1834 : « Tu sais... Lisa a bien grandi... »
Les semaines s'écoulaient, laissant grandir les deux enfants sans leurs parents. La nourrice était partie lorsque
Celimus atteint la majorité. C'était triste mais c'était ainsi : la fortune familiale était au plus bas, plus aucune richesse, presque plus rien. En revanche les enfants avaient été bien élevés et se comportaient de manière exemplaire. La boutique de Mary-Jane était restée intacte niveau architecturale et mobilier, seuls les tissus, les mannequins de fers, ainsi que les corsets, les bonnets et les chapeaux avaient disparu. Tout avait été vendu et le magasin avait donc fermé. Personne ne pouvait s'en occuper et Lisa n'avait pas appris le corps du métier. Cependant cela appartenait toujours à la famille
Adam, le jeune homme ne désirait point vendre ce qui était à sa mère mais aussi ce qui pouvait lui servir plus tard.
Celimus avait donc dix huit ans et l'âge de se marier ainsi que d'avoir des enfants. Sa fiancé avait finalement était promise à un homme plus fortuné que lui mais cela ne lui faisait rien. Il ne l'avait entrevue que deux fois et les manières de la demoiselle n'étaient pas pour lui plaire. Ce n'était pas le genre de femme qu'il aimait avoir à ses côtés. Il fallait également dire qu'il ne s'était pas battu pour devenir son mari, il l'avait laissée partir comme le fleuve laisse s'écouler l'eau. Il aurait presque pu lui faire un signe de la main de loin pour lui dire adieu, mais voilà il ne l'avait pas revu et les parents de la petite bourgeoise adoptaient un comportement des plus désagréable envers le jeune homme.
Sa soeur se métamorphosait en une jolie et charmante jeune fille. Qui ne l'aurait pas aimé aurait été un homme damné. Sa gentillesse et sa douceur étaient les mêmes que sa mère, aussi bien qu'il la chérissait tout autant voir plus.Elle, avait quatorze ans, elle avait l'âge d'être promise à un jeune homme.
Celimus la trouvait beaucoup trop jeune encore mais quoi de plus normal comme réaction lorsqu'il s'agit d'un grand frère ?
C'est alors qu'elle arriva, une lettre qui semblait provenir du Nouveau monde de par l'adresse mais également l'enveloppe. Le jeune homme s'était renfrogné, elle provenait de son père et s'adressait à lui. Simplement elle ne le concernait pas tellement, la lettre indiquait uniquement le fiancé de la jeune Lisa. La belle, quant à elle, ne pensait plus qu'au jour où elle rencontrerait son prétendant. Pourquoi son père s'occupait-il de ç
a après tant d'années ? Pourquoi avoir envoyé une lettre ? Lisa était promise à un petit bourgeois commerçant mais aussi artiste.
Celimus ne l'acceptait pas, après tout elle restait sa petite sœur d'amour ! Le jeune homme ne comprenait toujours pas pourquoi son géniteur ne revenait pas à la maison. Comme preuve qu'il ne rentrera jamais, il y avait lu un petit mot dans la lettre. Un petit mot à son égard. La demeure familiale appartenait désormais à
Celimus. Fort bien... Sa haine envers son père grandit. Il avait abandonné Mary-Jane et maintenant ses propres enfants. C'était inconcevable... En réalité la honte ainsi que la culpabilité tiraillaient Warren, il se trouvait indigne de revoir ses enfants, ils lui en voudraient à coups sûrs et il ne pouvait pas leur révéler la présence d'une certaine magie que l'on nommait l'alchimie. Il ne savait pas si elle était dangereuse et cela l'inquiétait. Il ne désirait pas qu'un jour ses enfants tente une expérience à l'aide de cette pratique douteuse. Cette honte qui l'envahissait le brûlait de tout son être, sa femme... Son épouse, celle qui avait peuplé sa vie de bonheur, elle n'était plus depuis six ans. Il l'avait perdu, il n'avait pas réussi à la sauver. Warren avait été un faible et désormais il est devenu un lâche. Un lâche à ses yeux mais aussi un lâche aux yeux des êtres qu'il avait crées. Il ne pouvait plus se permettre de retourner les voir. Il avait été trop idiot pour être parti et croire qu'il aurait pu la sauver. Qu'adviendrait-il de son fils
Celimus ? Que ferait-il de sa pauvre carcasse ? Il l'assassinerait, lui sauterait à la gorge, de ç
a il en était presque certain. Oui, ses enfants devaient lui en vouloir terriblement mais il lui manquait ce que l'on appelle le courage. Le courage de faire face à son fils devenu homme. Le courage de faire face au cercueil de sa bien aimée et de son modèle réduit, leur fille Lisa.
