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Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42]

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Alexender Von Ravellow
Hunter - "Criminel" en fuite
Alexender Von Ravellow
Nombre de messages : 382
Date d'inscription : 11/03/2008
Race : Humain
Classe sociale : Aristocrate déchu
Emploi/loisirs : Hunter / Il est recherché par le Yard et les Vampires de Jirômaru Keisuke.
Age : 25 ans
Proie(s) : Tous les Vampires, sauf Raphaël qu'il surveille maintenant sans chercher à l'assassiner. Le Comte Kei est son pire ennemi. Alexender peut aussi s'attaquer à des Loups-Garous.
Crédit Avatar : Créé via Artbreeder.
Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Empty
MessageSujet: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeJeu 6 Mar - 9:55

[HRP/ Revenant du post "La Résistance s'organise"/HRP]

Lorsqu'il s'éveilla, Alexender était aveugle. Il battit lentement des paupières comme pour aider sa conscience à retrouver le chemin de son royaume saccagé. Le néant l'environnait. Le néant et le froid. L'obscurité était totale. Elle voilait ses yeux comme un bandeau d'encre. Avait-il perdu la vue ? Non...il était tout simplement enfermé. Était-ce la nuit ? Comment savoir... ?
Le jeune homme se demanda s'il était encore dans l'un de ses affreux cauchemars ou s'il était de retour dans le monde réel, cet amas de cruelles vérités dont la noirceur ne cessait de grandir et de l'envelopper depuis qu'il avait ramené sa carcasse à Londres. Sa salive, glacée et pâteuse aux commissures de ses lèvres entrouvertes, lui collait la bouche sur un sol rugueux, inégal et visqueux. Il toussa. Un goût de terre entre les dents, la dureté râpeuse d'une pierre sous la joue, un mal de crâne insoutenable...Où était-il ?
Se mettre sur son séant fut une épreuve. Il n'y avait pas une parcelle de son corps qui ne semblait pas tuméfiée. Soulevant ce dernier, qui lui parut incroyablement pesant, l'aristocrate déchu se redressa tant bien que mal. Son pied droit glissa. Certainement une flaque d'eau...Mais il réussit finalement à s'asseoir. Sur ses épaules, de longs filaments glissèrent lentement, comme une toile d'araignée défaite s'effiloche à tout vent. Sa peau, qui lui semblait à vif, tressaillit tandis que ses cheveux humides et poisseux ondulaient à sa surface. Où était donc passée sa chemise ? Il se sentait nu...Soudain, une douleur fulgurante le traversa et son sternum lui hurla de ne plus bouger. Le jeune homme ramena aussitôt sa main dessus comme pour l'empêcher de se briser. Il sentit alors sa chemise sous son aisselle : finalement il l'avait sur les épaules, mais elle était grande ouverte...Son souffle peina. Il retrouvait la souffrance qu'il croyait avoir laissée chez la jeune miss Grey...Son plexus devait avoir reçu un coup exactement à l'endroit où il avait dû enlever une balle...
Lentement, Alexender passa son autre main dans ses cheveux pour les rejeter en arrière. Quelque chose de collant intrigua alors ses doigts à la surface de son crâne douloureux : du sang coagulé...Une bosse de belle taille...Oui, il se souvenait maintenant...
Il était bien revenu dans la réalité mais cette dernière avait pris la forme d'un de ses pires cauchemars. Il était pris.


- Romerta...

Son murmure rauque se perdit dans le noir contre un mur proche, trop proche. Après quelques tâtonnements, sa main s'appliqua à sa surface crasseuse. Alexender tenta ainsi de se lever une première fois en s'agrippant aux jointures imparfaites des pierres à sa portée, mais son poids lui parut démesuré. Il n'avait plus aucune force dans les bras ni dans les jambes. Son esprit était perdu. Ses yeux ne voyaient rien. Des odeurs fétides emplissaient ses narines et l'étourdissaient.
Il fit l'effort, ses ongles raclèrent la pierre. Inutile...Il retomba lourdement sur le sol.

Tout se bousculait dans sa tête : Sarah, ses domestiques, les prostituées, Stan, Katherine, ses armes, le Comte, le théâtre, les journaux, le Yard, Raphaël...Comment en étaient-ils arrivés là ? Que devaient-ils faire ? Ils avaient été pris ! C'était fini ! Il était maintenant seul, enfermé, dans l'ombre. Qu'étaient devenus les autres ? Tant de questions se bousculaient dans sa tête...
Mais ce qui lui prit le cœur et l'estomac en cet instant ce fut surtout la peur, cette terrible peur primaire qui lui avait déjà récemment retourné les tripes : celle du noir, celle de l'impuissance, celle d'avoir été piégé par une force contre laquelle il ne pouvait rien. C'était comme dans les égouts avec le Comte : il était aveugle et sans arme...Il était faible, bon pour la curée...Complètement nu face au danger...Et si le Vampire venait le voir ? Et s'il restait là enfermé jusqu'à ce qu'il crève de faim et de froid ? Le souvenir des égouts le crispa. Non...Il ne voulait pas mourir de cette façon ! Mais il ne voyait rien ! Où était-il ? L'obscurité était totale. Peut-être avait-il perdu la vue ?
Il voulut parler, demander où il était, si quelqu'un l'entendait, mais seul un gémissement pitoyable sortit de sa bouche. Ses émotions le submergèrent, la peur avait envahi tout son être.
Dos au mur, comme pour se protéger d'une éventuelle attaque, le Hunter se recroquevilla sur lui-même, à l'image d'un enfant enfermé dans un placard au milieu des araignées. Il était abandonné sur une rive spongieuse, à portée des ombres dévorantes...Il avait si froid...
Lentement, Alexender sombra dans l'inconscience.


***************

Ce fut un frisson sur ses paupières le sortit de sa nouvelle torpeur. Combien de temps était-il resté ainsi ? Il était toujours assis contre un mur. Dans son dos, trempé de l'humidité des pierres, sa chemise collait à sa peau. Sa nuque était douloureuse. Tandis qu'il la massait doucement, son regard d'ambre tentait de percer les ténèbres mais il ne distinguait toujours rien dans la pénombre. Le nez en l'air, il fronçait ses narines à chaque odeur qu'il rencontrait. De la moisissure, du bois, du fer, certainement des excréments, du feu, de la viande avariée...C'était ça la Tour de Londres ?

Alexender était désormais tout à fait réveillé. Il tentait de reprendre ses esprits et de réfléchir posément. Il avait été pris par le Scotland Yard chez Romerta et ses filles et, selon toute probabilité, il était désormais dans une cellule. Était-il dans une cave du Yard ou dans la Tour ? Peut-être que les Vampires l'avaient emmenés dans un mouroir improvisé pour mieux le torturer ? Il pouvait tout aussi bien avoir été enterré dans une crypte afin qu'il y crève de faim ou de froid...
Un nouveau frisson le parcourut au souvenir du piège que le Comte Kei et Angelstone lui avaient tendu dans les égouts. Non...il ne fallait plus qu'il pense à cela. Il devait sortir d'ici ! Sarah avait besoin de lui...Romerta et ses filles devaient être mises en sécurité ! Marguerite et Suzanne aussi ! Et où était passée Katherine ? Et Stan ? Pourquoi était-il seul ? Seul et sans lien... ?

Dans un effort considérable, il s'appuya sur le sol pour se relever. Sa main plongea aussitôt dans la flaque d'eau et manqua de le faire glisser une nouvelle fois. Dans un grognement rauque, il la secoua et l'essuya sur son pantalon qu'il trouva encore plus humide que sa chemise. Enfin, il se redressa et fut bientôt sur ses jambes. Tâtonnant, hésitant, il avança un peu en longeant le mur d'une main tandis que de l'autre il cherchait un contact dans le noir. Sa voix, tremblante, d'un timbre particulièrement assourdi, murmura quelques mots :


- Marguerite ? Suzanne ? Bon sang...

Il n'y avait rien dans cette pièce, rien ni personne. Lentement, il en fit le tour du bout des doigts, avançant comme un blessé de guerre à la recherche d'un être cher. A chaque angle, il resta un moment pour s'assurer qu'il n'y avait rien ni au mur ni au sol. Tout ce qu'il trouva dans la pièce ce furent un semblant de paillasse faite de foin et un drap, court et malodorant, qu'il s'empressa de jeter sur ses épaules avant de s'emmitoufler dedans. Il se sentait malade, nauséeux, glacé...
Puis, à force de longer les murs, il trouva une porte. Ses doigts en firent le tour, comme pour chercher un interstice où y glisser ses ongles afin de l'ouvrir par la force. Il la poussa, la tira, la frôla de ses joues : rien ne semblait la faire bouger. Il n'y avait pas de poignée de son côté, c'était logique : quel geôlier éprouvait le besoin de laisser la possibilité à son prisonnier de sortir tout seul ? La porte ne s'ouvrait que de l'extérieur...Elle était faite de bois bardé de fer. Le Hunter sentit l'odeur de la rouille et trouva deux charnières rongées par l'humidité. Rien à faire, il ne pouvait pas sortir. Il se pencha alors et, en bas de la porte, il découvrit un genre de chatière. Il s'agenouilla sur les pavés poisseux et tenta de regarder par cette ouverture. Il ne vit rien. Tout était sombre. Il devina tout de même un long couloir, une porte en face de la sienne...Il n'y avait aucune torche, aucun son...Où étaient donc les gardiens ? Il toussa alors et dans son geste pour mettre le poing devant sa bouche, il renversa et brisa ce qu'il comprit être une coupelle d'argile dans laquelle avait été abandonnée une soupe de pois. Le fracas fut épouvantable. Alexender se figea, touchant lentement les morceaux de l'écuelle brisée. De toute façon il n'aurait jamais mangé ça...Il espérait seulement que ce vacarme n'avait alerté personne. Il préférait encore être seul plutôt que d'attirer l'attention d'éventuels tarés prêts à le rouer de coups...

Se relevant, il continua son tour de cellule. Il n'y avait rien d'autre que des moisissures, des flaques d'eau ou d'autres substances qu'il devinait à leur odeur fétide...Son cœur battait la chamade. Cette situation le rendait fou. Comment allait-il pouvoir s'en sortir cette fois ? Kate ne viendrait pas le sauver...Personne ne le pourrait...
Soudain, un coup de vent souleva ses cheveux et sa main traversa le mur. Il sursauta en sentant au bout de ses doigts des barreaux glacés. Au toucher, il comprit qu'ils étaient au nombre de cinq et tous en fer. Approchant le nez de cette apparente fenêtre, un peu haute, il s'étira pour y jeter un coup d'oeil. Une petite brise léchait maintenant sa peau, chassant une partie des odeurs qui manquaient de l'étouffer depuis son réveil. Enfin une véritable ouverture ! Il respira un grand coup puis tenta de percer les ténèbres de son regard de feu.
Au début, il ne vit rien qu'un ensemble de teintes noires qui se mêlaient les unes aux autres. Il faisait nuit et les nuages couvraient le ciel en nappes épaisses. Mais bientôt, il aperçu une lueur au loin, puis deux, puis trois...Quelques lanternes en contre-bas, un morceau de la ville s'il tendait la tête...
Oui, il était bien dans une cellule de la Tour de Londres, la plus grosse prison du royaume d'Angleterre. Mais il était dans une des cellules les plus hautes et les plus inaccessibles, même pour l'oeil du curieux.
Une série d'étoiles apparut derrière quelques nuages déchiquetés. Le Hunter laissa son regard mélancolique apprécier leur faible lueur. Sa tête allait encore faire la une des journaux, si ce n'était pas déjà fait. Il ignorait depuis combien de temps il avait été jeté dans cette lugubre pièce. En vérité il n'y était que depuis quelques heures.
Le regard sombre, le Hunter serra ses mains autour des barreaux dans le même temps qu'il serra ses dents. Son nom était certainement sur toutes les bouches, dans les salons, dans les pubs et les ruelles...Sa mise à mort...déjà planifiée...
Il sourit.
Quelle ironie ! Lui qui pensait finir sa vie entre les crocs d'une de ses proies, au détour d'une ruelle sombre, oublié de tous l'espace d'un instant fatidique, avant d'être enterré dans une petite cérémonie digne de sa réputation d'aristocrate excentrique, allait en réalité remuer toute la société dans une grandiose exécution publique digne d'un grand criminel honni de tous.


- Pour la Reine...pff...Soupira-t-il avec ironie avant de s'éloigner de la fenêtre et de se rasseoir sur le sol.

La tête en arrière posée contre le mur, il s'abandonna aux larmes. Il était épuisé, désespéré, complètement fourbu de toutes ces épreuves. Depuis qu'il avait exercé sa vengeance à la Nouvelle Orléans et qu'il était revenu à Londres, il n'avait fait qu'aller de Charybde en Scylla. Après avoir tué son pire ennemi, celui qui avait assassiné sa mère et condamné toute sa famille à l'exil, ce Lilian Parker, il avait pensé qu'il allait pouvoir éliminer d'autres créatures sans y mêler ses proches. Mais finalement il avait finit par s'attacher à une jeune femme, Sarah Spencer, à se faire toujours plus d'ennemis et même à se confronter à l'un des plus vieux Vampires de ce siècle ! De plus, plutôt que d'agir dans l'ombre comme il l'avait toujours désiré, pour soulager l'Humanité de ces monstres tout en préservant son innocence présupposée, il se retrouvait à agir en pleine lumière, traqué, trahit par l'Humanité elle-même. Pourquoi ? Était-il donc maudit ?

Ses larmes coulèrent à flot. Il ne les retint pas. Non, la vie ne pouvait pas être aussi rose que les lèvres de Katherine...ni aussi bleue que les yeux de Sarah...
Prenant sa tête dans ses mains, il poussa un terrible gémissement de colère mêlée de honte, de rage et de peur. La plus poignante des tristesses venait de lui saisir le coeur. Mettre fin à ses jours était une option qu'il n'avait jamais envisagée, jamais. Et pourtant, dans cette cellule, il venait de perdre tout espoir...Ses ongles s’enfoncèrent dans sa peau près de ses tempes et il poussa un long hurlement. Incontrôlables, ses muscles se mirent à trembler de toute leur pitoyable force. Dans un état lamentable, Alexender se releva alors et se dirigea à tâtons jusqu'à la porte. De nouveau arrivé devant elle, il lui donna un grand coup de pied, puis un second. Sa couverture de fortune tomba de ses épaules. Il se mit alors à hurler de plus belle tout en malmenant cette barrière entre lui et la liberté:


- RAAAAAAAA !! STAN ! ROMERTA !! OUVREZ!!

Qu'importaient les geôliers, les tortionnaires, les Vampires... ! Il sortirait d'ici ou crèverait dans sa tentative ! Ils pouvaient bien venir le rosser de coups, il les frapperait lui aussi ! Un nouveau choc ébranla la porte qui grinça. La main du Hunter rencontra un morceau de fer et son sang jaillit. Alexender ragea de douleur et aplatit ses paumes contre le bois ferré :

- JIRÔMARU ! VIENS TE BATTRE !!  

Son souffle se perdit. Finalement, la mort n'était peut être pas une si mauvaise idée que cela. C'était la solution des lâches, mais qu'importe ? N'était-il pas impuissant ? Que pouvait-il faire de plus ? C'était fini. Il cracherait sur la foule venue à sa pendaison et crèverait comme un chien, affublé du sale nom de « traître », pour le plus grand bonheur d'un Vampire qui allait se marier avec sa dulcinée...

Ses larmes redoublèrent et il cessa de cogner sur la porte qui, de toute façon, le lui rendait que trop durement. Il s'affaissa au sol et gémit de toute son âme. Suzanne et Marguerite devaient avoir été prises elles aussi. L'image de Marguerite renversée sur la table basse et celle de Suzanne qui se jetait de tout son poids sur un agent du Yard pour lui permettre de fuir envahirent son esprit. Non...pas elles...Elles ne le méritaient pas...Tout était de sa faute !
Ses doigts trouvèrent la couverture. S'enveloppant dedans de façon misérable, Alexender se laissa tomber en position fœtale et, ainsi recroquevillé près de la porte, il enfuit sa tête dans ses genoux qu'il rassemblait de ses bras meurtris. La soupe de pois répandue sur le sol non loin de sa tête lui donna la nausée. Hoquetant, le Hunter finit par s'en éloigner en rampant avant de s'étaler sur le sol immonde de sa cellule.

Toutes ses forces l'abandonnaient. Il ne pouvait plus que pleurer et attendre sa cruelle sentence...
L'impuissance avait toujours été sa pire ennemie.


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MessageSujet: Re: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeJeu 13 Mar - 11:26

[HRP // En provenance directe de la Maison des Sorel « De curieuses nouvelles », à lire avant ce post pour comprendre convenablement le Rp //HRP]

Posée sur le rebord d'une cheminée se tenait une chouette au plumage blanc piqueté de tâches brunes et noires. Immobile, elle semblait observer de ses grands yeux jaunes la haute prison de Londres. Elle était presque invisible dans les ténèbres de la nuit avec sa robe claire, pourtant si voyante d'habitude dans ces contrées. Au dessus d'elle les nuages alourdis par la pluie dissimulaient les étoiles qui auraient pu éclairer la ville de leur douce et froide lumière, réconfortante malgré tout. Le vent soufflait sans discontinuer. Parfois des bourrasques agitaient les plumes du majestueux volatile, mais celui-ci ne semblait pas décidé à reprendre son envol. Il était là, pétrifié.
Dans son corps, trois esprits gardaient le silence. Gaspard avait besoin de cet instant de calme pour reprendre contenance. Œil de Lune et Galyllée respectaient cette accalmie, ils savaient tous deux ce que ressentait leur compagnon, puisque celui-ci avait cessé de maintenir les murailles qui d'habitude empêchaient ses pensées et ses sentiments de transparaître. Plus tôt dans la semaine il avait décidé de les abaisser, mais là, même s'il l'avait voulu, il était bien trop médusé pour se refermer à nouveau sur lui-même. Tous ses espoirs venaient d'être réduits à néant. Il se sentait soudain vide, sans but, sans intérêt.
Quelques jours auparavant, il avait appris par le biais des journaux que son ami, son seul ami, était recherché par le Scotland Yard et les Vampires. Ni une, ni deux, il avait décidé de le retrouver, pour le mettre à l'abri d'une part et comprendre ce qui c'était véritablement passé ce soir là où il était tombé en disgrâce. Car Alexender avait perdu son titre, son rang, son châtelet, sa fortune, il n'avait plus rien. Il lui restait certainement ses deux fidèles domestiques, maintenant prises elles aussi et sans qu'il ne s'en doute, il avait Gaspard, à la traîne, mais bel et bien là. Et il avait échoué dans son entreprise. Son ami s'était fait arrêter sous ses yeux, sans qu'il n'intervienne, sans qu'il puisse y faire quelque chose. Il n'avait rien pu changer à la donne, il s'était contenté de rester cet ultime spectateur. Comme quoi, malgré ses résolutions les habitudes demeuraient.

