur, cela équivalait à une sorte de réprimande, non méritée d’ailleurs. Gaspard posa ses mains l’une sur l’autre sur sa cane et attendit que son interlocuteur réponde. Le visage dur, la tenue droite, l’aristocrate espérait une réponse satisfaisante.

Monsieur de La Phalère lâcha brusquement Julia qui recula mais qui se vit être aussitôt attrapée par le bras. D'un geste sec l'homme avait de nouveau serré une main autour de son poignet pour la tenir fermement et l'empêchement tout simplement de s'éclipser dans la rue ou pire, de rejoindre cet homme hautain, cet importun qui venait de briser son bonheur égoïste.

- Vous ? Mais !? Je ne vous permets pas de telles remarques monsieur !

L'attitude posée du beau Sorel apaisa quelque peur le coeur battant à tout rompre de Julia mais elle tournait son poignet pour tenter de se dégager.
Soudain, Antoine la lâcha et elle entendit un bruit de claquement. Lorsqu'elle releva la tête, elle vit que le bourgeois venait de gifler l'aristocrate avec son gant blanc. Un soufflet ! Il venait de provoquer en duel l'aristocrate ! Car oui maintenant c'était évident que Gaspard Sorel était un de ces hauts hommes: il en avait la posture, les manières...
Choquée par sa soudaine prise de conscience, les mains sur la bouche, Julia recula encore.
Antoine de La Phalère remit son gant la tête haute puis interpella un jeune homme qui avait une canne-épée et lui emprunta. L'homme se mit en garde et prit une posture pleine de menaces.

- Humpf ! Un jeune homme tel que vous devrait savoir qu'il n'est pas acceptable d'intervenir de cette manière dans les affaires d'autrui !
Battez-vous si vous en avez les trippes !

Julia attendit, morte d'inquiétude, la réaction de son beau sauveur.

Gaspard haussa un sourcil en entendant ce monsieur de La Phalère s’adresser à lui avec un: ‘je ne vous permets pas’, qui était fort déplacé pour un homme en sa posture. Ce bourgeois rappelait au Lycanthrope certain des courtisans qu’il avait connu il y a des années. Des hommes prêts à tout pour avoir raison et quand celle-ci les abandonnaient, ils ne demandaient plus que pardon.
L’aristocrate reçut le soufflet sans broncher, il fallait s’y attendre, il remercia même intérieurement ce sot d’avoir choisit si vite son avenir. Pendant que son ‘ennemi’, se préparait, Gaspard retira le manteau qu’il venait de mettre, le replia et le déposa délicatement sur le muret blanc. L’homme aux cheveux de feu remonta les manches de sa chemise jusqu’aux coudes et retira sa cravate, puis il sortit l’épée de son fourreau et se plaça devant La Phalère, prêt à l’attaque.

- L’homme que je suis sait faire présence quand son honneur est en jeu, ou encore celui d’une femme ! Gaspard passa sa langue sur ses lèvres. Par contre je vois que vous n’avez toujours pas apprit, malgré votre âge, que le sexe qui est de tout notre opposé, aime qu’on lui obéisse et non qu’on impose nos caprices !

Sur ses mots, l’aristocrate fit un pas vers la gauche, puis un autre vers la droite, l’arme tendue devant lui. Son regard était rivé sur celui de La Phalère, brûlant d’adrénaline. Il était rare qu’il puisse dégainer son épée, alors il allait en profiter.
Gaspard salua son opposant et attaqua, les épées s’entrechoquèrent, coups après coups, augmentant le rythme cardiaque des deux adversaires. Une fois que le souffle de La Phalère se fit plus bruyant, Gaspard qui avait des centaines d’années de pratique, engagea sa lame dans la garde de son opposant et par une torsion du poignet, il fit sauter la lame dans les airs. Celle-ci retomba sur le sol dans un bruit métallique, non loin de mademoiselle Thanas.
L’aristocrate s’éloigna de La Phalère et rengaina sa canne-épée. Il se tourna ensuite vers le perdant et lui dit :

- Je souhaiterais que cette défaite vous fasse changer d’avis à mon sujet. Il esquissa un sourire et regarda la jeune femme. J’espère que ce combat ne vous a pas trop choqué, si c’est le cas, je m’en excuse.

Le lycanthrope se rhabilla et reprit sa canne en main.