La vie continua pour le médecin qui envoyait perpétuellement un bout de son salaire à son fils mais aussi à sa fille. Ils ne le savaient pas mais étant endettés ils devaient payés. L'argent que leur envoyait donc Warren servait à ç
a.
Celimus n'avait même pas conscience que leur père leur faisait transmettre une part de son gagne pain. Non, il pensait qu'il n'avait rien d'autre à payer que la nourriture, les matières premières ainsi que les vêtements. Son métier n'était pas des plus simples. Il s'occupait des rescapés des guerres ou bien des soldats malades. Bien de nombreuses fois il faillit attraper une de ces bêtises qui rôdait dans les camps. Les soldats revenaient presque toujours blessés, mutilés, les temps étaient durs pour ceux qui combattaient. Les piqûres d'insectes se faisaient également plus fréquentes et transmettaient des maladies. De ç
a, le père de famille déchu en était sûr.
1835 : « nous avons eu de la chance par rapport à certains enfants Maman »
Un an s'était écoulé,
Celimus vivait seul auprès de sa sœur. Les temps recommençaient à être dur. Le jeune homme travaillait, tantôt en tant que tanneur, menuisier, charpentier. Il ne se mettait jamais à son compte, il effectuait simplement quelques petits remplacements pour gagner sa vie même si ce n'était pas son rêve depuis tout petit. Il avait songé alors à s'enrôler dans l'armée mais sa sœur était encore sous son aile, il ne pouvait la laisser vivre seule. Londres n'était pas une Capitale des plus sûre pour une demoiselle seule à la maison. Il voulait être là pour la protéger quoiqu'il arrive. Ainsi il travaillait même à WhiteChapel tentant d'esquiver les lieux infectés de maladies. Il effectua tous les petits travaux durs et laborieux de la basse classe mais ç
a lui permettait de vivre, alors il ne rechignait pas et faisait de son mieux pour plaire à ses employeurs. Beaucoup n'étaient pas des plus aimables et il devait bien l'avouer, certaines pulsions meurtrières l'envahissaient mais il passait outre et tentaient de les oublier. Un jour, il fut même embauché dans un café pour tenir le rôle de serveur. Il devait bien avouer que cet emploi lui plaisait bien plus que tous ceux qu'il avait fait. C'était nettement moins embêtant mais il rentrait chez lui plus tard également. Cependant sa tenue vestimentaire lui convenait. Ce n'était pas un café de la haute noblesse. Il était placé de telle sorte à ce que ceux qui rentraient du travail y fasse une halte pour se détendre. Il y voyait généralement des petits bourgeois commerçant ou bien des ouvriers un peu plus fortunés que la normale. L'ambiance y était agréable et non mesquine, l'argent n'y coulait pas à flot et il n'y avait généralement aucune altercation. Le café se trouvait à proximité de St Katharine's Docks donc au port.