Le désespoir s'était emparé du bicentenaire. Son échec le tourmentait plus que de raison. Le simple fait de penser à l'avenir était en train de lui nouer l'estomac, déjà habité par le poids de ses échecs et du chagrin. Dans les jours qui allaient suivre, Alexender serait jugé de manière expéditive et il serait pendu. Il allait mourir. Lui qui se battait depuis des années pour l'humanité, allait se faire condamner par leur justice corrompue. C'était si ironique ! Si triste ! Rien de nouveau sous le soleil. Il ne serait pas le premier à périr dans la perdition alors qu'il ne le méritait pas. Touché de plein fouet par une situation millénaire, le Hunter ferait ses adieux au monde sans qu'aucun ne sache ce qu'il avait accompli pour eux. Il aurait pu rendre l'âme en face d'une créature surnaturelle, comme s'était si souvent le cas dans sa profession, mais il n'en aurait pas l'occasion. Disgrâce que ceci. Tel un guerrier nordique mort de manière naturelle, il n'atteindrait pas les glorieux vergers du paradis consacré aux farouches combattants. Il devrait se contenter d'une place en enfer.
Le Lycanthrope ne cessait de se faire des reproches. S'il était revenu plus tôt de Loth, sa maison de campagne, peut-être aurait-il pu changer le cours des choses. Il savait qu'il était vain de refaire le monde avec des si, mais si seulement il n'avait pas tant tardé ! Il aurait eu plus de temps pour s'adapter à cette situation critique, il aurait trouvé une solution.
Malmené par la puissance de ses sentiments, Gaspard ne savait plus où il en était. Son désarrois le saisissait à bras le corps. Il avait peine à se soutenir. Son corps était lourd. Il se sentait submergé par la tristesse et ne voyait pas comment y faire face, ni maintenant, ni dans les semaines ou les années à venir. Comment pourrait-il accepter la mort de son meilleur ami ? Il ne se sentait pas capable de vivre avec. C'est ce qu'il avait aussi ressenti lorsque, près de deux siècles plus tôt, il avait fait perdre l'esprit à l'un de ses frères, qui devint aussi loquace qu'un légume, un rappel constant d'une terrible erreur, un poids immuable sur sa conscience. Mais au fil des ans, il avait surmonté cette épreuve, grâce à sa famille et sa raison. Cependant, que lui resterait-il quand Alexender aurait rendu l'âme ? Il n'avait plus ni famille, ni ami, il était un homme seul qui avait abandonné lui même la société, qui s'en tenait à l'écart autant que faire se peut. Bien sur il aurait toujours André auprès de lui, mais son major d'homme n'avait rien d'un ami, c'était un compagnon de route. Et puis, s'il se débrouillait convenablement, il pourrait avoir Julia à ses côtés pour un temps, d'ailleurs s'il la demandait en mariage pendant dans ce climat tumultueux, leur union passerait presque inaperçue. Gaspard eut un rire sans joie. Alexender, en plus de les avoir poussés dans les bras l'un de l'autre, était en train de créer l'opportunité rêvée pour concrétiser leur amour. Quelle belle farce du destin !
Alexender... Toutes les pensées de Gaspard étaient focalisées sur lui depuis une bonne semaine, à cet instant plus que jamais. Il devait trouver un moyen de lui parler. Il devait lui prouver qu'il n'avait jamais été seul dans cette descente aux enfers, que même s'il n'en avait pas conscience, il y avait des hommes et des femmes qui œuvraient dans l'ombre pour sa survie. Lui-même en faisait partie. Il avait délaissé sa tranquillité sans hésiter pour lui consacrer du temps et des efforts, même si ceux-ci avaient étés vains, ils n'en restaient pas moins présents et représenteraient si cela se pouvait, un réconfort non négligeable pour un homme brisé, emprisonné, qui n'avait plus d'avenir. Il n'allait pas mourir en paix, mais il ne serait pas seul.
En outre, le bicentenaire voulait s'entretenir avec son ami, pour enfin avoir le fin mot de cette histoire. Bien sur, ce n'était pas une priorité, mais si seulement il pouvait comprendre les tenants et les aboutissants de ces événements farfelus, il saurait enfin pourquoi Alexender avait procédé de la sorte et pour quelles raisons il avait agit devant un public nombreux, alors que d'habitude il préférait nettement procéder dans l'anonymat et la subtilité, notamment pour qu'il n'y ait aucune perte civile.
Et plus encore, le Lycanthrope souhaitait revoir son ami, une dernière fois. Il voulait avoir cette chance de lui dire quelques mots. Qu'il était désolé d’abord, qu'il aurait tellement voulu que tout cela se passe autrement, qu'il aurait aimé qu'ils prennent plus de temps ensemble lorsqu'il avait fait son retour à Londres. Lui montrer sa propre détresse face à cette situation, que tout ceci le peinait, qu'il donnerait tout pour le faire sortir d'ici et le savoir enfin libre. La simple pensée de cette entrevue morbide donnait à Gaspard la nausée. En fait, il n'était pas certain d'avoir la force de parler si par chance il pouvait avoir ce face à face, il s'imaginait bien rester muet, incapable de dire un mot tant les émotions qui le traversaient étaient fortes. Ses yeux seraient humides, bouleversés, miroir de son âme déchirée. Seigneur ! Mais que diable s'était-il passé pour que tout se déroule aussi mal ?!
La douce chaleur réconfortante de ses entités était la seule chose qui permettait à Gaspard de ne pas se laisser abattre. Ils le soutenaient dans cette épreuve, papillonnaient dans son esprit en lui murmurant des mots de paix et d'amour. Ils lui conseillaient d'accepter cette situation, de la déplorer, de la pleurer. Ils étaient en train de le préparer à un terrible deuil. Avec tact, Galyllée lui parlait lentement, étalant sur son cœur blessé ses ailes de sagesse. D'une voix caressante, elle apaisait ses maux. Œil de Lune prenait aussi part à cette réunion de tristesse. Lui-même était abattu par l'emprisonnement de Alexender, qu'il avait toujours apprécié. Il se sentait proche de cet Humain, ce chasseur qui ne reculait devant rien pour combattre ses ennemis et les pousser hors de son territoire. Il aimait sa ténacité et son courage. Le savoir ainsi entravé dans une cage le révulsait. Quelques mois plus tôt, lorsqu'ils avaient combattus ensemble le Loup-Garou qui s'était introduit dans la propriété du Lycanthrope, le loup avait grandement apprécié la compagnie de Alexender et son savoir faire. Il n'avait pu le lui dire, mais il le pensait sincèrement. Lui qui ne s'attachait que rarement aux hommes, hurlerait à la lune le départ de cet humain.
Ce que Gaspard garderait pour lui, ce à quoi il ne semblait pas vouloir songer, c'était le vide qu'engendrerait la perte de cet être cher. Il savait qu'il ne pourrait s'empêcher de maudire son meilleur ami pour avoir agit au grand jour, risqué sa vie, celle d'innocentes personnes, mais aussi le secret qui planait sur l'existence des races humanoïdes mais non moins meurtrières qu'étaient les Vampires. Les rumeurs allaient bon train, si les Hunters ne faisaient pas attention, les Loups-Garous seraient vite découverts et les Lycanthropes finiraient par se sentir menacés eux aussi. Mais quelle idée de se compromettre de la sorte ?! Le secret était encore ce qui permettait au monde de tenir debout et de continuer son bonhomme de chemin, si les Humains venaient à se rendre compte en masse qu'il existait des créatures surnaturelles, qui sait ce qui pourrait se produire ? Une guerre ouverte, très certainement et une panique comme on n'en avait jamais vue. Le surnombre des hommes qui peuplaient la planète ne laisseraient sans doute aucune chance à la survie d'aucun d'entre eux. L'aristocrate se demandait à quoi Alexender avait pensé, pour quelles raisons il avait fait tout ce grabuge et avait tout risqué. Il ne le saurait qu'en s'entretenant avec lui, s'il le pouvait, sinon quoi il resterait dans le doute jusqu'à la fin des temps, rongé par la même occasion par une rancune tenace. Il détestait les risques inutiles, mais par dessus tout il ne supportait pas de s'être attaché à quelqu'un et que cette personne ne prenne pas sa survie au sérieux. Sa condition d'immortel l'obligeait à voir la mort emporter ses proches, qu'ils ne prennent pas la vie au sérieux le faisait enrager. Le Hunter avait une profession extrêmement dangereuse, mais il agissait d'habitude avec bon sens. C'était à n'y rien comprendre. Il devait trouver un moyen d'entrer en contact avec son ami.
L'aristocrate doutait que la prison accepte de le laisser le voir, même son statu ne changerait rien à ça. Il n'y avait qu'une seule manière de se retrouver face à face avec Alexender, il allait falloir ruser. Et pour l'instant il n'avait aucune idée précise de comment faire. Pour commencer il aurait besoin de découvrir dans quelle cellule était retenu le prisonnier. Il pouvait avec facilité aller lorgner à toutes les fenêtres à barreaux, mais cette solution ne serait guère discrète, mais indispensable. La nuit s'étirait et les premières lueurs de l'aurore ne tarderaient pas à poindre. Gaspard se rendit alors compte qu'il était resté bien longtemps inactif, perdu dans la mélasse de ses pensées. Il soupira d'exaspération. Il aurait pu utiliser ce temps précieux pour faire le tour des cellules dans le noir, il allait devoir s'activer. A vue d’œil il ne devait pas disposer de plus d'une heure dans les ténèbres. Et il n'avait aucune certitude de trouver son ami ainsi. Peut-être serait-il enfermé dans les sous-sols, c'était possible, bien qu'il espérait fermement que ça ne soit pas le cas. Il y avait sans nul doute des cachots là dessous. Rien que d'imaginer l'odeur vicié qui régnait dans ces lieux, il en avait la nausée. Les prisonniers qui possédaient une cellule avec des fenêtres pouvaient encore s'estimer heureux.

Décidé à retrouver Alexender coûte que coûte, la chouette harfang déploya ses grandes ailes et s'éleva dans les airs. Le vent fluctuant allait poser quelques problèmes, il empêcherait au volatile de pouvoir se stabiliser convenablement, mais c'était un détail surmontable. Pour plus de commodité, il débuta par le bas de la tour où les bourrasques étaient les moins puissantes. Galyllée commença alors à scruter la noirceur des cachots, elle y voyait clair, cependant dans certains elle ne distingua personne. Soit l'endroit était vide, soit le pauvre bougre qui s’abîmait là se trouvait dans un angle mort et ce n'était pas pour plaire à Gaspard. Il s'occuperait de ce fichu détail plus tard, avec de la chance Alex serait visible. Et puis, il n'avait pas le temps de s’appesantir sur le sujet.
Tandis qu'il effectuait sa ronde avec toute la discrétion dont il était capable, il entendit au loin une personne hurler. Il ne comprit pas la teneur de ses paroles et se dit que les prisonniers devaient détester ce genre de voisins de cellule hystériques même au plus profond de la nuit. Cela devait être insupportable de s'éveiller en sursaut et de retrouver le monde réel lorsqu'on était ainsi enfermé. Bien sur, la plupart des hommes sous les verrous de la Tour de Londres avaient mérités leur sort, Gaspard était loin de les plaindre, mais il constatait avec aversion dans quelles conditions déplorables ils devaient survivre. Il imaginait mal son ami terminer ses jours dans un tel endroit, cependant le destin en avait décidé autrement.
Le Lycantrhope entendit à nouveau le même prisonnier s'égosiller. Cette fois le vent porta mieux les sons, il entendit clairement cet homme nommer Jirômaru et le sommer de venir se battre. Gaspard tilta. Il ne devait pas y avoir deux hommes qui portaient ce prénom dans la capitale. Même s'il n'avait pas reconnu la voix, il ne pensait pas se tromper en supposant que c'était Alexender qui avait parlé. N'en croyant pas ses oreilles, le volatile s'éleva, cherchant frénétiquement son ami à travers les barreaux. Il était certain que ça venait du haut du bâtiment. Fort de cette information, il s'empêchait néanmoins de crier à son tour le nom de Alexender pour que celui-ci le guide grâce au son de sa voix. C'était bien trop risqué et ce n'était pas la peine de se compromettre aussi près du but. Cela faisait tellement longtemps que Gaspard espérait revoir le Hunter qu'il en tremblait d'excitation, son impatience était palpable. A cet instant il ne ressentait que la joie de savoir son ami toujours vivant et capable de pester sa rage au monde entier.

Enfin, le bicentenaire atteignit son but. Il devait avouer qu'il avait eut du mal à le reconnaître sur l'instant, mais malgré la couverture miteuse qui reposait sur ses épaules et sa chevelure dans un état pitoyable, il n'y avait aucun doute que ce fut Alexender. Partagé entre la peine de voir son ami ainsi réduit à reposer dans de telles conditions et la joie de le retrouver, Gaspard ne prononça pas un mot. Trop de sentiments le parcouraient. Avec douceur, et quelques difficultés, il se posa sur le rebord de l'ouverture. Galyllée était une chouette de grande taille, se tenir ainsi dans un si petit espace n'était pas très commode, mais faisable. Il observa encore un instant l'homme qui jonchait le sol. Il était dans un sale état. Il avait visiblement maigri d'après ses souvenirs. Ses cheveux étaient bien plus courts, ils ne devaient pas dépasser de beaucoup les épaules. Le Lycanthrope ne parvenait pas à distinguer son visage, mais il fut rassuré de voir sa carcasse respirer.
Gaspard prit une inspiration. Il murmura tout juste assez fort pour qu'on l'entende :


- Alexender. Il déglutit. Il avait la voix rauque, chargée d'émotions. Alexender bon Dieu, réveille toi !

Tellement troublé par les événements, l'aristocrate avait envie d'éclater de rire. Il était en train de perdre ses moyens. Il savait que le bonheur qu'il ressentait à cet instant ne serait que de courte durée, qu'il n'y avait vraiment rien à fêter, mais la pression qui nouait ses épaules jusqu'à cet instant était entrain de lâcher. S'il avait pu, il serait passé entre les barreaux pour aller donner une accolade amicale au Hunter. Ne pouvant accomplir ce geste il dit seulement :

- Je suis content de te revoir, mon vieil ami.


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Alexender Von Ravellow
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MessageSujet: Re: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeVen 14 Mar - 10:26

Hurler ne servait à rien, pleurer non plus et Alexender le savait bien...Mais comment pouvait-il soulager cette horrible peine et cette terrible colère qui lui rongeaient l'âme ? Comment ne pas se laisser aller au désespoir alors qu'il ne songeait plus qu'à l'échafaud qui l'attendait ? A ce comte qui allait épouser sa tendre et chère amie, à ses domestiques prises elles aussi, à son châtelet perdu, à son titre arraché, à sa misérable destinée... ?
Lui qui avait toujours combattu au nom de la justice, sa justice, celle qui avait pour premier impératif de protéger l'humanité, tout homme, toute femme, tout enfant qu'il pourrait sauver, les siens...Lui qui avait préféré laisser de côté sa propre vie pour la consacrer à celle des autres, à sa vengeance, à cette mission qu'il s'était fixée depuis la mort de sa mère...
Devrait-il toujours souffrir ? Était-ce donc là son fardeau ? La lutte, l'échec, le désespoir, la mort...
Quelle humiliation !

Il n'avait jamais été assez fort. Face aux créatures de la nuit, que pouvait-il espérer ? Les Loups-Garous vous arrachaient un bras d'un coup de gueule ou vous éborgnaient d'une griffe, les Vampires vous suçaient le sang jusqu'à la moelle des os ou vous manipulaient sur des siècles jusqu'à récupérer votre tête sur un plateau, les Lycanthropes pouvaient se changer en animaux...tous avaient une longévité décuplée, un physique extraordinaire, des pouvoirs étranges...
Et lui, qu'avait-il ? Rien.
Rien hormis sa carcasse douloureuse, quelques pistolets, trois paires de couteaux...
Rien.

Il était nu dans les ténèbres.
Seul dans la nuit.
Abandonné.

Le Sort avait décidé d'en faire le triste pantin de sa tragédie. C'était fini.

Ses larmes creusèrent de nouveaux sillons sur ses joues amincies. Il souffrait des côtes droites et du plexus. Son souffle, court et rauque, lui coûtait cruellement à chaque respiration. Les agents du Yard avaient dû le frapper plus fort que ce dont il se souvenait. Pourtant, ils s’étaient jetés sur lui pour l'assommer avec une matraque ou autre chose puis ils lui avaient mis un sac sur la tête...Il ne se souvenait pas d'avoir été rossé...Ses ongles saignaient à cause de ses tâtonnements et sa tête semblait prête à exploser.


- Suzanne...Marguerite....Je suis désolé...

Gémissant, le Hunter resserra encore la couverture miteuse sur ses épaules meurtries. Il avait honte, terriblement honte. Mettre en danger ce qu'il lui restait d'êtres chers, ça...c'était réellement misérable. Lui qui avait recommencé à avoir foi en sa mission, lui qui avait réussit à rassembler des Hunters tels que Stan ou Katherine...
Il était maintenant à la merci des Vampires et des imbéciles de la Cours. Vu comme un traître à la couronne, comme un vulgaire criminel, comme un stupide petit Humain auquel l'on avait tout pris !
Autant crever !

Rien ne servait de faire le point. Tout ce qu'il avait récemment vécu se résumait en deux mots : souffrance et échec. Même son amour pour Sarah n'était qu'un fiasco. Il ne cessait de penser à elle mais il doutait que la jeune femme continuait de penser à lui. Tout avait été si soudain ! Le bal, l'incendie, leur romance dans son atelier...et puis le Comte avait abîmé l'esprit de la jeune femme et elle l'avait presque chassé de chez elle...Mais surtout, lui, il lui avait tiré dessus chez Raphaël...Comment se le pardonner ? Leur dispute, cette détresse, cette pluie...Finalement, si le Comte n'avait pas été un Vampire, il l'aurait laissée partir dans ses bras...Elle aurait certainement été plus heureuse qu'avec un allumé de son genre...
Alexender serra les poings et les dents.
Non...Il ne pouvait pas penser à cela comme ça...Il se l'interdisait ! C'était cette geôle, ces murs humides, cette obscurité...

Retrouvant un soupçon de force, le Hunter leva la main pour toucher la porte. Comment sortir ? Il n'avait aucune chance ! Même lorsqu'il serait transféré pour être conduit à l'échafaud, à moins qu'il n'y aie procès, (ce dont il doutait fortement), les chances qu'il ne s'échappe étaient plus qu'infimes.
Se retournant sur le dos, le Hunter fouilla ses poches de pantalon dans un geste lent et mesuré. Il avait mal partout et une intense fatigue courrait chacun de ses membres.
Rien. Il n'avait rien dans ses poches...
Il se plia et glissa une main dans sa botte droite où il gardait parfois un petit couteau.
Rien non plus.

Abandonnant tout espoir, il se recroquevilla pour pleurer à nouveau. Il était impuissant et cela le débecta plus que jamais. Alexender Von Ravellow n'était plus rien, il n'avait plus sa place ni dans la société, ni dans l'ombre...
Il était perdu.
Il serait oublié.
C'était peut-être mieux ainsi...

Un bruissement près des barreaux.
Le vent pouvait bien souffler...S'il l'avait pu, il se serait jeté par cette fenêtre.

Romerta était peut être déjà morte. Pourquoi n'avait-il pas quitté Londres ? Il aurait pu tout abandonner et retourner à la Nouvelle Orléans...Non, il n'avait plus d'argent, plus de bien, comment aurait-il pu voyager ? Mais quitter Londres aurait permis d'éviter que ses domestiques ne soient prises. Et Stan, et Katherine...Quel malheur avait-il apporté à Romerta et ses filles ! Où iraient-elles maintenant ? Le Yard ferait certainement le ménage après cette descente. Elles s'étaient toutes opposées à ses agents pour les protéger...

Un autre bruissement.

Et puis quoi ? Il aurait abandonné Sarah pour refaire sa vie ailleurs, sans se préoccuper de cet enfoiré de Vampire ? Non...Il avait fait ce qu'il avait pu et il avait échoué...Fin de l'histoire.