- Avez-vous une demande à m’exposer avant que je ne vous quitte ?

Julia avait sentit son coeur s'accélérer encore lorsque l'aristocrate s'était préparé au combat. Il était beau et si sûr de lui ! Il avait la démarche d'un gentilhomme et les manières si courtoises...Il avait reçu le soufflet avec une telle indifférence, comme s'il avait l'habitude de tomber sur des bourgeois prétentieux comme De La Phalère !
La bataille s'engagea alors et Julia suivit tout de son regard apeuré. En réalité, elle avait peur pour Gaspard et non pour Antoine. ELle avait déjà vu son "ami" combattre à l'entraînement et lorsqu'il lui avait montrer son savoir faire et il était fort, très fort !
Soudain, l'aristocrate désarma le bourgeois. Le combat était fini: il ne lui avait suffit que de quelques minutes pour déshonorer De La Phalère.
Les mains sur la bouche, agréablement surprise, Julia songea avec soulagement que personne n'avait été blessé et intérieurement elle rit du ridicule de son prétendant dont l'orgueil venait certainement de se briser en mille morceaux.
Gaspard se rhabilla et demanda à Julia si elle avait quelque chose à dire.

- Heu...je...merci... bafouilla-t-elle encore sous le choc. Son teint avait rougit lorsqu'il c'était adressé à elle. Je...DERRIERE VOUS ATTENTION !

Julia poussa un cri et plaqua ses mains contre sa bouche tandis que la détonation résonnait encore dans la rue. De La Phalère venait de sortir un pistolet de son pantalon et de tirer dans le dos de l'aristocrate. La balle lui avait traversé le flanc et avait ricoché contre un mur non loin de Julia.

- Monsieur Sorel !

La jeune femme s'agrippa au bras du blessé les yeux remplis de larmes, choquée par une telle traîtrise et une telle situation.

Gaspard n'eût pas le temps de réagir que la balle lui traversa le flanc. L'aristocrate cria tout en lâchant sa canne, ou plutôt sa gorge émit comme un grognement de rage et de douleur. Les jambes en coton, il posa un genoux à terre en attrapant l'un des barreau noir et rouille qui surplombait le muret, sa main le serra avec force, comme si sa vie dépendait maintenant de lui. Son autre main tenait le bras de mademoiselle Thanas qui semblait bouleversée. Il la regarda la mine sombre, son sourire dorénavant muré derrière une grimace de souffrance. Il tenta de la rassurer, cependant les mots ne sortaient pas.
Soudain un regard assassin traversa ses yeux de feu, il pensait à cet homme qui venait de le blesser. Gaspard tourna la tête et le chercha, il était toujours à sa place, souriant et sûrement fier de son coup. L’aristocrate qui n’avait pas pour habitude de s’énerver, de se faire tirer dessus non plus, murmura un juron odieux et s’écarta de la jeune femme tout en se relevant, tout chancelant. Il prit appui sur sa canne épée et défia le traitre du regard. C’était vrai, jamais il n’aurait du se mêler de ce qu’il ne le regardait pas, mais la galanterie et la bienséance l’avaient poussé à affronter La Phalère. Maintenant, c’était lui qui se retrouvait dans une mauvaise situation. La balle qui lui avait perforé le ventre l’avait affaiblit, mais pas assez pour l’empêcher de répondre à cette lâcheté. La main sur sa plaie, Gaspard tentait vainement d’arrêter son sang de se répandre hors de lui.

- Prenez une épée et finissons ce que nous avons commencé, siffla l’aristocrate entre ses dents.