Il ferma les yeux, résigné.

Une voix.
C'était son imagination...

Le Hunter se tint la tête dans les mains. Pourquoi devait-il subir autant de terribles histoires ? Qu'avait-il fait au Bon Dieu pour mériter un pareil sort ? C'était inouïe ! Après tout, une fois qu'il serait sur l'échafaud, qu'est-ce qui l'empêcherait d'hurler à la face du monde la machination dont il avait été victime ? « Jirômaru Keisuke est un Vampire ! » Ha ! Il serait mort au milieu des rires, pris pour un dément.

Son nom résonna dans la cellule.
Il devenait complètement fou !

Mais, alors qu'il s'arrachait presque les cheveux, son instinct lui dicta de vérifier ce qu'il venait d'entendre. Lentement, il se leva et se dirigea vers le trou du mur. Revoir les étoiles...oui. Cela le calmerait sûrement. Il allait perdre la raison sans cela. Au moins quitterait-il ce monde en ayant la conviction d'avoir lutté...

Arrivé devant la fenêtre, il s'arrêta, perplexe, presque apeuré : quelque chose se tenait dans l'encadrement, il distinguait maintenant sa forme pâle se découper sur un ciel noir teinté de gris. Une voix claire l'accueillit. Manquant de tomber à la renverse, Alexender se rattrapa aux barreaux dans un élan mêlé de joie et de surprise.


- Ce...C'est toi ? Gaspard?

C'était une chouette immense qui se tenait-là. Alexender l'aurait reconnue entre toutes. Même s'il avait rarement vu son ami se transformer, il se souvenait de cette forme particulièrement imposante et magnifique. La chouette Harfang au plumage blanc lui apparut comme un Ange tombé du ciel. Ses yeux se remplirent de larmes et il passa fébrilement une main à travers les barreaux pour toucher son ami dans un geste désespéré.

- Ho mon ami...Tu es revenu de Loth... ?

Revoir Gaspard lui fit l'effet d'une double vague. La joie de le revoir était forte, le bonheur l'envahit, mais la tristesse resurgit aussitôt dans un âpre relent. Il avait déjà entraîné trop de monde dans sa chute. Le Lycanthrope ne devait plus être mêlé à ses intrigues, il avait Julia, sa fortune, son confort...

- Non...pas toi...Vas t-en...Tu ne peux pas m'aider...Gaspard...Ne...ne t'occupe plus de moi...Dis à Sarah que...Dis lui que je...Non ne dis rien...

Alexender eut un rictus. Il était si content de revoir son ami, même sous cette étrange forme, que les mots lui manquaient pour l'exprimer. Mais il avait aussi très peur pour lui et ses sentiments contradictoires manquaient de le rendre fou. Il bégayait, tremblant comme un malade, il pleurait tout en riant:

- Quel imbécile ! Je croyais que les Lycans étaient plus intelligents que ça...J'ai rencontré une panthère au fait...Charmante vraiment...tu verrais...mais...mais tu sais...Julia serait jalouse...

Son sourire fut douloureux.
Ses doigts entrèrent en contact avec une plume à travers les barreaux. Oui, il était réellement là, ce n'était pas un rêve...


- Je...je ne tiens plus sur mes jambes mon ami...et tu ne peux les remplacer.

Il grimaça. Ses mains se serrèrent autour des barreaux.


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Dernière édition par Alexender Von Ravellow le Dim 23 Mar - 0:17, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeMar 18 Mar - 13:53

Bien que soulagé de voir le corps de son ami bouger dans la pénombre, il n'en restait pas moins inquiet. Lorsqu'il avait vu Alexender sortir de la maison close, il ne l'avait pas fait par ses propres moyens, c'étaient les membres des forces du Scotland Yard qui l'avaient traînés au-dehors. Il était resté inconscient durant toute la manœuvre et Gaspard ne l'avait pas entendu s'exprimer pendant qu'on le menait en fiacre à la Tour de Londres. Soit il était resté inconscient jusqu'à ce qu'il soit mené en cellule, soit il avait été bâillonné. Les deux peut-être. Dans un cas comme dans l'autre, il avait dû recevoir un choc redoutable pour perdre ainsi connaissance pendant des heures. Ce n'était pas rassurant. Au moins, il est en vie, se dit le Lycanthrope.
A son premier appel, Alexender ne sembla pas réagir immédiatement. Est-ce qu'il dormait à nouveau ? Enfin il eut un mouvement, il se prit la tête dans les mains, mais continua à ignorer son interlocuteur. Pour le faire émerger de sa torpeur, Gaspard le nomma à nouveau en lui sommant de se réveiller maintenant. Ils devaient faire vite, avant le lever du soleil, s'ils voulaient avoir l'occasion de parler tranquillement. Mais à quoi bon, ce demanda le bicentenaire, pourquoi parler en sachant que son ami allait mourir dans les jours suivants ? Il repoussa loin ces sombres pensées et se focalisa sur l'instant présent. Il avait atteint son but. Du moins une partie. Pour le moment le Hunter était sauf, il était face à lui, même amoindrit, il l'avait retrouvé.
Le prisonnier se dirigea lentement vers lui, d'un pas incertain. Bon Dieu il était bel et bien vivant, capable de bouger. Il venait même de s'arrêter en le discernant dans l'ouverture. Joie ! Que Gaspard exprima à haute voix en accueillant son ami. Celui-ci dû être surprit puisqu'il eut comme un sursaut, il tendit la main vers les barreaux qu'il attrapa comme pour ne pas perdre son équilibre précaire. Cependant le bicentenaire avait beau se sentir libéré d'un poids, son inquiétude revint au triple galop en observant le visage d'Alexender. Proche comme ils l'étaient maintenant, la chouette distinguait nettement le sang qui maculait son visage sale et qui avait coagulé. Elle vit aussi les sillons plus clairs que les larmes avaient creusé sur ses joues noircies. Ses yeux étaient rougis, caves. Gaspard cru y déceler une forme de désespoir et de résignation qui lui alourdit les entrailles. Il était au fond du trou. Mais plus pour longtemps.
Pour la première fois, Alexender lui parla. Il semblait ne pas croire à sa chance. Il tendit la main entre les barreaux pour toucher le volatile, comme s'il voulait s'assurer qu'il n'était pas une illusion, mais bien la forme animale de Gaspard. Ses yeux étaient brillants de larmes. Le Lycanthrope lui même avait bien du mal à contenir ses émotions.


- Oui... Oui c'est bien moi, balbutia-il enroué.

Il n'avait pas imaginé à quel point il serait heureux de retrouver le Hunter en vie. Même emprisonné. Il pouvait encore changer les choses. Il le devait. Oh ! Il en avait presque du mal à respirer convenablement. Ses entités assistaient à un déferlement d'émotions, certaines contradictoires. Ils pouvaient déceler le bonheur, le soulagement ou l'amour, la peur aussi, mais malgré ça, il persistait des sentiments moins nobles et inavoués : la colère contenue, le ressentiment, une forme de dégoût ; pas directement tournée vers l'humain, mais en partie.


- Oui, commenta le Lycanthrope d'une voix mal assurée, hésitante, teintée par les remords, je revenu pour apprendre que tu étais devenu un fugitif. Je t'ai cherché partout, il s'en est fallu de peu pour que je te retrouve avant eux, il poussa un soupir qui ressemblait à un grognement mécontent. Je voulais t'aider à prendre la fuite, te mettre en sécurité. Mais... La chouette agita la tête de droite à gauche, s'affaissant sur elle même. J'ai échoué. Je regrette, mon ami.

S'il savait à quel point il pouvait regretter... Son sentiment de félicité s'était amenuisé jusqu'à disparaître complètement au fil des mots prononcés à voix haute. A nouveau, il était abattu et dans l'impasse. Incapable. Faible. Anxieux. Son incapacité à prendre les bonnes décisions les avait tous deux menés là, à cet instant précis, à échanger quelques mots à travers des barreaux de fer, des retrouvailles de courte durée, entachées par l'amertume des jours à venir. S'il avait été plus radical, il aurait pu permettre la fuite du Hunter, cependant il n'avait pas voulu abandonner son amour naissant, ni sa place dans l'aristocratie, encore moins son confort et cette certitude qu'il avait de pouvoir dormir dans un lit de plumes chaque nuits. Au pied du mur, en repensant à tout ceci, il était en train de comprendre que la vie ne valait véritablement pas la peine d'être vécue s'il n'avait plus personne avec qui la partager, même de manière sporadique. Il était un être social. Il avait agit comme un loup solitaire pendant trop d'années et il en payait le prix. On menaçait de lui arracher son seul ami. Le seul membre de sa meute. Il ne pouvait tolérer pareille perte. Une femelle venait malgré tout contrebalancer ses décisions, remettant en question sa loyauté. Mais que représentait-elle de plus que les autres femmes qui avaient partagé sa vie ? C'était un nouveau moyen d'assurer sa lignée, de perpétuer le gène lycanthropique qui était dans son sang. Elle était bien plus que ça, néanmoins Alexender faisait partie intégrante de son clan depuis des années, alors que Julia n'y avait pas encore de place déterminée. Il y avait trop de variables autour de cette union. Il sentait qu'il se devait de faire perdurer ce qu'il avait déjà acquis. S'il n'était pas capable de protéger un membre de sa meute, il n'avait pas le droit d'espérer la faire grandir à nouveau. Les risques d'échecs seraient trop grands.
Quelques jours plus tôt, il avait mesuré le poids de ce choix qu'il aurait à faire, cela lui avait donné le tournis, il avait pris une décision avec retenue, toutefois il était grand temps de laisser l'hésitation derrière lui. Son ami avait plus d'importance qu'un sentiment aussi incertain et fluctuant que l'amour. Gaspard s'excusait silencieusement pour cette trahison. La jeune et jolie Julia Thanas ne méritait pas pareil traitement, mais cette situation dépassait l'entendement. A cet instant, Alexender était en danger mortel, il n'y avait plus d'hésitation à avoir. Il devait le sortir de ce pétrin et tous les moyens étaient bons.
Déterminé à faire s'évader le Hunter de sa prison, le Lycanthrope n'en fut pas moins blessé de l'entendre lui dire de s'en aller, qu'il n'était pas capable de l'aider, qu'il n'avait qu'à le laisser là. S'il ne s'était pas fermement résolu à le faire sortir d'ici, Gaspard aurait eut un instant de doute et peut-être que là, son ami aurait pu lui faire changer d'avis, le pousser à reprendre le cours de sa vie comme si de rien n'était.


- Tu divagues, je ne suis pas arrivé jusqu'ici pour te laisser croupir dans ces geôles immondes. Si tu dois dire quelque chose à Sarah, tu le lui diras de vive voix lorsque je t'aurai sorti de là.

Et en effet, Alexender était au bord de la crise de nerfs. Il était tout tremblant, des larmes coulaient à nouveau sur son visage ravagé alors qu'il continuait de parler étranglé par des rires. Gaspard savait que son ami n'était plus tout à fait lui-même, c'est pourquoi il ne prit pas ombrage de ses insultes, celles-ci lui arrachèrent même un sourire impossible à voir sous sa forme de chouette. La surprise cependant se lu facilement dans les grand yeux jaunes de Galyllée lorsqu'elle comprit soudain que le Hunter avait croisé un autre Lycanthrope dans les rues de Londres. Comment était-ce possible ? Non pas qu'il pense être le seul de sa race dans la capitale, mais il trouvait cela très intriguant que l'un d'entre eux dévoile si rapidement son don à Alexender. Cela devait être très récent, sinon quoi son ami ne lui en aurait pas parlé si soudainement, alors qu'il était plongé dans une sensible démence. Cet homme devait avoir l'art de faire parler les Lycans. Et de les énerver aussi. Sans le sentir venir, la harfang gonfla les plumes lorsqu'elle entendit prononcer le prénom de Julia. Mais cet infime instant de colère passa la seconde suivante. Dès maintenant, il allait devoir se faire une raison, accepter de faire passer son amitié avant tout. Il était cependant assez dur d'entendre le nom de sa douce formulé par celui-là même pour qui il l'abandonnait.

- L'imbécile n'est pas enfermé lui, marmonna Gaspard d'une voix rauque, en passant sous silence la suite des paroles de son ami, tandis qu'il observait d'un œil attentif toucher son plumage à travers les barreaux.

Galyllée n'était pas très friande de ce genre de contact. La chouette frémit, mais se retint de faire tout commentaire. Le Lycanthrope remercia intérieurement son entité pour sa compréhension. Elle ne répondit rien, conservant sagement pour elle la répulsion qu'elle avait ressentie, s’apercevant que cet infime contact avait eut un effet particulier sur l'humain. Comme si son geste était la confirmation qu'il n'était pas en train de rêver dans son terrible cauchemar. Qu'il avait encore un espoir d'échapper à cette tragédie, bien que cette éventualité n'avait peut-être pas encore franchement atteint son esprit tourmenté. Ce fut certainement chose faite lorsqu'il reprit la parole, avouant lamentablement qu'il n'était plus capable de marcher. C'était problématique, mais ils ne devaient pas s'arrêter à ces détails.


- On trouvera un moyen. C'était un vœu dissimulé en une affirmation décidée.

Le réel problème était de parvenir à faire sortir Alexender d'ici avant que le jour ne se lève et de le mettre en sécurité. Gaspard allait devoir agir rapidement et seul. André ne pourrait pas venir avec le fiacre dans les temps pour leur permettre de s'évader. D'une part, cela l'impliquerait inutilement dans ce plan irréfléchi, d'autre part il ne pouvait pas réduire à néant leur couverture tant qu'il y avait d'autres solutions. Si par chance ils prenaient la poudre d'escampette, le major d'homme leur serait utile en temps et en heure. Qu'il reste au fond de son lit pour l'instant, c'était pour le mieux. Le bicentenaire s'accorda un temps de réflexion silencieuse, tandis que ses yeux scrutaient ce qui l'entourait. Il était inutile d'espérer pouvoir faire le chemin inverse qui avait amené le Hunter ici. Il y aurait des gardes à chaque tournants. Non, le bicentenaire ne voyait qu'une sortie possible pour son ami, mais compte tenu de son absence de capacité surnaturelle, cela présenterait quelques difficultés. C'était leur seule chance pourtant.
Chaque minute était comptée, précieuse, il n'avait pas le temps d'expliquer en détails la manière dont il allait agir. S'il développait, il avait peur de trouver des failles dans son raisonnement et d'hésiter.


- Alex, tu vas reculer. Tu vas t'éloigner de ce pan de mur, tout de suite. Je vais le transmuter, je ne vois que ça pour t'échapper. En attendant, assied-toi, préserve tes forces, tu vas en avoir besoin.

Le Lycanthrope avait parlé à toute allure, du bout des lèvres, l'esprit déjà ailleurs à des décennies de là. Il parcourait le temple de sa mémoire, où tout était classé, répertorié, archivé. Il usait d'anciennes méthodes de mnémotechnique qu'il avait apprises dans son adolescence. Le souvenir de sa mère refit surface, il la recouvrit de son linceul avec douceur, puis la repoussa dans la partie de sa mémoire qui lui était consacrée. C'était elle qui lui avait enseigné comment pratiquer cette technique, elle l'avait apprise à chacun de ses enfants, dans le cas où leur gène de lycanthrope renfermerait le pouvoir de longévité, arguant qu'il fallait savoir organiser ses idées pour affronter l'écoulement du temps et parvenir à se souvenir des choses que l'on pensait utiles, tandis qu'ils pouvaient laisser s'effacer le reste.
Sans plus attendre, Gaspard se replongea dans l'alchimie. Il se remémora l'essentiel, puis revint à l'instant présent. Alexender n'était plus devant les barreaux. Il allait pouvoir commencer.


- J'espère que j'ai de bons restes, sinon je ne donne pas cher de ma peau. Et surtout ne t'approche pas, quoi qu'il arrive. Après un instant il marmonna : Pourvu que les barreaux soient solides.

En effet, ses craintes étaient fondées, à la moindre erreur, il risquait une chute mortelle du haut de la Tour. Il sentait son sang bouillir dans ses veines. Le son des tam-tams, qu'il était le seul à entendre, résonnait à nouveau dans ses oreilles, bourdonnait continuellement, sans qu'il parvienne à le calmer. Il devait se concentrer, mais la pression qu'il ressentait l'empêchait de le faire parfaitement. Bon, il allait devoir agir vite. C'était maintenant où jamais.
Gaspard respira un grand coup, se coordonnant avec ses entités pour parvenir à une unité parfaite.
Soudain, la grande chouette commença à se déformer. Le processus se réalisa très rapidement, son corps laissa place à une mutation humaine bien plus grande, qui s'effaça ensuite pour prendre la forme définitive de l'aristocrate, à quelques différences près que celui-ci possédait de longues griffes noircies au bout de ses doigts.
Essoufflé, Gaspard laissa s'échapper un râle entre ses dents serrées. Il était parvenu à reprendre forme humaine et à se rattraper in extremis aux barreaux, ses mains s'étaient refermées sur eux au dernier moment, tandis que ses jambes ballantes avaient pendant un instant mouliné dans le vide, recherché un point d'appui sur le mur, puis son pied gauche avait trouvé un micro interstice pour soutenir une grande partie du poids de son corps, à son grand soulagement. Au prix d'un nouvel effort, il se hissa et reposa ses coudes sur le rebord de l'ouverture, sa respiration était erratique, de la sueur perlait dors et déjà sur son front. Après un instant, il trouva une nouvelle fissure entre les pierres et y inséra son pied, priant pour que rien ne cède. Il inspira de l'air à quelques reprises, puis il lâcha le barreau qu'il tenait de la main droite et passa l'avant bras entre eux. A l'aide de la griffe de son index, il marqua la pierre d'un cercle, il s'assura que le sillon qu'il avait creusé était fermé convenablement. Toute son attention était focalisée sur cette tâche. Il ne devait pas faire d'erreur. Ensuite, il passa le bout de ses doigts sur son dessin et entrepris de tracer à l'intérieur un triangle. Il sentait ses muscles commencer à lui faire mal à force de se tenir dans cette position très inconfortable. De son bras gauche il sentait naître un engourdissement qui n'annonçait rien de bon, s'il ne sentait plus son bras, il risquait de lâcher le barreau, sa ligne de vie. Il raffermit sa prise et palpa la pierre froide où il avait tracé son dessin. Il ne lui restait plus qu'à graver un ligne. Une seule. Gaspard retint son souffle quelques instants. C'était fait. Il ne restait plus qu'à accomplir la partie la plus ardue du processus : joindre ses deux paumes puis les déposer sur le cercle de transmutation. La sueur lui brûlait les yeux. Il battit des paupières pour en chasser les picotements. Mais le soulagement n'était que de courte durée. Il poussa un grognement de douleur et d'énervement mêlé. Il ne parviendrait pas à tenir très longtemps à ce rythme. Il devait en finir maintenant.
Gaspard leva enfin les yeux vers son ami. Dans le noir il ne le voyait qu'à peine, puisque maintenant il avait retrouvé sa vision humaine. Le distinguer renouvela ses forces, juste assez pour accomplir sa tâche. Il aurait voulu dire quelque chose, mais rien ne lui vint et puis il n'était même pas sur de pouvoir parler. Déterminé, il agit rapidement. Il trouva un équilibre précaire, usant de toutes les parties de son corps en contact avec le mur de la prison pour lui permettre de tenir, il lâcha le barreau et joignit les mains avant de les aplatir rapidement sur la pierre.
En un instant, le mur se disloqua sous lui. Il ressentit un terrible moment de panique en sentant qu'il n'avait nul part où se raccrocher. Il eut l'impression de rester en suspension dans les airs le temps d'un instant. Puis il tomba, rappelé par la pesanteur. Sous lui, la transmutation était en train d'opérer, mais elle n'était pas arrivée à son terme. Il avait voulu créer une sorte de balconnet qui aurait pu le rattraper dans sa chute, mais ce n'était pas assez rapide. Ses jambes se trouvaient déjà au dessous de l'excroissance de pierre lorsque celle-ci l'atteignit dans le bas ventre, continuant sa progression sur encore un bon mètre. Dans un mouvement instinctif, il tendit les bras devant lui, il enfonça ses griffes dans la pierre inégale, y creusant un sillon tandis qu'il glissait, puis il se stabilisa. La pierre lui mordait les aisselles, seuls ses bras et sa tête étaient encore visibles. Ses yeux d'ambre exprimaient une panique totale. Son esprit était focalisé sur ses mains, seul moyen de ne pas chuter. Son bras gauche était encore à demi-endormi, mais l'adrénaline qui coulait dans ses veines le faisait tenir bon. Dans le vide, il tentait de balancer se jambes pour se donner une impulsion et remonter, mais il n'y parvenait pas.
Gaspard ne devrait son salut qu'à l'intervention rapide d'Alexender, à moins que par chance il parvienne à se concentrer assez rapidement, assez fortement, pour se métamorphoser à nouveau et prendre son envol avant que son corps ne touche le sol. Le souffle lui manquait. Des scénarios tourbillonnaient dans son esprit, ne l'aidant pas à garder la tête froide. Et le vent qui soufflait n'était décidément pas un allier.
Plus bas, il entendit l'un des barreaux s'écraser sur le sol dans un bruit étouffé.


Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Gaspar10
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Alexender Von Ravellow
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MessageSujet: Re: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeDim 23 Mar - 2:08

La nuit n'allait pas tarder à s'achever. Pourtant, l'ombre demeurait, lourde et pesante, sur la capitale londonienne. Seule la pâleur de quelques étoiles qui souriaient derrière la vaste masse de nuages noir d'encre pouvait indiquer au noctambule l'heure qu'il était. Le coq n'avait pas encore chanté mais, déjà, il s'agitait dans son sommeil volatile. Ses maîtres remuaient eux aussi dans leurs lits. Bientôt, la brume qui s'élevait des pavés trempés serait moins dense et la ville s'éveillerait toute entière, comme une fourmilière au garde à vous pour sa reine.
Pendant que les créatures de la nuit cherchaient refuge dans les plus infâmes recoins du monde et que les humains revenaient tranquillement de leurs plus beaux rêves ou de leurs pires cauchemars, Alexender Von Ravellow vivait d'étranges retrouvailles dans la Tour de Londres.


De longues plumes blanches
Deux grands yeux fauves
Un bec aiguisé


Persuadé que son esprit lui jouait des tours et qu'il était en train de perdre définitivement la raison, à cause de cette humidité, de ces blessures, de cette nuit sans fin, le Hunter avait tendu une main fébrile vers cet être de blancheur, cet Ange qui était venu se poser sur le rebord de la fenêtre...

D'où pourrait bien venir une chouette de cette taille et de cet éclat neigeux ? A Londres, à moins qu'un zoo n'aie eu la bien mauvaise idée de laisser ses cages ouvertes, un tel oiseau était inimaginable. Gaspard...Ce ne pouvait être que lui !

Ses sens étaient brisés. Il ne sentait que des immondices depuis quelques heures, des excréments, une soupe ignoble, des moisissures, des excréments...son odorat était par conséquent complètement saturé. Ses yeux étaient aveugles, perdus dans une obscurité terrifiante. Son corps tout entier palpitait de douleur...Et cette voix qui s'élevait maintenant et qui l'appelait...Comment pouvait-il croire son ouïe ?

A travers les barreaux glacés de sa prison, ses doigts touchèrent alors le plumage immaculé de l'animal. Ce contact, aussi subtil fut-il, lui procura un soulagement incroyable. Non, il ne rêvait pas : Gaspard était bien là.


- Oui...Oui c'est bien toi...

C'était une lueur dans les ténèbres, une voix dans le silence, une chaleur dans un océan de glace...
Ses émotions se superposèrent toutes les unes sur les autres, tout se mélangea dans sa tête. Tout d'abord, ce fut la joie qu’il ressentit, celle d'avoir retrouvé son ami, une joie incroyable, indicible, presque sourde, qui réchauffa son cœur et le fit timidement sourire. Puis ce fut la peur qui l'assaillit, la crainte pour son ami venu braver le danger afin de lui parler. Enfin, la colère le frappa, la honte aussi, la terrible humiliation...
Pourquoi Gaspard avait-il pris tout ces risques ? Pourquoi avait-il fallu qu'il cherche à s'impliquer dans ses sordides affaires alors qu'il avait tout fait pour l'en tenir à l'écart ? Lui qui avait déjà vécu bien des aventures, lui qui était rongé par l'immortalité et la solitude depuis qu'il l'avait rencontré et qui avait enfin trouvé l'amour, lui qui était censé être loin d'ici, à Loth, dans sa résidence de campagne...Non ! Pourquoi devait-il se salir les plumes? Trop de mal avait déjà été fait autour de lui...Sarah, Marguerite, Suzanne, Eulalia, Stan, Katherine, Romerta et ses filles...Non, Gaspard ne pouvait pas lui aussi subir les tourments qui tempêtaient avec sa personne. Il ne le permettrait pas !

Ses larmes de bonheur se mêlèrent ainsi au plus cruel désespoir. De toute façon, que pouvait donc faire le Lycanthrope pour l'aider ? Rien. Il était certainement venu uniquement pour discuter avant son exécution...Quelle sournoise chance qui les avait fait se retrouver avant la plus terrible des séparations ! Devaient-ils s’infliger semblable souffrance ? C'était bien inutile...
Il fallait qu'il le repousse pour mieux partir, disparaître et le protéger, mais ses forces l'abandonnaient et, cracher sur cette magnifique Lumière alors qu'il était en proie à l'Obscurité la plus perverse ne ferait que le morceler d'avantage.

Lui parler oui, c'était peut-être mieux ainsi, au moins pourraient-ils se faire de « dignes » adieux, mais pas trop longtemps, il ne le pouvait pas. Déjà, ses jambes flageolaient et ses mains, crispées aux barreaux, tremblaient au point qu'il commençait à en lâcher les contours.

Quelques mots durs pour lui exprimer son sentiment, une ou deux boutades pour le faire sourire...Il ne pouvait s'en empêcher avec son ami. Cela avait toujours été la facette qu'il lui accordait volontiers malgré sa franchise absolue. C'était un jeu qu'ils avaient toujours pratiqué, même dans les pires circonstances. Cela leur rendait parfois quelques forces.

Soudain, Gaspard lui fit des excuses. Pourquoi s'excusait-il ? Alexender ne comprit pas sur le moment. Son esprit, brûlant de fièvre, aussi retourné et vaseux que l'océan après un raz-de-marée, altéra quelques mots que lui murmurait l'animal. Le retrouver avant...? Le mettre en sécurité ? Son pauvre ami avait tout fait pour le retrouver, c'était à la fois merveilleux et terrifiant. Merveilleux car de voir qu'il avait encore pour cet homme une place de choix, une importance particulière dans sa vie, aussi extraordinaire fut-elle, le rendait nostalgique et fou de joie, mais aussi terrifiant car il constatait aussi à son plus grand regret qu'il restait pour lui un affreux fardeau, un poids mortel, toujours plus lourd à porter, toujours plus dangereux.

Alexender ne répondit pas. Il n'en eu pas la force. Tout son corps tremblait désormais. Sous le coup de l'émotion et de la fatigue, ses nerfs et son cerveau ne suivaient plus. Il baissa les yeux, ses épaules retombèrent, mais il ne lâcha pas les barreaux pour autant, comme s'il avait encore en lui une braise prête à se laisser raviver, une envie de se raccrocher à la vie plutôt qu'à la mort.

Gaspard le réprimanda. Il ne voulait pas l'abandonner, il s'était donné beaucoup de mal pour le retrouver.

« Tu divagues »
Oui certainement...Ces mots revenaient régulièrement dans sa tête. Il buvait trop.
« quand je t'aurai sorti d'ici »
Comment ? C'était sans espoir...Quelle drôle d'idée... !
« L'imbécile n'est pas enfermé lui.»

- Hahaha...Oui...J'en fais un beau d'imbécile...

Le Hunter ne semblait plus présent. Il fermait les yeux et gardait la tête baissée, comme s'il s'endormait. Ses doigts se desserraient lentement. Il ne pouvait plus tenir debout. Son souffle parvint à son ami qui, presque indifférent, semblait chercher le moyen de le tirer de là sans écouter ses grognements fatigués. C'était de vaines tentatives, une véritable perte de temps ! Comment pourrait-il le sortir d'ici ? Il était trop volumineux, sans outils, sans les clés, sans rien...

Alexender rassemblait ses forces pour se tenir prêt à repousser vivement Gaspard. Il fallait qu'il décampe ou la police finirait par l'attraper. Avec tous les cris qu'il avait déjà poussés et comme le jour allait se lever, il doutait fortement que son ami ne soit pas repéré.
Ses doigts lâchèrent l'animal et les barreaux. Il ouvrit la bouche pour lui demander de disparaître et de retourner d'où il venait sans jamais revenir, mais ce dernier fut plus rapide que lui : la chouette lui demanda de reculer et de s'éloigner du mur. Perplexe, le jeune homme sembla reprendre réellement conscience.


- Que... ? Tu ne peux pas passer à travers les...barreaux. De...de toute façon la porte est fermée, impossible de sortir par l'intérieur...

Mais Gaspard ne l'écoutait plus, il lui expliquait qu'il allait transmuter le mur pour le libérer.

- Le...transmuter ? Répéta le Hunter en levant un sourcil.

Sans y croire, Alexender recula pourtant. Le ton du Lycanthrope avait été assez convainquant pour qu'il lui obéisse. Lentement, il s'éloigna de la fenêtre et regagna les ténèbres de sa cellule. Dos à la porte, tout au fond de la salle exiguë, il se laissa descendre jusqu'au sol où il finit par s'asseoir.

La transmutation était un terme alchimique ou il ne s'y connaissait pas ! De fait, il ne s'y connaissait pas...Mais son ami lui en avait déjà parlé plusieurs fois et, même s'il n'avait jamais vu ce dernier s'en servir, il savait que l'on pouvait faire de nombreuses choses avec cette forme de magie. Mais...comment comptait-il faire ? Pouvait-il donc utiliser l'Alchimie sous sa forme animale ?

Après quelques minutes de longues réflexion, le Lycanthrope lui dit qu'il ne donnait pas cher de sa peau s'il se loupait...Alexender paniqua:


- At...Attends...Qu'est-ce que tu fais?

Le Hunter vit alors l'ombre de la chouette s'étendre et devenir humaine. Ébahit, il posa les mains au sol comme pour s'assurer qu'il était toujours dans la réalité. La pierre humide lui colla la peau. Oui, il était toujours là, bien vivant, mais pétrifié. Un son contre la pierre lui indiqua que son ami la raclait avec quelque chose. Alexender ne pu s'empêcher de laisser sa curiosité et la peur prendre le pas sur sa fatigue: lentement, il se releva en s'agrippant à la porte bardée de fer pour tendre le cou et tenter de voir ce que le Lycanthrope trafiquait. Il ne vit rien. Il faisait trop sombre.
Soudain, un grand éclair de lumière l'aveugla. Il porta aussitôt son bras devant ses yeux et gémit de douleur. Il y eut alors un bruit de pierres qui glissent, les barreaux cédèrent, le mur s'ouvrit et Gaspard disparut soudainement. Comme s'il avait soudainement pris conscience de la suite, Alexender se jeta en avant dans un élan désespéré pour rattraper son ami par les épaules.


- GASPARD!!

Ses doigts s'enfoncèrent dans le manteau du Lycanthrope qui basculait dans le vide et, dans un effort surhumain, il le ramena à lui. Son pied glissa sur un morceau de pierre et sa chemise grande ouverte pris le vent de plein fouet manquant de le faire tomber dans le vide avec son ami mais, avec un rugissement de lion, il tira Gaspard sur le rebord de pierre désormais entièrement transmuté.
Enfin, il se laissa tomber en arrière, assis avec le Lycanthrope entre ses jambes à l'abandon. Épuisé, il soupira sans pour autant relâcher son ami. Ses doigts restèrent longtemps crispés sur son torse tandis qu'il laissait sa tête reposer sur son épaule. Il avait manqué de le perdre ! C'était horrible ! Son cœur battait la chamade comme jamais et rien, ni ses blessures, ni sa faim, ni même sa vie n'auraient pu retenir son geste salvateur.

Quelques minutes passèrent pendant lesquels le Hunter fut incapable de lâcher son compagnon. Il n'arrivait pas à calmer sa peur. Mais bientôt ses côtes droites le firent souffrir et il retrouva une partie de ses esprits. Lentement, il laissa Gaspard quitter ses bras en le poussant légèrement en avant puis il se recroquevilla un peu sur lui-même en grognant, les mains jointes sur son poitrail.


- Pfff...Pouffa-t-il dans un soupir rauque, Eulalia va me tuer...ils m'ont encore pété des côtes ces fils de chien...

Mais cette douleur n'était rien comparée à celle qu'il avait ressenti lorsqu'il s'était pris la fameuse balle au plexus et, en s'agrippant à son ami, il réussit à se relever. Doucement, il s'approcha du bord et jeta un coup d'oeil sur l'à-pic qui se présentait à eux. Il frissonna et entreprit de fermer sa chemise à laquelle il manquait de toute évidence plusieurs boutons. Ses cheveux flottèrent dans la brise qui éloignait maintenant les nuages.

- Tu ferais un bon magicien...dans un cirque...on pourrait monter un spectacle...Fit-il en observant l'horizon qui s'éclaircissait de couleurs pastels.

Derrière cette nouvelle boutade, Alexender avait été réellement impressionné par les dons du Lycan. Non seulement ses transformations animales l'avaient scié en deux mais en plus il venait maintenant d'ouvrir le mur de sa cellule comme s'il eut s'agit d'un tas de cubes offerts à un enfant...Ou à un acrobate...Quel cinglé !
L'air frais qui caressait maintenant son visage glaça ses muscles endoloris et trempés mais cette sensation de pureté, comparée à l'odeur pestilentielle de sa cellule, lui donna un regain d'énergie. Il respira profondément cet avant-goût de liberté et se tourna vers son ami.


- Et maintenant ? Fit-il en plongeant ses yeux d'airain dans ceux du Lycanthrope avec un sourire amusé. Tu as amené un tapis volant? Je n'ai pas d'ailes moi...

Après un silence, Alexender posa une main sur l'épaule de Gaspard. Il hésita, mais il finit par le prendre tout entier dans ses bras pour lui faire une brusque accolade fraternelle. Cette dernière dura aussi longtemps que son soupir de bonheur:

- Je ne pensais jamais te revoir...

Ses yeux brûlaient de larmes.


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Gaspard de Sorel
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MessageSujet: Re: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeLun 31 Mar - 20:11

Joie des retrouvailles, effroi des circonstances, crainte de l'échec, puis le ballet avorté d'une tentative d'éviction adroitement contrée par l'entêtement du parti adverse doté d'une obstination frôlant l'irréflexion. Tout cela pour se retrouver le corps pendu dans le vide, impuissant contre l'appel de la terre, le retour à la poussière. Gaspard avait beau y mettre toutes ses forces, il ne réussissait pas à remonter sur la corniche, c'était à peine s'il parvenait à soutenir son poids à la force de ses bras déjà affaiblis puisqu'il avait déjà dû jouer l’acrobate avant de tenter cette transmutation de fortune. Cette entreprise avait été de la folie depuis le début.

C'était un « imbécile » comme le lui avait si sagement dit Alexender un peu plus tôt. Libre de ses faits et gestes certes, mais un bel abruti sans aucun doute. Rapidement, sans prendre le temps de la réflexion, après tout il n'en avait pas le luxe, il avait conçu un plan boiteux, à peine réfléchi. Il avait fait passer la vitesse avant la prudence, ce qui n'était pas dans ses habitudes. C'était là une bien belle erreur, puisqu'il n'avait pas pu penser à toutes les éventualités. Bien sur il avait pesé ses chances de tomber dans le vide, mais elles lui avaient parues bien faibles, jusqu'à ce qu'il se retrouve ainsi dans cette fâcheuse position, luttant pour se hisser sur le balconnet. Mais à quoi bon agir vite si c'était pour se retrouver à l'état de bouillie au pied de la Tour de Londres ? S'il tombait maintenant, son ami n'aurait pas plus de chance de s'échapper que s'il était resté hors du coup. Alexender avait besoin de lui pour descendre, il n'avait pas d'ailes, il n'était qu'un homme. Le Lycanthrope était son seul et unique atout maintenant, il ne devait pas faillir. Il fallait remonter.
Pendant qu'il préparait l'évasion du prisonnier, Gaspard ne s'était pas donné la peine de donner d’explications sur ses intentions, alors que le Hunter demandait à comprendre, réclamait des détails. Il s'était contenté d'un « patientes et tu verras » ; il ne devait pas se déconcentrer, Alexender comprendrait plus tard quand tout serait fait, cela valait mieux. Le bicentenaire ne voulait pas tergiverser, il ne voulait pas expliquer son geste, ni sa manière de procéder, par manque de temps et peur de voir son entreprise rejetée. Moins Alexender en saurait, moins il aurait les armes pour le dissuader de s'exécuter. Enfin, celui-ci était dans un tel état de fatigue qu'il n'en aurait peut-être pas eut la force. Tremblant, somnolant, à deux doigts de tomber inconscient. Il n'y avait plus de vie dans ses yeux. Il s'avouait vaincu. Mais non, tout n'était pas encore perdu. S'il n'était plus capable de le voir, Gaspard lui insufflerait un nouvel espoir, de force s'il le fallait. Pour une fois, ce serait lui qui agirait sur un coup de tête. Et maintenant s'il avait pu, il s'en serait mordu les doigts, cependant ceux-ci étaient désespérément incrustés dans la pierre pour lui éviter la chute.
Oh bien sur, il avait ébauché un sourire lorsque Alexender lui avait dit qu'il ne pouvait pas passer entre les barreaux, que sa cellule était close, qu'il n'y avait rien à faire. Et ce sourire s'était agrandit lorsque son ami avait répété sans y croire, sans certainement comprendre, qu'il allait transmuter le mur. Gaspard voulait bien croire qu'il était sceptique, c'était tout à fait compréhensible, mais malgré ses doutes, Alexender s'était reculé. Cette marque d’approbation, de confiance, fut le coup de pouce qui donna au Lycanthrope l'impulsion pour risquer délibérément sa vie pour l'aristocrate déchu. Il se remémora les bases de l'alchimie et juste avant de se lancer il lui demanda de surtout pas s'approcher. De son coté Alexender semblait avoir surtout retenu qu'il n'était pas très sûr de lui, d'une voix où perçait une certaine panique il lui demanda ce qu'il faisait, mais Gaspard était dors et déjà en train de reprendre forme humaine. Ceci fait, après avoir assuré ses appuis et manqué de tomber dans le vide, il dit finalement entre ses dents serrées :