Il attrapa le gant qui se trouvait dans sa poche, celui-ci arriva en pleine figure de La Phalère, déposant une tache de sang sur l’une de ses joue. Le lycanthrope dégaina son arme et attendit que le traitre fasse de même. Ensuite, il avança d’un pas instable vers le bourgeois, tout en pressant ferment sa blessure.
Son comportement de jeune gentilhomme avait laissé place à une rage animale qui faisait trembler ses membres. La pitié n’était plus de mise, seule la haine animerait les prochains coups de Gaspard. Bien que blessé, il restait tout de même un combattant de première classe, ses coups avaient beau être moins rapides, ils étaient plein de précision. Cependant, son souffle se faisait sifflant, son flanc l’élançait. Si le combat ne se terminait pas promptement, son ennemi ne paierait jamais pour son arrogance.
Le lycanthrope fit un geste ample, compromettant sa défense et assigna un coup au beau parleur, lui éraflant la cuisse. Gaspard sentit qu’il était à sa merci. Il donna quelques autres coups, tâchant de le déstabiliser, laissant La Phalère gagner du terrain. Celui-ci reprenant confiance en lui, ne fit pas assez attention quand Gaspard mit plus de force dans son coup et transperça le pauvre homme jusqu’à la garde. Il retira rapidement son épée et laissa le lâche tomber au sol, toujours vivant. L’aristocrate recula de quelques pas jetant un regard plein de mépris à la larve qui gisait sur le sol. Puis il se retourna et posa son aristocratique fessier sur le muret. A moitié plié en deux, il grognait et ignorait mademoiselle Thanas.
Peu après, il poussa un profond soupire et se remit sur pied.

- Voulez vous que je vous dépose quelque part ? Demanda-t-il à la fois par courtoisie et aussi parce qu'il fallait qu'il quitte les lieux rapidement.

Julia avait suivit avec terreur le combat qui s'était de nouveau déclanché. De La Phalère ne faisait réellement pas le poid et cette fois-ci, le redoutable Gaspard en fini avec lui de manière définitive.

- Antoi...

La jeune femme plaqua une nouvelle fois ses mains contre sa bouche pour étouffer une exclamation. Son ami tomba au sol et son sang se répendit sur le sol. Il était inconscient, peut-être même mort ! Qu'allaient dire sa mère et sa grand-mère ? Qu'allait-il lui être reproché ? Elle avait été témoin de la scène !

- Ho...Monsieur Sorel...

L'homme aux cheveux de feu se redressa et lui demanda si elle désirait qu'il la dépose quelque part. Comment pouvait-il être encore debout avec une balle logée ainsi dans son flanc ? Cet homme était extraordinaire...si étrange...
Chocquée, Julia entendit des voix et des bruits de pas précipités qui venaient vers eux. Le voisinage arrivait et des habitués du Fitzrovia sortaient du salon pour voir ce qu'il se passait.
Julia s'aggrippa à la veste de l'homme les yeux emplis de larmes.

- Emmenez-moi loin d'ici ! N'importe où ! Je vous en supplit faites qu'ils ne me voient pas ! Faites moi disparaître !

Elle enfouit son visage d'ange dans les replis du tissus parfumé de l'aristocrate et hocqueta fondant en sanglot. Après tout, elle était encore très jeune et ce qu'elle redoutait le plus, c'était la justice humaine...

L'aristocrate se sentit vaciller, le combat l'avait éreinté et depuis que La Phalère était à terre, l'adrénaline retombait, la douleur redoublait. L'aristocrate sentit Julia en larmes se presser contre son torse, il remarqua aussi un attroupement d'humains curieux qui se formait autour du traitre. C'était le moment de s'éclipser. On s'occuperait plus tard de retrouver l'agresseur, en cet instant l'heure était grave, un homme gisait sanglant sur le sol, à moitié mort. Les personnes présente dans la rue étaient choquées par cet évènement, mais ne semblaient pas s'apercevoir que Gaspard peinait à rester debout. Peut-être le prenaient-ils pour une petite nature, peut-être s'en moquaient-ils aussi.
Le lycanthrope posa sa main dans le dos de la demoiselle, il avait mal et cela devait se voir sur son visage, son regard croisa celui de Julia.

- Partons, dit-il en s'écartant, vite.

Il attrapa son manteau et le déposa sur ses épaules, il prit ensuite sa canne-épée, puis prit les devants. Sachant que la jeune femme le suivait, il avança sans se retourner vers le coin de la rue ou son cocher, Valentin, devait se trouver. Fort heureusement, le jeune homme n'avait pas prit la poudre d'escampette pour aller rejoindre une jolie demoiselle en attendant son maître.
Valentin salua le lycanthrope et s'aperçut que quelque chose s'était passé, mais il n'en fit rien. Il ouvit simplement la voiture, aida la demoiselle inconnue à monter et referma la porte derrière Gaspard. Puis il prit place et lança les chevaux au petit trot vers la maisonnée de monsieur Sorel.

Direction Rétablissement et découverte