- Je... tricote... des... chaussettes... *Cela ne se voit pas ?*

Charmante tentative de faire de l'humour dans un moment qui pouvait avoir des conséquences désastreuses. Incapable de terminer sa phrase, il n'en pensait pas moins. Mais l'heure n'était pas à la plaisanterie. Aussi, il se reconcentra vite sur son objectif. Après maints efforts il grava son cercle et effectua sa transmutation.
Tout se passa en un éclair. Le mur se déroba sous ses mains et il se rattrapa in-extremis au balcon qui venait de le déséquilibrer dans sa chute. Ses griffes s'étaient plantées dans la pierre irrégulière, son corps tout entier se battait pour remonter, pour se mettre en sécurité, pourtant il n'y arrivait pas, il ne pouvait pas le faire seul. Dans sa tête ses entités affolées lui insufflaient leur force. En vain. Son esprit se débattait, il était ralentit par la peur, cette même peur qui crispait ses muscles. Il ne parvenait pas à réfléchir clairement. C'était si soudain. Trêves de mots, il fallait agir. Maintenant. Comment ? *Transformes toi*, ordonna Œil de Lune qui s'adressait à la fois à Galyllée et à Ambre, *déploies tes ailes, transforme toi !!*. Oui, les plumes. Les ailes. Voler. Il pouvait voler. C'était trop dur. Il y avait trop de choses à penser en un même instant. Ne pas tomber, surtout ne pas lâcher. Et cette maudite peur qui le paralysait. Tout allait trop vite et trop lentement à la fois. L'adrénaline lui faisait perdre toute notion du temps, elle le maintenait en vie, mais pour combien de secondes encore ? Il avait l'impression que son cœur allait exploser. Il n'allait tout de même pas terminer sa vie ainsi ? Deux cent ans d’existence pour sentir ses membres se broyer au contact de la terre. Pas question. Non. Mais c'était trop dur. Il sentait ses forces faiblir. C'était une cacophonie à l'intérieur de son esprit. Ses oreilles bourdonnaient. Il avait mal. Malgré tout il entendit clairement Alexender hurler son prénom. Gaspard était incapable de parler. Sa bouche émettaient seulement des grognements entre rage et désespoir en voyant que ses tentatives pour remonter restaient inutiles. *Alex. Alex. Alex.* Voilà les seules pensées claires qu'il était capable d’émettre à cet instant, les yeux écarquillés, exorbités, les trais déformés, crispés par la terreur. Jamais le Lycanthrope n'avait paru si jeune et si vieux à la fois. Il était démuni. Ses pensées s’emmêlaient, tandis que son visage se paralysait dans une ultime grimace d'effroi mêlée à une supplique muette, alors qu'il voyait Alexender se jeter sur lui pour le rattraper. Ses griffes lâchaient prises alors qu'il faisait tout pour se stabiliser, il glissait encore.
D'un coup, il sentit les mains de son ami lui labourer le dos et le hisser hors du vide, mais alors qu'il entendait Galyllée pousser un ululement soulagé qui lui transperça les tympans, il sentit que le Hunter était déséquilibré. Il n'était plus assez lui-même pour se rendre compte que le vent soufflait toujours aussi fort au dehors et qu'il s'était engouffré dans la chemise de son ami, la faisant gonfler et menaçant de les faire tous deux basculer dans le vide. Il entendit le rugissement d'Alexender qui luttait contre les éléments. Il comprit qu'ils basculaient et c'est avec un intense soulagement qu'il sentit son corps s'effondrer sur le balcon. Dans un dernier effort, son ami l'avait retourné avant qu'ils n'atteignent le sol.
Le souffle court, à bout de forces, Gaspard jonchait dans une position impensable, son dos était appuyé contre le torse du prisonnier qui le maintenait contre lui les mains crispées dans ses chairs, ses jambes tremblantes tressautant entre celles de son ami, la tête pendante, le menton contre sa poitrine, il avait la bouche grande ouverte tandis qu'il respirait à toute vitesse. Il n'avait pas encore réalisé ce qui venait de se passer. Il sentait le souffle chaud d'Alexender contre son cou, tandis que sa tête reposait mollement sur son épaule. En vie. Il était passé à deux doigts de la mort. Il était en vie. Un rire nerveux s'échappa entre ses lèvres elles aussi tremblantes. Galyllée et Œil de Lune s'étaient tus, il sentait cependant leur soulagement à eux aussi. Il sentait la reconnaissance qu'ils éprouvaient pour Alexender. Le cœur battant du bicentenaire ne parvenait pas à se calmer. C'était un tam-tam incessant. Apaisant. A peu de choses près, il était mort. Ces tam-tams c'était la vie. Ses mains jusqu'ici ballantes vinrent recouvrir son visage et étouffer un nouveau rire. C'était le contrecoup. Ses doigts se couvrirent d'une fine pellicule d'humidité salée, conséquence de son soulagement. Sous ses deux mains jointes, il dissimulait au monde son visage ravagé. Les plus puissantes émotions sont celles qui sont indescriptibles. Lentement, l’information se formait dans son esprit : si Alex n'avait pas été si prompt à le rattraper, il ne serait plus là.
Enfin, il put prononcer ce mot :


- Merci, simple et concis, il exprimait toute sa gratitude.

Incapable de penser clairement, Gaspard était perdu. Dans son esprit se rejouait sans cesse cette scène où il avait échappé à la mort de justesse. Il aurait été incapable de se métamorphoser en chouette dans l'état dans lequel il était. Alexender était ni plus ni moins son sauveur. Il était venu ici pour sortir son ami de sa geôle et c'était lui qui lui sauvait la vie. Belle prestation Charles !
Bien que coupable, Gaspard se sentait surtout excessivement vidé de ses forces et soulagé. Ce fut le Hunter qui le fit revenir à l'instant présent, lorsqu'il le poussa légèrement en avant, en lâchant son torse. A cet instant seulement le Lycanthrope se rendit compte à quel point la poigne de son ami s'était révélé puissante, il se sentit presque mieux respirer. Il se frotta le visage et essuya promptement ses mains sur son pantalon. Ses larmes s'étaient taries aussi vite que son rire nerveux. Il ramena ses jambes près de son torse et posa ses avants bras sur ses genoux, la tête pendante. Il devait se reprendre, mais il sentait encore tous ses muscles tremblants suite à leur précédent effort.
Quand Alexender soupira, il sursauta, il releva la tête et la tourna vers son ami, un sourcil haussé. Il ne savait pas qui était cette Eulalia. Oh, il avait les côtes cassées ? Ça n'était pas bon pour leurs affaires. Ils devaient pourtant s'en accommoder. Tandis que le Hunter se relevait en prenant appui sur lui, le Lycanthrope grimaça. A travers la chemise ouverte, il avait aperçu quelques blessures plus ou moins récentes, les policiers n'y étaient pas allés de main morte avec lui, des auréoles rougeâtres maculaient sa peau où il avait reçu des coups. Cela devait être particulièrement douloureux.


- Il faudra soigner tout ça une fois que tu seras en sécurité.

Parce que ce n'était pas fini. Ils devaient encore descendre d'ici. En s'aidant de ses mains, Gaspard se releva, en observant Alexender s'approcher du vide. Il frissonna en même temps que son ami, pas à cause du froid mais de la peur que lui inspirait cette vision. Il carra la mâchoire et recula d'un pas. Ses yeux étaient fixés sur les cheveux désormais courts du Hunter qui voletaient au grès du vent. Il se demandait s'il regrettait de les avoir ainsi raccourcis. Il s'arracha à cette vision et s'épongea le front à l'aide de la manche de son manteau, la fraîcheur du matin lui picotait le visage, il n'imaginait même pas le froid que devait ressentir son ami alors qu'il ne portait qu'une chemise rapiécée.
Le bicentenaire sentit un sourire lui découvrir les dents. Alexender ne changerait jamais. Il avait toujours un mot pour rire. C'était rassurant de voir que certaines choses étaient immuables. Il fixa son regard sur l'horizon qui s'éclaircissait.


- J'accepte ton offre si tu deviens mon assistante. Oui tout bon magicien doit avoir une belle femme à ses côtés pour détourner l'attention de ses tours. Dommage que tu te sois coupé les cheveux d'ailleurs.

Gaspard fit une petite moue. Il n'aurait peut-être pas dû ajouter ça. Trop tard après tout. Son ami se retourna vers lui. Leurs yeux se croisèrent. C'était comme si ceux d'Alexender avaient repris vie. Voilà qui était rassurant. Toujours aussi taquin, il souleva le problème qui les attendait : comment allaient-ils descendre d'ici ?

- Un rien t'amuse on dirait... Maintenant... Et bien maintenant je vais encore jouer au magicien, parce que j'ai bien peur de ne pas avoir pensé à prendre mon tapis volant, ma tendre assistante n'était pas là pour me le rappeler, tu comprends ? Il marqua une pause.

Alexender lui posa une main sur l'épaule. Il sembla avoir un moment d'hésitation, puis il l'attira dans ses bras dans une soudaine embrassade. Après un instant de surprise, Gaspard resserra ses bras sur son ami et lui rendit son accolade avec force, en faisant toutefois attention à ne pas lui broyer les os. Cet élan d'affection fit fondre en lui toutes ses dernières réticences. Rien ne comptait plus que l'amitié. Il avait pris des risques. Il n'était même pas certain de la suite des événements. Peut-être qu'il se ferait lui aussi prendre la main dans le sac, qu'il finirait lui aussi par croupir en compagnie du Hunter dans une cellule immonde. Mais leur amitié valait bien tout ça. Rien ne remplacerait les souvenirs. La chaleur d'une étreinte fraternelle. Les émotions affluaient en Gaspard. Il était heureux d'avoir retrouvé Alex. La voix incertaine, il répondit à son ami avec lenteur :


- Et moi dont... J'ai cru t'avoir perdu pour de bon, que tu avais disparu. J'ai même supposé que tu avais quitté la Grade-Bretagne pour te mettre à l'abri. Tu aurais peut-être dû... Mais Dieu que c'est bon de te revoir. Mon ami... Oh...

La bouche de Gaspard se serra en un sourire plein de retenue. Il leva les yeux au ciel qui ne retardait pas son aurore pour leurs retrouvailles. Ils devraient bientôt s'activer. Sa main remonta dans le dos de Alexender pour venir se poser dans ses cheveux, il tourna légèrement la tête et lui murmura à l'oreille :

- J'ai eut tellement peur de te perdre.

Puis doucement, il se détacha de leur étreinte. Il posa ses mains sur les épaules du rouquin et secoua la tête, puis il le lâcha tout à fait, ramenant ses bras près de son corps. Il laissa un instant passer avant d'indiquer la cellule d'un signe de tête.

- Bon, tu me fais visiter ?

Sans attendre, il quitta la corniche pour se retrouver dans l'ombre de la prison. Malgré le mur manquant, l'odeur pestilentielle de la pièce demeurait présente. Mais au moins, il n'était plus au bord du gouffre. D'ailleurs, depuis que son ami l'en avait tiré, il avait tout fait pour éviter de regarder vers le bas. En quelques gestes, il retira son manteau et se retourna. Il tendit son vêtement :

- Tiens, tu en as plus besoin que moi je pense.

Sans sa veste, il était en chemise avec par dessus un boléro qu'il déboutonna. Autant qu'il se mette à l'aise avant de se remettre à la tâche. Il se mit à genoux juste devant l'ouverture qu'il avait faite dans le mur.

- Même si nous n'avons pas d'ailes, il nous reste des bras et des jambes. Je me demande... Si je nous fais une échelle qui va jusqu'en bas, tu penses être en état de descendre ?

Il ne voyait que ce moyen pour qu'ils puissent tous deux sortir d'ici sans alerter les gardes. Et encore, c'était risqué. Le jour pointait et rien n'était fait. S'ils n'avaient pas de chance, quelqu'un s’apercevrait de leur tentative d'évasion et s'en serait fini. Ils devaient agir vite. Ils devaient être prêts à tout. Gaspard devait s'attendre à ce que tout ne tourne pas à son avantage. Il devait admettre qu'il y avait une grande marge d'erreur. Mais ses retrouvailles avec Alexender l'avaient remotivés. Il savait pourquoi il se battait. Pour qui. Il n'abandonnerait pas, même s'il devait se battre. Ils prendraient la fuite tous les deux, quoi qu'il arrive. Quoi qu'il en coute. Sa réputation, il en avait cure, qu'elle aille brûler en enfer. L'important c'était de rester unis, quitte à ce qu'il se brûle les ailes. Il était le roi de la fuite. Au pire, oui au pire, il pourrait toujours se reconstruire une vie ailleurs. Il s'en fichait pas mal, tant que son ami était en sécurité.
Cette nuit lui avait ouvert les yeux.
Bon, il était temps d'agir. De ses doigts griffus, Gaspard entrepris à nouveau de graver un cercle de transmutation dans la pierre de la prison. Si tout se passait bien, ils seraient en bas d'ici peu et bientôt hors de portée des autorités. C'était bien plus simple maintenant qu'il pouvait voir ce qu'il faisait, nettement plus pratique. Après avoir inspiré un bon coup, il retint son souffle et joignit ses mains, avant de les poser à plat sur son cercle. Il y eut un éclair de lumière éblouissant, tandis que la corniche qu'il avait créée se résorbait devant ses yeux plissés. En même temps, des excroissances de pierre émergèrent du mur de la Tour de Londres, de l'ouverture qu'avait faite l'alchimiste jusqu'au sol, dans une parfaite ligne droite. Gaspard pencha la tête dans le vide avec une légère appréhension qu'il tenta de ne pas laisser transparaitre. Il vit que les prises qu'il avait créé étaient plus ou moins semblables et comportaient des encoches parfaites pour s'y agripper du bout des doigts.
Son visage se tourna vers Alexender avec un sourire satisfait.


- A moi l'honneur, je vais tester si ces petites merveilles sont solides.

Derrière son apparente insouciance, il sentait sa tension monter. Il sentait encore qu'il avait mal dans les membres. La descente allait être une rude épreuve et pourtant il était en bonne santé. Il n'imaginait même pas ce que cela allait être pour son ami. Mais le Hunter en avait vu d'autres, il savait qu'il en était capable. Pas le choix après tout.
Le Lycanthrope se plaça près de l'échelle, il fit disparaitre ses jambes au dehors et posa ses pieds sur l'une des excroissances de pierre. Il testa leur résistance. Après un instant d'hésitation il commença la pénible descente et dit adieu à la sécurité de la cellule.


Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Gaspar10
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Alexender Von Ravellow
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MessageSujet: Re: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeSam 5 Avr - 11:54

Alexender venait d'avoir eu la peur de sa vie. Rien, jusqu'à présent, ne l'avait autant affolé que cette vision de son ami qui basculait dans le vide. Gaspard avait ouvert le mur, libérant l'espace clos de la cellule dans une bourrasque phénoménale et l'éclat lumineux dû à la réaction alchimique les avait aveuglés tous les deux, mais le regard mordoré du Hunter n'avait pu se détacher du Lycanthrope qui disparaissait dans l'ombre de la corniche. Son cœur avait alors bondi, tout comme son corps en entier. Chacun de ses muscles endoloris s'était tendu vers cet ami, ce précieux ami, ce seul ami, qu'il perdrait sans son aide. Ses bras l'avaient rattrapé de justesse, ses doigts s'étaient crispés sur lui comme on s'accroche à un bien qu'on cherche à nous arracher et qu'on refuse d'abandonner.

Non, Gaspard ne tomberait pas dans l'abîme ! Non, il ne mourrait pas ainsi ! Tout son être s'y opposerait ! Il n'avait pas le droit de disparaître de cette façon ! Jamais !

Les forces cachées d'Alexender avaient ainsi resurgi pour cette noble action. Il avait sauvé Gaspard in extremis, dans un cri déchirant venu tout droit du coeur.
Ce n'est que lorsqu'ils s'étaient enfin trouvés hors de danger, appuyés l'un contre l'autre sur les pierres glacées de la Tour, qu'il avait sentit que ses membres tremblants ne sauraient recommencer semblable exploit. Il était brisé, fourbu, blessé et, sans le savoir encore, déjà fiévreux. En effet, les dures épreuves qu'il avait vécues ces dernières semaines, par-dessus une mélancolie de plus en plus pesante, l'alcool aussi, ses sorties nocturnes, ses blessures et cette capture mouvementée, avaient sans aucun doute altéré ses défenses naturelles et il était maintenant arrivé à un point dramatique. Passer de l'alcôve douillette de Romerta, parfumée, éclairée, chaleureuse, agréablement molletonnée, à cette cellule humide, rugueuse, puante, sombre et glacée, avait été un ultime choc pour son malheureux corps. Son organisme avait beau lutter contre les miasmes qui traînaient de-ci de-là, la maladie l'avait déjà pénétré. Oui, ce n'était qu'un homme. Un homme qui avait trop donné en trop peu de temps.

S'aidant de son ami pour se remettre sur ses jambes flageolantes, Alexender s'était ensuite approché du bord. Le vent de l'aube s'engouffrait dans sa chemise qu'il tentait de fermer tant bien que mal. L'air était frais mais le Hunter ne frissonnait que de peur et d'émotion, même s'il cachait ces sentiments derrière quelques boutades, comme à son habitude. Sa chemise était trempée et pourtant il n'avait pas froid : son front était brûlant.
Observant le vide, il respira cet air de liberté qui s'offrait à lui. Mais, en son cœur, un cri perçant ne cessait de l'empêcher d'apprécier ce moment : qu'allaient-ils donc faire maintenant ? Pourquoi Gaspard s'était-il autant compromis pour ça ? Il venait de risquer sa vie en ouvrant ce mur, mais il leur restait encore un à-pic à franchir...
Le gouffre sous les pieds du Hunter lui donna le tournis. Il ferma les yeux quelques secondes puis, levant son regard sur l'horizon, il vit que l'aube se levait franchement. Au loin, le ciel prenait de la couleur et les nuages de la nuit commençaient à se déchirer en longs lambeaux paresseux. C'était à la fois magnifique et terrible. Le temps était contre eux et l'horloge sonnait déjà pour ses "crimes".
Mais où étaient donc les gardiens ? Pourquoi n'avait-il encore eu aucune visite ? C'était étrange et, en soi, bienheureux. Cependant il doutait que cette latence ne dure...

Les deux amis échangèrent alors quelques boutades. C'était nerveux, mais c'était aussi une preuve de leur existence. L'un et l'autre n'avait jamais cessé de rire, et ce en toute circonstance. C'était en partie ce qui les caractérisait, ce qui les rattachait à la vie.


- Tu les aurais vus teints en noir...C'était affreux !Soupira Alexender en parlant de ses cheveux tout en se tournant vers son ami. Il passa sa main dans ses cheveux d'un air très féminin. Je ne m'y serai jamais fait...  

Riant pour le tapis volant, Gaspard expliqua qu'il allait effectivement devoir utiliser de nouveaux tours de magie pour les sortir d'ici. Alexender tiqua l'air dubitatif.

- Ne compte pas sur moi pour te servir d'assistante si après ce tour il ne me reste plus qu'un bras...T'es dangereux mon ami...Je me méfie...

Le Hunter sourit. Il plaisantait, bien évidemment : arrivé à ce stade, il suivrait son compagnon où qu'il veuille l'emmener. Malgré tout, un mince espoir lui gorgeait l'âme.

Ce fut alors l'accolade, la plus franche et la plus belle des accolades. Gaspard le laissa faire puis il l'accompagna dans son élan affectif. L'aristocrate déchu soupira dans les bras du Lycanthrope. Quelle joie de le retrouver ! Même s'il devait mourir dans quelques heures, il l'aurait au moins revu une dernière fois, il saurait qu'il lui aurait survécu...Quelque part, Gaspard représenterait toujours une partie de lui-même sur terre...


- Oui...j'aurais dû quitter l'Angleterre...Je suis un idiot...Je vous mets tous en danger...Mais c'est trop tard Gaspard...C'est peut-être mieux ainsi...Fit le rouquin en recueillant dans son oreille les doux mots de son ami.

Mais ce dernier ne semblait pas prêt de le laisser mourir. Après ces chaleureuses embrassades, il lui saisit les épaules avant de se tourner vers la cellule. Mais que voulait-il donc essayer ? Alexender le suivit lentement, sans comprendre où voulait en venir le Lycanthrope.


- Visiter ? … Mais où est-ce que tu vas ? …On ne peut pas passer par la porte...C'est trop bien fermé...C'est peine perdue...

Gaspard ne semblait pas l'écouter. D'un pas ferme, il s'était déjà avancé dans la pénombre de la cellule. Alexender reçu son manteau en bégayant.

- Merci...Mais...Qu'est-ce que tu vas faire ?

Ramenant sur lui le manteau pour éviter qu'il ne tombe, Alexender rejoint Gaspard qui s'était maintenant agenouillé au sol. A sa question sur l'échelle, le Hunter ne répondit qu'un haussement de sourcils. Que voulait-il dire ? Il n'y avait rien pour fabriquer une échelle !
Il se pencha au dessus de l'épaule de son ami pour tenter de voir ce qu'il faisait. Et, soudain, il comprit. Gaspard allait de nouveau utiliser l'Alchimie. Au sol, il venait de tracer un cercle étrange avec quelques symboles ésotériques...
Le regard d'Alexender s'attarda sur les ongles démesurés qu'avait le Lycanthrope en cet instant. Jusque là, il n'y avait pas prêté attention. C'était étrange...Est-ce qu'il pouvait donc ainsi conserver uniquement ce qu'il désirait de ses "entités" animales ? C'était drôlement pratique ! Mais cela lui donnait également une touche monstrueuse...Jusqu'où pouvait-il donc aller dans ses transformations ? Il pouvait entièrement ressembler à une chouette...et même en loup d'après ses souvenirs...Mais alors dans sa tête, comment cela se passait-il ? La Lycanthropie était décidément incroyable...Et il n'y comprenait toujours rien.
De même, l'Alchimie était une discipline formidable mais il ne saisissait toujours pas son essence. Il savait seulement qu'il fallait tracer des cercles, joindre les mains et...Non, il ne comprenait pas non plus le principe. Fallait-il penser pour créer ce que l'on voulait ou était-ce le cercle qui dictait tout ? Et puis, d'où venait cette intense lumière qui illuminait toute la scène avant que la matière ne se plie à la volonté de son manipulateur ? A quoi correspondaient les couleurs ?
Tout cela était fort obscur pour son esprit étriqué de chasseur. Il s'était toujours senti dépassé par ces concepts.

Le flash lumineux eut rapidement lieu et les pierres se murent à nouveau pour former cette fois-ci un semblant de marches. Ces dernières finirent par agrémenter le mur d'une échelle...
Alors que les pupilles d'Alexender retrouvaient leur largeur normale face à l'obscurité qui était revenue, son cœur manqua quelques battements. C'était formidable ! Jamais il n'aurait imaginé qu'une telle chose fût possible. C'était inespéré ! L'espoir grandit encore en lui. Peut-être qu'il avait finalement une chance de s'en sortir ?
Mais lorsqu'il vit son ami commencer la descente, il s'inquiéta. Et si l'Alchimie ne permettait pas de réaliser des "barreaux" solides ? Gaspard n'avait pas l'air sûr de lui...Et puis...la question qu'il lui avait posé quelques minutes auparavant tournait dans son esprit : et lui, était-il en état de descendre ?
Le soleil pointa un rayon qui l'aveugla.
Alexender se mordit la lèvre inférieure : il n'avait plus le choix ! Il fallait qu'il tente le tout pour le tout ! C'était sa seule chance d'éviter la potence !

Passant ses bras dans les manches du manteau que son ami avait posé sur les épaules, le Hunter  suivit ce dernier qui était déjà à quelques mètres sous lui. Lentement, avec mille précautions, il s'agrippa aux pierres qui bordaient sa cellule et chercha du pied la prochaine encoche. Ses côtes lui lancèrent des cris de protestation. Ainsi tendu dans le vide, les muscles de ses bras tiraient sur sa cage thoracique et il lui semblait qu'on la lui lacérait à coup de griffes. Serrant les dents, il fit tout pour ignorer ses douleurs. Ses côtes, son thorax, ses genoux...il devait être couvert d'hématomes et chaque contusion cherchait à le ralentir voire même à le faire tomber. Ainsi, alors qu'il descendait plus lentement que Gaspard sans pour autant traîner outre mesure, ses pieds glissèrent à de nombreuses reprises et il se fit peur plus d'une fois, croyant que sa fin était arrivée et qu'il allait s'écraser au sol. Le vent n'aidait pas. Il lui barrait le visage de ses cheveux qui, même raccourcis, ne cessaient de le gêner en collant sa bouche. La lumière de l'aube n'était pas assez forte pour qu'il puisse y voir réellement quelque chose, il allait donc en tâtonnant comme un aveugle.  

Dans sa tête, une foule de sentiments contradictoires s'entrechoquaient encore. Une nouvelle liberté, un espoir fou, la plus belle des amitiés retrouvée, l'avenir qui s'ouvrait de nouveau à lui...tout cela était mêlé à la crainte d'être découvert, à la douleur physique et morale, à la honte aussi, à la colère...Et Suzanne ? Et Marguerite ? Et Romerta ? Les abandonnait-il donc ? Il s'était lancé à la suite de son ami sans y penser une seule seconde, trop heureux d'avoir un échappatoire, mais, maintenant qu'il était agrippé aux pierres froides et qu'il progressait vers le bas de la Tour, ce lieu terrible, empli d'échos des anciens torturés, il songeait à ses domestiques qui étaient peut être, elles, encore en train de croupir dans une geôle aussi nauséabonde que celle qu'il venait de quitter. Quel effroi...Elles ne méritaient décidément pas cela...Tout était de sa faute !

Sa main gauche glissa soudainement. Dans un élan désespéré, accompagné d'un cri de frayeur, il se rattrapa tant bien que mal et évita la chute. Le cœur battant, il cessa sa descente. La sueur perlait sur son front. Il avait l'impression d'être en feu. Timidement, il jeta un œil sous lui pour tenter d'apercevoir Gaspard. Il ne fit que le deviner.


- Gaspard...Souffla-t-il dans sa direction pour l'appeler. Je...n'en peux plus...

Ils n'avaient pas encore descendu assez pour éviter de se tuer s'ils sautaient, c'était évident. Mais déjà le Hunter ne sentait plus ses jambes. Sa faiblesse le débectait mais, cette fois-ci, il ne pouvait plus jouer au dur et l'ignorer, sa vie et celle de son ami étaient en jeu. Peut-être n'auraient-ils jamais dû tenter cette descente...Qu'allait-il faire ? Remonter ? Non...ils étaient à mi-parcours...Dans tous les cas il sentait que ses muscles ne pourraient plus le soutenir très longtemps. Vite, il fallait agir !

Dans un effort surhumain, Alexender posa son pied sur la prochaine encoche. Lentement, il reprit la suite de Gaspard. Une étrange chaleur lui brûlait les joues tandis que le vent sifflait à ses oreilles comme les mânes d'un autre temps murmurent aux vivants ce que les augures ont oublié de dire. « Ta vie ne vaut pas grand chose ». De temps à autre, ses yeux se fermaient. Pourquoi avait-il si chaud ? Ses doigts tremblaient, son corps entier tremblait ! Et cette douleur au plexus ! C'était infernal ! Cette descente était atroce.

Que valait donc la liberté qu'il cherchait à atteindre en cet instant ? Que ferait-il une fois qu'il aurait quitté la Tour ? Où irait-il ? Comment ferait-il pour sauver ses amis ? Il songea à Stan et Katherine. Avaient-ils été pris ? Pourrait-il reformer leur groupe dispersé ?
Il devrait quitter Londres, c'était inévitable s'il voulait survivre...

Sarah...
Qu'allait-elle faire en apprenant qu'il avait été pris avant de enfuir ? Il aurait donné tout l'or du monde pour le savoir. Car dans les tréfonds de son cœur, une maligne maladie commençait à le ronger, celle de la jalousie. Après tout, cette histoire de mariage finirait peut être par plaire à la jeune femme... ? Il se rappelait leur dispute chez Raphaël..., la pluie, et, avant cela, son abandon volontaire au Comte...Cela avait été un choix, "pour le sauver"...Mais elle ne lui avait jamais avoué ce qui s'était réellement passé pendant qu'il croupissait de son côté dans les égouts...Cela lui avait laissé un goût terriblement amer qu'il n'arrivait pas à effacer, celui du doute.
De toute façon, comment pourrait-il la sauver tout en survivant à cet enfer qu'était devenue la capitale pour lui ? Il ne pouvait pas tout mener de front !  
Oui, Alexender hésitait maintenant. Tout lui paraissait insurmontable, il était épuisé par toutes ces histoires...

Soudain, sa main lâcha pour de bon.


- HA ! Gaspard!

Le Hunter tomba dans un cri de surprise et de peur, directement sur son ami qui ne le devançait que de peu sur les échelons improvisés. Il eut alors un réflexe horrible : au passage, il s'agrippa au Lycanthrope pour tenter de se rattraper, mais cela entraîna ce dernier dans le vide avec lui. Malgré ses puissantes griffes de Lycan, le poids du rouquin était conséquent, surtout dans une chute de cet acabit et l'abandon de ses appuis était inévitable.
Les tripes d'Alxender ne firent qu'un tour, tout comme son sang. Mais son esprit n'eut pas le temps de se flageller de cet affreux geste. Ses mains glissèrent sur les marches et son corps bascula en arrière. Ses ongles, déjà abîmés par sa pitoyable errance dans sa cellule, se retournèrent et se brisèrent tout à fait en raclant la surface du mur qu'ils quittaient maintenant dans un terrible mouvement vers le sol. C'était inutile. Rien ne pourrait les sauver.

Mais la chute fut courte, bien plus courte que ce qu'il aurait cru. En vérité, ils n'étaient plus qu'à une dizaine de mètres du sol. Ils atterrirent entre un chemin fait de gravillons et une parcelle de verdure. Le choc fut rude.
Alexender sentit sous son corps de multiples pointes et tandis que sa propre main recevait un bout de bois dans ses chairs. Un buisson...
Le souffle coupé et l'esprit engourdi, le Hunter gémit en roulant sur le côté pour se dégager des feuilles et des gravillons qui lui meurtrissaient le bras gauche et les cuisses. Il se pencha sur le côté et cracha une gerbe de sang. Ses côtes avaient encore bougé...


- Gaspard...Dis-moi que t'es en vie...Gaspard...

Se tournant avec difficulté vers son ami, il cru que son épaule était déboîtée mais lorsqu'il avança son bras vers le Lycanthrope il se rendit compte qu'il n'avait certainement qu'un hématome, au pire une fracture de la clavicule.

- Gaspard...Je suis désolé...Je ne voulais pas...

A quatre pattes, le Hunter attrapa son ami par les épaules pour le tourner sur le dos. Il voulait s'assurer qu'il n'était pas mort et vérifier qu'il était encore capable de bouger. L'inquiétude le rongeait mais la panique s'emparait également de tout ses sens.

- Aller...debout...Viens...Faut s'en aller...Souffla-t-il en regardant de tout côté.

Un agent du Yard, un garde, un badaud...N'importe qui pouvait les voir ici. Ils avaient encore une grille à passer et l'aube jetait déjà un voile rosé sur la ville.
Il tenta de se relever complètement tout en soulevant son ami pour le forcer à avancer mais il trébucha et retourna au sol. Un goût de terre s'attacha à ses gencives. Finalement, rester-là était peut être la meilleure solution. Il ne parviendrait jamais à s'échapper, c'était trop tard. Même s'ils franchissaient les grilles en supposant le miracle de ne pas être aperçus, il ne saurait aller plus loin dans son état. Pourquoi lutter d'avantage ?

Après un moment d'absence, Alexender rouvrit les yeux. Gaspard était vivant, lui aussi, ils devaient continuer, c'était leur dernier espoir.
Avec maintes difficultés, il réussit à se remettre sur ses jambes. Se soutenant l'un l'autre, les deux amis atteignirent la grille. La passer fut une épreuve incroyablement compliquée. Le temps jouait contre eux, Alexender était incapable de se hisser seul par-dessus le fer sans risquer de se tuer pour de bon et la rosée du matin avait enduit les barreaux d'une fine pellicule d'eau. Alexender voulu abandonner une paire de fois mais, malgré tout, il restait aux deux aristocrates un mince espoir qui s'était transformé en une puissante foi.

Lorsqu'ils eurent enfin passé la grille qui cernait le domaine de la Tour, ils s'enfuirent dans les ruelles les plus proches. Les ombres disparaissaient déjà. Au bout d'un moment, Alexender finit par se laisser tomber contre un mur derrière quelques poubelles. Une main sur le cœur, haletant, il transpirait comme un damné.


- Gaspard...J'en peux plus...C'est plus possible...

Allait-il donc crever-là dans cette ruelle ? Après tout leurs efforts, n'irait-il pas plus loin ? Gaspard ne pouvait plus rien pour lui. C'était déjà insensé qu'ils soient arrivés jusqu'ici sans se faire repérer. Où étaient donc les gardiens ? Croyaient-ils qu'une évasion était impossible au point de dormir sans se préoccuper de leurs prisonniers ?

- Pars...Vas-t'en ! Dépêche-toi. Fit-il en repoussant son ami. J'peux pas continuer.

Comme ces mots lui coûtaient ! Abandonner n'était pas dans sa nature, jamais il ne renonçait à quoi que ce soit sans combattre. Mais Gaspard ne pouvait pas le porter, le jour se levait, bientôt les gardiens de la Tour allaient se rendre compte de son évasion...
La fièvre montait. Il se sentait faible. Tout son sang semblait bouillir et pourtant il commençait à trembler de froid. Le vent soufflait dans les ruelles. Il se sentait poisseux, trempé, sale...
Son regard tenta de percer les ténèbres pour fixer celui de son ami. Il était désolé, tellement désolé...


- Gaspard, merci d'être venu me chercher...Mais tu as une vie à bâtir...Avec Julia...Tu ne peux pas tout compromettre pour moi...Il faut...que tu partes.

La douleur au plexus....il la sentait aussi fortement que ce jour-là, au théâtre...Un goût de sang emplissait sa bouche. Il voulait s'allonger-là, sur les pavés, et dormir...juste dormir...tout oublier...

Il s'endormit ou ses tympans ne voulurent plus accepter aucun son. Il cru entendre le mot fiacre, celui de chouette aussi, le nom d'André...Il ne comprit pas tout. Avait-il parlé ou était-ce Gaspard? Oui, c'était une solution. Peut-être...Non il voulait dormir. C'était fini. A jouer au héros, il n'avait réussi qu'à tout perdre.


[HRP/ Fin du RP avec Alexender ici! Suite plus loin chez mon coupain! Very HappyLe Temps de la guérison/HRP]


Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Ban_al10
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Gaspard de Sorel
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MessageSujet: Re: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeVen 2 Mai - 12:52

Il s'en était fallu de peu. Gaspard faisait tout pour ne pas y songer, mais son esprit se repassait encore et encore la scène où il avait manqué de tomber dans le vide, impuissant. Alexender venait de lui sauver la vie in-extremis. Quel vide si trois cœurs battant à l'unisson s'étaient soudain tus ! S'ils n'avaient pas rendu l'âme, le silence cuisant aurait pu tuer ces êtres une seconde fois. Par chance, parce ce qu'elle était la seule à blâmer, le Lycanthrope pouvait compter sur la rapidité d'Alexender. Bien sur, l'aristocrate était soulagé, mais il se trouvait encore entre deux eaux, il ne réalisait pas complètement ce qui venait de se produire, il comprenait qu'il avait frôlé la mort l'espace de quelques secondes, sans pour autant en avoir totalement conscience. Cela viendrait plus tard, une fois que d'adrénaline serait retombée, qu'ils seraient tous deux à l'abri, là oui, Gaspard sentirait la pression retomber et la réalité le frapperait de plein fouet : il avait faillit mourir. Oh, pendant une période de sa vie il avait maudit son immortalité, cependant il s'y était accommodé depuis et il fuyait maintenant la mort comme la peste, pas par peur, pas seulement, c'était surtout par amour de la vie, cette vie de spectateur qu'il chérissait tant. Et là, à peine quelques instants plus tôt, il aurait pu rendre son dernier souffle. Mais Alexender l'avait rattrapé, il avait agit promptement en dépit de sa faiblesse, car malgré son état déplorable, c'était un homme fort, bourré de qualités, un combattant qui ne laisserai pas tomber un ami. Lui il n'aurait pas eu besoin de cette longue réflexion pour venir à son secours, ni une ni deux, il aurait utilisé tous les moyens en sa possession pour le sortir de ce mauvais pas. Cependant Gaspard n'était pas Alexender, il n'avait pas cette vivacité bien qu'il tende ces derniers temps à gommer cette imperfection. Tous deux profondément différents, ces deux hommes n'en étaient pas moins de chers et fidèles amis.
Tandis qu'il reposait muet contre le torse du Hunter, le Lycanthrope entendait ses entités exprimer leur soulagement, puis se prendre le bec fébrilement. Œil de Lune reprochait à Galyllée d'avoir déconcentré leur hôte, tandis qu'elle lui répondait vivement que si Alexender n'avait pas réagit, elle aurait été la seule à pouvoir les sortir de ce mauvais pas. Ambre, encore sous le choc, n'avait pas la force de les faire cesser leurs chamailleries et il devait avouer que ça n'était pas désagréable de voir que même après un tel moment, les esprits conservaient leurs vieilles habitudes. C'était une preuve de stabilité. Les entités durent glaner ses pensées parce qu'elles cessèrent soudain de parler, un peu renfrognées, mais surtout soulagées de la tournure des événements. *Tu remercieras l'humain de notre part* souffla la chouette. Bourru le loup ajouta dans un grognement *Je suis encore capable de m'exprimer sans ton aide* puis à l'intention d'Ambre *Malgré ses allées et venues, Alexender fera toujours partie de notre meute. Tente de lui faire comprendre l'honneur qui lui est fait*. Gaspard était toujours heureux de savoir que ses entités considéraient son ami comme un membre clef de leur existence, il doutait qu'il puisse un jour faire véritablement comprendre le fond de leurs pensées au Hunter, mais cela n'avait pas tant d'importance. Il essaierait toutefois de le lui dire, lorsqu'ils seraient au calme. Par la même occasion, peut-être qu'il lui donnerait enfin quelques précisions sur ce qu'il était véritablement, il pourrait répondre à ses questions sur sa race, chose qu'il n'avait jamais voulu aborder jusque là. Son souci du secret était profondément encré dans ses habitudes, la menace de se dévoiler pesait sur ses épaules, toutefois il pouvait sans crainte faire confiance à son ami. Il avait depuis longtemps gagné le droit de savoir.
L'enveloppe corporelle du Lycanthrope était parcourue de tremblements et de spasmes suite à l'effort qu'elle avait dû subir. Et Gaspard se montra incapable de retenir quelques larmes de soulagement, habilement dissimulées derrière ses mains immenses. Ses pensées étaient brouillées, il vivait pleinement le contrecoup de ses acrobaties et son esprit rejouait la scène en boucle, comme pour le marteler de sa chance. Dans un souffle il remercia son ami, puis celui-ci se leva et Gaspard eut le temps d’apercevoir ses vilaines blessures. A son tour, il se remit sur ses pieds tandis qu'Alexender contemplait le vide. Fidèle à lui même, le Hunter lança quelques boutades pour détendre l'atmosphère et le Lycanthrope se joignit à lui sans rechigner, trop content d'écarter de son esprit les scénarios désastreux qui encombraient ses pensées.
Gaspard sourit, en effet Alexender avec les cheveux noirs, voilà qui semblait trop commun pour cet homme au caractère de feu, lui même ne pourrait s’habituer à un tel changement, mais peut-être, et il se garda bien de lui faire la remarque, aurait-il dû conserver sa teinture, car sa chevelure était probablement-être ce qui l'avait trahit.


- Oh mais quelle horreur à n'en pas douter, souffla Gaspard sur un ton moqueur.

Avec le sourire, Alexender refusa de l'aider à sortir de là, arguant qu'il était méfiant quant à ses pouvoirs magiques. A sa place, l'aristocrate n'aurait pas réagit autrement et lui répondit :


- Ah il m'est impossible de promettre que tes bras resteront intacts,... tu as donc perdu le goût du risque, c'est dommage. Tu te ramollis on dirait, il mima une grimace, Oh ! Serait-ce un cheveu blanc que je vois là ?

Son humeur taquine s'évapora quand la main de Alexender se posa sur son épaule. Son geste se transforma en une accolade fraternelle à laquelle Gaspard ne se retint pas de répondre, trop heureux d'avoir retrouvé son ami. Il avait tant espéré ses retrouvailles qu'il en ressentait presque une douleur physique de les voir se réaliser pour le mieux, étant donné les circonstances. Ces derniers jours, il n'avait songé qu'à cela, hanté par d'innombrable scénarios catastrophes, craignant le pire et se gardant d'espérer le meilleur, de peur que la déception ne vienne à bout de sa raison. Attentivement, le Lycanthrope écouta ses quelques paroles de regrets qui lui firent éprouver de la compassion, puis son cœur s'alourdit à nouveau, rattrapé par le temps présent. Loin de jeter l'éponge, le bicentenaire était prêt à aller jusqu'au bout et à sortir d'ici le prisonnier, il userait de toutes les stratégies pour le faire s'évader de la Tour, même celles qui pourraient le mettre en danger. Ils avaient un objectif et bien qu'Alexender soit atterré, il porterait leurs espoirs pour deux.
Sans donner de précisions sur ses intentions, Gaspard invita son compagnon à retourner avec lui dans sa cellule. Il l'entendit lui poser des questions, auxquelles il répondit d'un mouvement de la main, comme pour chasser une mouche. Pas de temps à perdre, action-réaction, pas de place pour les explications. Il consentit quand même à lui dire donner une piste en lui demandant s'il parviendrait à descendre seul grâce à une échelle. Sans obtenir d'assentiment, il débuta de graver son cercle, puis il transmuta à nouveau le mur. Le regard que portait Alexender sur ses griffes lui échappa et ce fut mieux ainsi car il était toujours gêné de se montrer dans ses mutations partielles. Laisser voir ce qu'il était aux yeux des Hommes l'avait toujours rebuté, pourtant il était fier de ce qu'il était, mais il détestait voir le dégoût pointer dans le regard ou pire encore l'envie. Le désir, c'est ce qui anime l'humanité entière et détruit la beauté en voulant l'atteindre par tous les moyens.
Avec précaution, Gaspard entama la descente. Il n'avait pas le vertige, mais après avoir manqué de tomber quelques minutes plus tôt, il ne pourrait pas affirmer qu'il n'éprouvait pas quelque appréhension. Il pensa à la fatigue qu'il ressentait et se dit que son ami devait être dans un état bien pire que le sien. Pour couronner le tout n'avait-il pas sentit, sous les effluves nauséabondes de la cellule, quelques relents d'alcool ? Il ne pouvait qu'espérer que le prisonnier n'ait pas trop bu ce soir, pour ne pas encore ajouter de difficultés à leur fuite. Les mains crispés sur les barreaux, le Lycanthrope descendait avec lenteur, assurant sa prise et jetant de temps à autre un regard vers le haut où se découpait la forme de son ami dans le ciel qui s'éclaircissait. Il l'entendait haleter dans sa descente et parfois il pensait que son pied était en train de glisser, mais jamais il ne tombait. C'était peut-être là le fruit de son imagination. Et le vent n'aidait en rien dans tout cela, Gaspard se sentait parfois pris dans une bourrasque et devait arrêter son geste, raffermir sa prise et prier pour que tout se termine bientôt. C'était un combat de chaque instant, mais chaque pas les rapprochaient plus encore de la sortie, de la liberté et de la sécurité.
Déjà le bicentenaire voyait plus loin que cette échelle, il réfléchissait à la manière de sortir d'ici. Une fois en bas ils devaient encore passer le mur d'enceinte et ce n'était pas le plus difficile. Comment retourner jusqu'à sa demeure ? L'aube se levait, il leur serait impossible de se cacher tout au long du chemin, en plus ils étaient éreintés, Alexender n'aurait plus aucune force après avoir descendu l'échelle. Mais alors qu'il était en train d’échafauder un plan pour les mettre à l'abri, le cri du Hunter le sortit de ses pensées. Alarmé Gaspard se tendit et lança un regard au dessus de lui, tout juste assez vite pour voir l'ombre de son ami s'agripper à l'échelle dont sa vie dépendait. Il l'entendit l’appeler et lui confier qu'il était à bout de forces. Le genre de phrases qu'il n'avait pas l'habitude d'entendre sortir de la bouche du Hunter. Ils devaient atteindre le plancher des vaches le plus vite possible pour éviter la chute.


- T'as déjà descendu la moitié, l'encouragea Gaspard tout en reprenant la descente, encore un peu et on sautera... Encore un peu...

Ses propres paroles lui rendirent un peu de force et il accéléra la cadence, tandis que Alexender posait son pied sur un nouveau barreau. Ses muscles étaient en feu, ses doigts le faisaient atrocement souffrir. Il était heureux d'avoir des griffes puissantes pour l'aider à s'agripper, mais pestait contre le manque de sommeil qui l'affaiblissait et cette chute qui avait presque eut raison de lui. Il avait le souffle court et son cœur tambourinait dans sa poitrine, il le sentait aussi dans ses tempes. Sa tête lui faisait mal et sa mâchoire crispée n'améliorait rien. Ses entités restaient muettes pour ne pas enrayer sa détermination, mais il les sentait toutes proches de lui à le soutenir de leur simple présence. C'était d'un réconfort sans pareil. Comment pouvaient-donc faire les Hommes ? Seuls dans leur tête, toujours à la recherche de leur âme-sœur, leur jumelle, à laquelle ils avaient été arraché lorsque leur esprit avait retrouvé un corps. Quête idéaliste, souvent vaine, combien pouvaient affirmer qu'ils étaient à nouveau complets, alors que la plupart ne se rendaient même pas compte qu'il leur manquait une partie d'eux-même ? Les Lycanthropes avaient cette fabuleuse chance d'être entiers dès leur création, habités par trois âmes, toujours accompagnés, ne pouvant souffrir de la solitude humaine. Gaspard savait que sa force mentale était décuplée par ce savoir. Mais qu'en était-il de son ami, seul depuis si longtemps, quelles pouvaient être ses sombres pensées  qui se faisaient écho sans recevoir aucune réponse ? Le bicentenaire éprouva de la compassion pour lui qui était affublé d'un terrible destin, comme tant d'autres.
Un nouveau cri de surprise troubla le silence. Tout se passa si vite ! A peine Gaspard eut il comprit que son ami avait lâché prise qu'il se trouvait lui même happé par le vide, entraîné par la malencontreuse main de son meilleur ami. Il n'avait pas eu le temps de resserrer ses doigts sur la pierre que le poids de son ami s'était additionné au sien, ses griffes avaient creusé des sillons dans le mur mais ne l'avaient pas retenu. Trop abasourdit, le Lycanthrope ne cria pas, c'est à peine si une exclamation franchit ses lèvres. Dans sa tête, Galyllée s'affolait, elle tentait de forcer le passage pour entamer une métamorphose et ainsi sauver son hôte de la chute. Bien que l'idée fut bonne, il n'y avait aucune chance qu'elle puisse y parvenir à temps, même avec l'assentiment de Gaspard, trop surpris pour tenter quoi que se soit. Son corps se tourna vers le sol qui approchait trop rapidement, il eut le réflexe de se protéger avec ses bras, tout en sachant qu'il ne manquerait pas de se briser quelque chose.
Il entra durement en contact avec le sol, le choc évacua l'air de ses poumons, pendant quelques instants il cru qu'il n'arriverait plus à inspirer de nouveau. Face contre terre il n'osait pas bouger, de peur de s'être brisé les membres. Même immobile il sentait une affreuse douleur lui paralyser le bras. Ses paumes abîmées par le gravier le brûlaient. Son corps était tombé sur son coté gauche en premier, épargnant s'il était possible les grandes lignes de la partie droite de son anatomie. Mais ce bras gauche... Il y avait de la casse et ça faisait un mal de chien. Il sentait aussi une douleur cuisante dans sa hanche qui avait encaissé le choc de plein fouet et juste au dessous il sentait son sang bouillir dans sa cuisse. Il s'était mit dans un sale état. Œil de Lune avait procédé à une inspection en règle et lui confia qu'excepté son bras, tout était en état de fonctionner. Un peu rassuré, Gaspard se rendit compte qu'il parvenait à nouveau à respirer. Il lâcha un gémissement peu flatteur et son visage se crispa. Ils étaient dans de beaux draps.
Le Lycanthrope n'avait pas entendu son compagnon lui parler, trop focalisé sur ses blessures et son être intérieur, si bien que lorsque Alexender entrepris de le retourner il sursauta en jurant ouvertement, carrant ensuite la mâchoire en sentant la douleur affluer plus encore. Il croisa son regard désolé, alarmé par les événements et ferma les yeux un instant. Gaspard était certain qu'il s'en voulait terriblement, comme si ça pouvait être de sa faute ! Lorsqu'il rouvrit les paupières, son ami regardait de tous cotés, tel un animal acculé. Ils devaient quitter les lieux. Plus facile à dire qu'à faire. Il grogna en essayant de se remettre debout. Par chance, l'adrénaline ne l'avait pas encore quitté, sans quoi il n'aurait pas pu bouger d'un pouce. Alexender tenta de l'aider à se soulever, mais il trébucha et leurs deux corps retombèrent au sol. La tête du Lycan percuta le sol et le sonna. Il rouvrit bientôt les yeux pour voir qu'ils n'étaient plus sur les graviers, mais sur l'herbe verte. Ils n'avaient fait qu'un pas. C'était risible.
C'est alors que ses deux entités se mirent à le rabrouer ouvertement. Il était arrivé jusqu'ici, ce n'était pas le moment d'abandonner la partie, rien n'était perdu. Ils n'avaient plus qu'un mur à traverser et ils seraient à nouveau libres. Un peu de courage bon dieu ! Il n'avait pas vécu deux cent années d'homme pour se laisser abattre face contre terre alors qu'il lui restait des forces...
Ainsi ranimé par ses esprits, Gaspard revint dans la course. Certes il avait mal, mais ce n'était pas insurmontable. Il s'intima l'ordre de taire ses souffrances, fermant ses pensées à la douleur autant qu'il lui était possible et se remit d'abord à quatre pattes, puis debout. Alexender était là lui aussi, ils allaient se soutenir et traverser cette épreuve comme ils l'avaient déjà fait par le passé, ils vaincraient et pourraient en rire plus tard. Ils n'étaient pas seuls, ils étaient un duo de choc et ni la police, ni leurs blessures n'allaient les arrêter.
Parvenus près de la grille, ce fut une nouvelle épreuve, mais ils ne se démontèrent pas, ce fut difficile, douloureux, mais avec maints efforts ils parvinrent à passer au dessus. Honnêtement, Gaspard ignorait comment il avait trouvé la force d'utiliser son bras brisé, les deux amis s'étaient aidés l'un et l'autre à passer la porte et maintenant ils étaient vraiment au dehors de la Tour de Londres. Libres ! Mais pour combien de temps ? Ils devaient trouver une cachette, proche et sécurisante. Sans se concerter, ils s'enfuirent bras dessus bras dessous dans les ruelles encore assombries.
Le Lycanthrope vit le Hunter s'arrêter, le souffle court, le trais tendus, le visage humide. Il se dit qu'il devait avoir une tête relativement similaire et cela l'effraya, c'était comme s'ils portaient sur eux leurs forfaits. Par chance ils n'avaient encore croisé personne, mais cela ne saurait tarder. Que faire ? Ils n'auraient pas le temps d'atteindre la Maison des Sorel, ni la force. Il fallait trouver une idée. Il s'approcha de son ami qu'il sentait faiblir.


- Il faut qu'on trouve une solution,... on n'a pas fait tout ça... pour rien... Crois moi... Ses paroles étaient hachée au rythme de sa respiration saccadée.

Il regardait aux deux extrémités de la ruelle, priant pour que personne ne les surprenne. Ils étaient tous deux reconnaissables. Alexender était un fugitif recherché depuis plusieurs semaines et Gaspard était un aristocrate d'une grande stature, roux qui plus est, s'ils étaient découverts ensemble, si des gens parlaient, ils ne tarderaient pas à mettre un nom sur le prisonnier évadé et son complice. Rester ainsi à découvert c'était signer leur arrêt de mort. Ils devaient bouger. Mais le Hunter semblait avoir baissé les bras, d'un geste il le repoussa.


- Alex bon Dieu ! C'est pas le moment ! On va continuer ensemble, je ne vais pas t'abandonner si près du but...

Mais ses mots tombaient dans l'oreille d'un sourd. Comment lui faire entendre raison ? Et voilà qu'il lui faisait de pitoyables adieux. Quelle mouche l'avait piquée ? Ils n'avaient pas fait tout cela pour rien. Leurs regards se croisèrent dans la pénombre sans se comprendre. Les paroles du Hunter firent frémir le bicentenaire. Comment pouvait-il penser qu'il parviendrait à vivre avec Julia en sachant qu'il avait laissé son seul ami aux mains de la mort.

- Idiot... Marmonna le Lycanthrope, atterré. Allez, viens... On doit partir...

Dans une ultime tentative pour le raisonner, Gaspard approcha sa main du visage de Alexender et lui attrapa le menton. Il écarquilla les yeux. Bouillant ? Il plaqua durement sa main sur son front et compris enfin que son compagnon n'était plus lui même, il était fiévreux et à moitié délirant. Il était malade, sans force. Le Lycanthrope savait maintenant qu'ils ne pourraient pas continuer ainsi. Il allait devoir trouver une solution tout seul.
Il s'écarta de Alexender, tentant de se faire tout petit entre les poubelles pour passer inaperçu. Au moins son ami avait trouvé une cachette parfaite, dans le creux d'une ruelle entre les immondices. Gaspard crispa la mâchoire. Il sentait que la douleur empirait. Si seulement il avait des calmants il pourrait réfléchir plus posément. Il lui était impossible de porter son ami, il allait devoir le laisser là. Sans perdre un instant, il entreprit de le dissimuler plus encore dans ce piteux décor. Il le cacha le mieux qu'il put sous les détritus en réfléchissant. Il mit bien vite un plan de secours au point et en dit les grandes lignes au Hunter sans savoir s'il l'entendait.


- Tu vas rester ici, caché, immobile. Je t'interdis de bouger. Je vais chercher de l'aide. Grâce à Galyllée et Andrée, j'arrive aussi vite que possible en fiacre. On va te mettre à l'abri mais par pitié, reste ici, ne fait aucun bruit.

Après avoir jeté un dernier regard sur le corps d'Alexender, le Lycanthrope se cacha dans l'ombre et pris la forme d'une fabuleuse chouette harfang. Contrairement à lui, elle était en bonne santé. Ce que le corps de l'un subissait, celui de l'autre n'en recevait aucune séquelle. En quelques battements d'ailes, Galyllée s'éleva dans le ciel, accueillant l'aube comme une traîtresse, repérant l'endroit où ils devraient revenir au plus tôt et se dirigeant au plus vite chez elle.
Pendant le trajet, Gaspard se concentra sur son pouvoir de guérison. Dans le monde des esprits, son don n'était que plus puissant. En si peu de temps ils ne parviendrait pas à ressouder ses os, mais il pouvait au moins effacer quelques bleus et refermer les blessures sur ses paumes.
Une fois parvenu à la Maison des Sorel, le Lycanthrope reprit forme humaine et se faufila dans le passage qui menait à son laboratoire. Il se hâta de prendre des calmants pour atténuer la douleur, il les avala sans eau, trop pressé par le temps et mit le reste dans une poche pour en donner plus tard à Alexender. Tout ça avait un goût infect, mais engloutir quelque chose lui fit prendre conscience qu'il était affamé.
Gaspard monta les marches quatre à quatre et ouvrit le passage de la bibliothèque, il parvint à la chambre de son major d'homme encore endormi à cette heure et ouvrit la porte sans sommation. Il trouva le vieil homme dans son lit, paisiblement assoupit.


- André ! L'appela-t-il sans attendre, réveillez vous, habillez vous immédiatement et sortiez me rejoindre dehors, vous devez conduire le fiacre. Hâtez-vous, c'est une question de vie ou de mort.

Le serviteur sortit du sommeil en sursaut et contempla l'armoire à glace rousse qui se tenait près de son lit en gesticulant. Son cœur avait raté un battement. Quelle frousse ! Puis les mots du géant atteignirent sa raison et il comprit l'urgence de la situation, sans savoir se qu'il se passait réellement. Il sortit du lit d'un bond, il était rare de voir une telle rapidité de mouvement à son âge, avant qu'il puisse prononcer une parole, son maître avait quitté la pièce. A n'en pas douter, tout ça avait quelque chose à voir avec Alexender Von Ravellow. Se pouvait-il qu'il l'ait retrouvé ? Ils ne devaient pas perdre de temps. André se vêtit de sa livrée de la veille, attrapa un manteau et quitta la maison sans plus attendre.
Il trouva Sieur Sorel en train de terminer d'atteler le premier cheval et il se pressa de sortir le second de son box. Quand tout fut prêt, le major d'homme monta sur le fiacre et attendit que Gaspard, qui était partit ouvrir les grilles, fut monté avant de le mettre en branle. En quelques mots, l'aristocrate lui avait expliqué la destination, ils y seraient en quelques minutes, surtout à cette heure où les hommes étaient encore dans leur lit.

Le cœur du Lycanthrope battait la chamade, il avait peur de ne pas arriver assez vite. Il était reconnaissant à André d'être aussi réactif, mais il aurait voulu plus encore, ce qui était impossible. Ses mains étaient crispées sur son siège, parfois il repoussait le rideau de la voiture pour voir au dehors, où ils en étaient, mais il ne se sentirait soulagé qu'une fois Alexender mis en sécurité chez lui.

Enfin ils arrivèrent à destination. La ruelle dans laquelle son ami était dissimulé était trop petite pour y faire entrer le fiacre, ils le laissèrent donc au bout de la rue. A peine la voiture fut-elle arrêtée que Gaspard sauta au sol, manquant de tomber sur un pavé glissant. Les quelques minutes à rester inactif l'avaient revigoré et il courut trouver son ami. Il écarta les détritus de son corps et le mit debout sans ménagement, André ne tarda pas à le rejoindre et ils l'emmenèrent ensemble dans la voiture. Gaspard grimpa à sa suite et le hissa sur la banquette sur laquelle il l'allongea à moitié, les bras ballants dans le vide. A genoux devant Alexender, il entreprit de le tenir tant bien que mal pour qu'il ne tombe pas durant le transport. Le major d'homme menait les chevaux moins vite qu'à l'aller, soit pour ménager leur invité, soit pour passer inaperçu, dans les deux cas c'était une idée bienvenue.
Déjà le Lycan se sentait plus confiant. Ils étaient en train d'échapper aux aux autorités. Ils seraient bientôt en sûreté. Il avait hâte de se trouver entre les quatre murs réconfortants de son laboratoire secret. Il avait besoin de souffler. Mais même là, il ne pourrait pas, il devrait s'occuper de Alexender dont la santé était vacillante. Il priait pour que ça ne soit pas grave, uniquement de la fatigue. André allait les aider, mais aucun d'entre eux n'était médecin et leurs blessures auraient requis plus que ses propres compétences en matière de guérison. Malheureusement ils devraient se débrouiller seuls.

Le fiacre termina sa course dans l'allée de la Maison. Alors que Gaspard poussait la porte de la voiture, André était déjà en train d'aller fermer la grande grille. Le Lycanthrope sortit son ami tant bien que mal de leur moyen de locomotion et le mena en titubant jusqu'à la porte d'entrée qu'il rechignait à s'ouvrir. Ce fut André qui lui ouvrit finalement. Ensemble ils montèrent Alexender au premier étage où ils l'allongèrent pèle mêle sur le lit des invités.
C'est alors seulement qu'un faible sentiment de sécurité et de victoire s'insinua en Gaspard, attelé à soigner son ami, lui même pansé par André. Il confia les calmants au majord d'homme puis souffla du bout des lèvres :


- On a réussi Alex, tu es sauf, alors reprend toi et remet toi vite sur pieds...

Maintenant que tout était terminé, Gaspard se sentait éreinté. Il voulait dormir et cesser d'avoir mal. Il se sentait heureux d'être sorti de cette galère, mais ne parvenait pas encore à s'en réjouir, encore trop effrayé par la suite des événements. Tout avait été trop bancal. Il pensa alors qu'il avait oublié quelque chose d'important : il avait laissé le mur grand ouvert et les barreaux de fortune qui leur avaient permis de descendre. Les autorités sauraient tout de suite que seul un alchimiste était capable d'une telle chose. Encore heureux que personne ne connaisse ce petit secret sur sa personne. Mais c'était une erreur.
Préoccupé, l'aristocrate s'assit au chevet de son ami et attendit son réveil, tandis que lui-même tombait dans les bras réconfortants de Morphée et que son corps s'attelait à se régénérer de lui-même.


[HRP // La suite à la Maison des Sorel au poste le Temps de la guérison //HRP]


Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Gaspar10
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Comte Keï
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MessageSujet: Re: Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Icon_minitimeSam 31 Mai - 10:14

[HRP/ Venant de l'Opéra, post ''Abysses''/HRP]

Chapitre VII - Icare

La lune claire caressait de ses pâles rayons les toits endormis de Londres. Sous quelques lambeaux de nuages déchiquetés, l'astre incomplet tentait ainsi de percer les ombres de la Terre, sa partenaire préférée dans l'immensité cosmique. Les cheminées de la cité crachaient leurs fumées avec paresse, tout était calme en cette heure tardive. Les fiacres reposaient leurs carcasses dans les arrières-cours, les cheveux somnolaient dans leurs écuries, les valets fermaient les derniers volets pour garantir le sommeil et la sécurité de leurs maîtres tandis que les boutiques affichaient leur fameux « closed » et que les allumeurs publics venaient de donner vie aux lampadaires. Les avenues s'étaient déjà vidées, les boulevards résonnaient de leur silence et les parcs avaient fermé leurs grilles de fer. C'était l'heure où seuls les prostituées, les ivrognes ou les convives de quelque bal animaient encore la ville. C'était l'heure des marginaux, l'heure des ombres...

Non loin de la Tour, Martin Stenais, ancien marchand de toiles peintes, aujourd'hui sans le sou, sans toit, sans famille ni ami, errait dans les ruelles avec pour unique compagne sa bouteille de whisky déjà bien entamée. Pourquoi avait-il plongé dans l'alcool ? Cela paraît évident. Lorsque l'on perd tout du jour au lendemain, que l'on est soudainement honni sans raison, que l'on n'a même plus une épaule contre laquelle se reposer et pleurer, l'alcool devient le meilleur moyen d'oublier sa misérable existence, le temps d'une rasade, le temps de deux..., et d'endormir sa douleur. Martin faisait partie de ces gens-là, ces pauvres hères qui n'ont jamais eu de chance et n'en auront jamais.

Titubant comme à son habitude depuis deux ans, l'homme s'appuya contre un mur pendant un moment avant de s'installer sur le rebord d'une fenêtre basse et de porter à ses lèvres le verre glacé de son échappatoire. Il s'essuya la bouche en grognant de plaisir et ramena sur son ventre rebondi sa veste crasseuse.


- Haaa ! Toi ma belle t'es quand même un petit trésor...Fit-il à sa bouteille.

Son petit chapeau ramolli tomba de sa tête. Martin le regarda d'un air hébété avant de se pencher en avant et de le ramasser avec bien du mal. L'alcool lui montait à la tête et cette position lui donnait la nausée. Dans un nouveau grognement, il replaça son semblant de couvre-chef sur son crâne à moitié dégarni et se réinstalla en se trémoussant comme un chat se cale dans un recoin.


- Hmpf...T'vas rester là toi...

Son regard vitreux s'éloigna et tomba sur la Tour. Sa haute silhouette, droite et  massive, jetait son ombre sur tous les bâtiments alentour. Avec un sourire sarcastique, l'ivrogne leva sa bouteille à la santé de la prison. Cette forteresse de pierres sombres pouvait bien avoir la sale réputation de lieu imprenable où les échos de tortures résonnaient encore, à la fois fait pour rendre la justice et pour créer des injustices, où l'on imaginait aisément des milliers de pleurs sanglants et de fantômes ambulants : le Sieur Ravellow ne s'en était-il pas enfui la veille ? Ha ! La belle réputation...envolée ! La honte pour les autorités ! C'était merveilleux ! Les gardiens devaient tirer une de ces têtes ! Adieux l'impénétrable ! Adieux la belle invincible !

- Haha...Y'avait même pas de gardiens ouai ! Les journaux disent n'importe quoi...Comment il se serait barré sinon ? Il avait payé les mecs ouai...Haha ! La corruption mes gaillards! Fit-il en riant tout seul dans son coin en hochant de la tête. Ouai...la corruption...

Martin finit sa bouteille et la laissa glisser au sol à ses pieds. L'objet rebondit sur les pavés sans se briser et s'en alla roulant contre un mur dans un bruit clair. Soupirant d'aise, l'homme frotta son arrière train sur le rebord de la fenêtre et ramena ses mains contre son ventre pour s'endormir en gargouillant dans sa barbe.

- Corruption...ou pire...S'y veut la peau d'la reine y doit avoir des complices...plein d'complices...groumph..kof...kof...F'raient bien de faire gaffe les p'tits auréolés...

Mais alors qu'il fermait les yeux, une silhouette attira son regard sur le côté de l'édifice. Fronçant les sourcils comme pour mieux percer l'obscurité, il observa la forme qui se détachait le long de ses murs, comme si elle était accrochée à la Tour. Les nuages projetaient des ombres sur la façade granuleuse du bâtiment, mais lorsque la lune fit un clin d’œil au monde, Martin se redressa la bouche grande ouverte. Il y avait bien quelque chose ! C'était un homme...ou...une bête...Il ne pouvait le dire à cette distance, mais en tout cas c'était en train de grimper au mur ! Il avait déjà vu quelques singes dans le zoo, à l'époque où il avait encore les moyens de se payer semblable luxe, mais pas de cette taille...Et qu'est-ce que ça faisait là ? Quoi que ce fût, cela avait piqué sa curiosité.
Se levant avec quelques difficultés, l'ivrogne se dirigea vers l'édifice sans quitter des yeux la créature. Mais avec les nuages, elle disparaissait régulièrement et bientôt il la perdit de vue.


*******************

Dans l'air frais du soir, Jirômaru errait, seul et sans arme. La brise crépusculaire s'engouffrait dans le peignoir de soie anthracite qui reposait sur ses larges épaules. Elle caressait sa peau d'albâtre dans un murmure langoureux et nostalgique, comme si ce corps lui échappait une nouvelle fois, cruelle impression...Les longs cheveux blancs du Vampire ondoyaient dans son dos comme les fils de quelque toile d'araignée oubliée. L'être moribond appliquait lentement la plante de ses pieds nus sur le pavé humide de la capitale.
Que cherchait-il ? Rien.
Où allait-il ? Nulle part.
En vérité, le Comte n'avait, pour l'heure, plus aucun but, plus aucune envie. Son souffle rauque agressait chaque centimètre de sa gorge, son cœur battait au ralenti, son regard errait dans les ténèbres.
Il marchait, c'était déjà bien. Lui qui avait failli perdre la vie, sauvé de justesse par un ami qui y avait laissé la sienne...
Comment se le pardonner ?

Jusqu'à présent Jirômaru avait vécu bien des horreurs et traversé le monde en quête de sa propre rédemption qu'il avait transformée en terrible vengeance, mais maintenant qu'il avait trébuché, il doutait. Salluste l'avait prévenu...Ilsa aussi...Ses desseins étaient-ils donc voués à l'échec ? Où était sa place désormais ?

Elle apparut soudainement, ombre parmi les ombres, colosse de rocs et de fer. Le Comte s'arrêta et leva son regard sur elle.


- La Tour...

Son murmure se perdit dans la nuit. Pourquoi ses pas l'avaient-ils conduit jusqu'ici ?

- Mph ! Même comme ça tu me guides...

Son esprit l'avait orienté sans se soucier de sa volonté. S'il s'était écouté, le Comte aurait rejoint le cimetière de Highgate, là où il venait toujours parler avec ses démons, respirer l'humus de la forêt qui envahissait les lieux, là où il avait rencontré Glen O'Sullivan...

Montrant les dents à la Tour, Jirômaru dû se rendre à l'évidence : s'il était sorti de son repaire, c'était pour aller vérifier la cellule de ce Von Ravellow que l'on disait pris puis échappé. Dans un soupir, il s'avança ainsi vers l'édifice.
Passer la grille d'enceinte fut pour lui un jeu d'enfant. Mais lorsqu'il arriva au pied du bâtiment, il aperçut des agents du Yard qui rôdaient. Avec un grognement, il se cacha derrière un buisson sans cependant se presser. Puis, il les observa un moment. Ils étaient trois, silencieux, faisant leur ronde habituelle. Habituelle ? Vraiment ? Le Comte eut un rictus méprisant. Non...Il n'y avait jamais de gardiens ici la nuit, pas dehors, ce n'était qu'à l'intérieur qu'il y avait du personnel, il était bien placé pour le savoir. Alors que faisaient-ils ici ? Espéraient-ils donc que l'Humain revienne dans sa cellule ? C'était stupide !
Levant les yeux vers le ciel, le Vampire respira l'air du soir puis son regard de brume frôla la façade de l'édifice jusqu'à atteindre ce qu'il cherchait : une ouverture béante, tout en haut de cette portion, comme une bouche improvisée pour lui donner vie. Levant un sourcil, le Comte se redressa. Les gardiens étaient en train de lui tourner le dos. Après le gazon, vinrent les gravillons puis la pierre froide. Comme un chat, Jirômaru rejoignit le mur et commença à l'escalader. On eut dit qu'il possédait des ventouses sous les mains et les pieds tant son mouvement paraissait naturel. En vérité, il usait-là de ses capacités vampiriques capables de l'alléger, de le porter, de le maintenir hors de portée de la gravité. Telle une araignée, il étira ses longs doigts entre les pierres et progressa rapidement. Soudain, il rencontra ce qu'il reconnut bientôt comme une échelle. Une échelle faite de pierre...Qu'était-ce que cette folie ? Comment était-ce possible ? Jamais il n'y avait eu semblable objet sur la Tour ! Fronçant les sourcils, il s'aida de ces barreaux imprévus pour continuer son ascension.

Enfin, après quelques longues minutes d'effort, il parvint à l'ouverture. Hissant son corps sur le rebord, il se redressa de toute sa hauteur pour observer la cellule. Rien. Rien hormis de la crasse, une gamelle, un lambeau de tissu...Si. Oui. Une odeur...La sienne...
Nulle doute que c'était bien là la cellule du Hunter. Le Comte reconnaissait son odeur. Se tournant vers l'ouverture dans le mur, le Comte se mit à observer son contour. C'était grossier, plein d'éclats, semblable à une explosion. Ses yeux de brume prirent une teinte jaune et bientôt il vit. Il vit des cheveux roux, des traces de pas, des flots de poussière déplacés. Il vit des empruntes de doigts, des marques d'ongles, un symbole...L'Alchimie ! Mais oui ! C'était évident !

Le Vampire serra les dents. Il avait toujours détesté les Alchimistes. Il les trouvait dangereux, instables, terriblement orgueilleux. Eux qui cherchaient l'immortalité, eux qui réalisaient des expériences interdites sur les corps...Alexender Von Ravellow avait été aidé par un Alchimiste, cela sautait désormais aux yeux. L'échelle dans le mur, cette ouverture, ce symbole...
Jirômaru avait été loin de penser que le Hunter était de mèche avec de pareils hommes, mais maintenant qu'il y songeait c'était l'alliance idéale pour quelqu'un qui souhaitait éliminer les Vampires.


- Petit malin...

Revenant à l'intérieur de la cellule, le Comte examina la porte et écouta attentivement pour deviner ce qu'il y avait de l'autre côté. Des gardiens, des gémissements, de la vie...Inutile.
La brise pénétra dans la pièce et souleva ses cheveux. Dans un soupir, le Vampire se tourna vers l'extérieur. Il était temps qu'il parte. Il avait déjà appris bien assez de choses.
Soudain, son regard redevenu gris vit une plume dépasser de quelques gravats. Soulevant une pierre de la taille d'une main, le Vampire la dégagea. Elle était longue, large et blanche. Ce n'était pas une plume de pigeon...Que faisait-elle ici ? Haussant les épaules, le Comte se tint près du bord, observant la ville tout en caressant son menton avec sa trouvaille.


- Te serais-tu envolé, tel Icare ?

Du fond de sa gorge monta un rire ténu. Au fond, il comprenait que Sarah ait choisi cet homme parmi tant d'autres. Il était plein de ressources, si imprévisible, si buté ! Sa résistance semblait à toute épreuve...

- Jusqu'à présent, c'est moi qui me suis brûlé les ailes...

Son regard d'aigle glissa sur les maisons dont la moitié des cheminées fumaient. La ville pouvait bien dormir, il ne la désirait plus.

*******************

Martin ne cessait de se poser mille et une questions depuis qu'il avait vu cette silhouette sur la Tour. Il s'était approché du bâtiment et avait trouvé un post d'observation. Sans se trouver à la vue des gardiens, éloigné de la grille d'enceinte pour éviter les ennuis, il s'était ainsi installé dans une ruelle adjacente à l'édifice afin de chercher du regard cette étrange créature qu'il avait désormais perdu de vue. L'endroit où elle avait commencé à grimper était visible depuis la ville mais par la suite elle avait tourné un peu et avait disparue.
Frustré, l'ivrogne commençait à se demander s'il n'avait pas rêvé. Après une bonne vingtaine de minutes d'attente, il abandonna. Tournant le dos à ce lugubre lieu, il décida de retrouver son rebord de fenêtre préféré et d'aller y dormir.

Mais, alors qu'il grommelait dans sa barbe que son dernier whisky était mauvais, un frisson lui parcourut l'échine. Il se tourna vivement vers ce qui l'avait frôlé et poussa un cri étouffé. Un homme d'une taille impressionnante se tenait devant lui. Il n'était vêtu que d'un peignoir fin ouvert jusqu'à la moitié du torse. Sa peau était blanche comme le marbre, ses cheveux comme la neige et son regard était vide, vide comme celui d'un aveugle. A la lumière du lampadaire qui se trouvait à quelques mètres d'eux, il pu constater que des taches sombres marquaient son corps.


- Qu...Qui êtes-vous !? Qu'est-ce que vous m'voulez?

Le Vampire lui sourit.

- Tu ne me reconnais pas?

Martin secoua la tête en grognant.

- Nan, j'vous connais pas, j'connais personne moi!

Le Comte s'approcha de l'homme qui recula d'un bond.

- Allons...fais un effort...Tu lis forcément les journaux...

L'Humain plissa les yeux et observa Jirômaru d'un air à la fois terrifié et curieux. Non...Il ne le connaissait pas...Quoique...ces longs cheveux blancs...ce n'était pas courant...Il ressemblait à ce lord prétencieux qui avait fait sa demande de mariage en public et qui avait réchappé de justesse d'un incendie. Mais ça ne pouvait pas être lui. Que ferait-il dans les ruelles à cette heure ? Et dans ces vêtements...

- Tu vois ? Tu es moins bête que tu ne le crois.

- Qu... quoi? Bégaya Martin. Je n'ai rien dit. Je n'vous connais pas. Maintenant filez...J'ai rien pour vous.

- Vraiment? Fit le Comte d'un air désolé. J'ai soif vois-tu...

- Ouai ben j'ai même plus de bouteille alors hein...Bon vent!

Martin s'en alla, furieux d'être tombé sur un farfelu plutôt que de résoudre cette affaire de silhouette. Il avait beau boire plus que de raison, il se considérait moins fou que ce genre d'individu. C'était quoi ces énigmes ? Non, il ne le connaissait pas.
Mais à peine avait-il esquissé quelques pas que le colosse lui attrapait l'épaule pour l'obliger à lui faire de nouveau face. Le pauvre homme se débattit aussitôt.


- Hola ! Hola ! M'touche pas ! J'te connais pas j'tai dit, vas demander à quelqu'un d'autre!

Une main le saisit à la gorge, l'autre enfonça ses ongles dans son épaule et des crocs d'ivoire percèrent sa jugulaire. Dans un cri, Martin tenta de repousser le Vampire mais ce dernier avait une force considérable par rapport à lui. Le Comte aspira une infime partie de la vie de cet homme, mais il arrêta son geste. L'alcool coulait à flot dans son sang et altérait sa qualité déjà médiocre. Laissant sa victime à terre, Jirômaru s'en alla sans plu lui accorder la moindre attention.

Martin vit ses pieds nus passer devant son regard et s'éloigner sur les pavés crasseux de la ruelle. Que lui était-il arrivé ? Cet homme l'avait mordu ! Il avait mal à la gorge mais il était encore en vie...Fermant les yeux, il sombra. Quelle soirée...Le Vieux Tom l'avait pourtant déjà prévenu...


[HRP/Suite près de l'Orphelinat, dans le post "Blanches ténèbres"/HRP]


> Jirômaru Keisuke <

Plumes entre les barreaux [Alexender, Gaspard] [05/04/42] Comte_10

Shakespeare, Macbeth, I, 4, 1605 :

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