Sortant du café, il enfila sa veste sombre qu’il boutonna légèrement laissant le col ouvert. Il n’y avait qu’une petite bise pour venir lui caresser le visage. Il sentait légèrement la bière. Il s’était payé de quoi boire avant de partir du travail tard, il devait être deux heures ou trois heures du matin, tout restait encore un peu confus. Un homme vendait à la sortie du pain et d’autres petites nourritures. Sortant son pourboire il se paya un pain. Il avait faim, il n’avait pas mangé de la soirée. La nourriture froide entre ses mains et légèrement rassied sentait tout de même agréablement bon. Ce marchant était bien placé, juste à la sortie du café pour que les employés viennent lui acheter ce qu’il avait à leur offrir. Il était malin le vieillard et se faisait de l’argent ainsi ! Ce n’était pas le meilleur pain de Londres mais cela apaisait les estomacs tard le soir. Sa récompense du soir sous le bras il observa quelques instants le fruit de son dur labeur avant de ranger les pièces dans une bourse. Quelques mètres plus tard
Celimus se raidit, il sentait un regard peser sur sa nuque, qui cela pouvait bien être ? Il porta sa main à son couteau de poche avant de se retourner doucement en apercevant deux petits yeux verts qui l’observaient. Un enfant très certainement, mais que faisait-il là le soir si tard? Il inclina doucement la tête sur le côté avant de se rapprocher. Il ne vit qu’une lumière étincelante et entendit un son métallique se répercuter dans la rue. L’enfant s’était jeté à tard en tenant un couteau droit devant lui en tremblant. Ses cheveux crasseux encerclaient son visage maigre. Sa peau était noircie par la saleté des rues de la capitale. Ses yeux étaient furtifs, voir craintif.
A une distance respectable le futur loup-garou se baissa à sa hauteur et lui montra son pain. Il tenta de le rassurer avec sa voix, lui disant qu’il ne lui voulait pas de mal. Il posa sa même son propre poignard à terre et rompit le pain.
Celimus lui tendit alors le morceau. Il en gouta un morceau comme pour lui montrer que c’était bon et non pas empoisonné avant de le lui lancer. L’enfant l’attrapa le pain et le porta à sa bouche directement.
- J’en ai encore si tu veux mon garçon, regarde…
L’enfant continua de manger et eut un petit grognement craintif lorsqu’il vit
Celimus à quelques centimètres de lui cette fois-ci. L’homme lui tendit alors la main en souriant. Hésitant, il le détailla de la tête aux pieds avant de déglutir et de poser sa petite main dans la sienne. Il ne devait pas avoir de dix ans. Le ramenant doucement contre lui il lui promit alors de veiller sur lui. Le gamin n’avait qu’une vieille chemise ainsi qu’un pantalon de soie troué en guise de vêtements. Il n’avait pas de chaussures bien trop longtemps petites pour lui. Il lui offrit alors sa veste et le porta comme une princesse. Ce fut le début d’une longue amitié.
1836 : « je ne pensais pas lui faire honneur un jour »
Le jeune garçon était à la maison depuis bien un an maintenant, ou peut-être un peu moins. Lisa et
Celimus s'en étaient occupés comme s'il s'agissait de leur petit frère. Celui-ci s'était montré d'une très grande amabilité et avait montré au maître de la maison qu'il pouvait également se montrer très doué dans le maniement des armes à lame. Il avait appris à bien se tenir et à se montrer respectueux. Ils leur avaient donné un nom, simple, mais cela devrait faire l'affaire. Le gamin s'appelait donc Nathanael. On lui aurait demandé son nom de famille l'enfant n'aurait pas hésité une seconde. Il faisait désormais parti des leurs et se considérait donc comme un
Adam. Le petit devait avoir désormais neuf ans, il ne se rappelait pas vraiment de son enfance, en réalité il ne se souvenait pas d'avoir été présenté à un orphelinat un jour. Ses parents avaient été, selon ses dires, des pauvres fermiers qui un jour lors d'une petite visite à Londres en avaient profité pour le laisser. Cela leur faisait moins de soucis et ils avaient déjà trois autres bouches à nourrir, ce qui était assez complexe pour eux. Tout semblait aller bien, bien que
Celimus devait travailler un peu plus et faire des heures supplémentaires pour que l'enfant ne manque de rien. Il s'habituera bientôt à travailler d'arrache-pied pour les enfants.
Les nouvelles du Nouveau Monde ne tardèrent pas à arriver en Angleterre. Suite à une dernière opération militaire, de nombreux blessés avaient rapporté des maladies ainsi que des bactéries des pays environnant.
Celimus avait reçu une lettre le 18 juin 1836... Elle apportait certainement des mauvaises nouvelles. En effet, elle lui rapportait la mort de son père, médecin dans l'armée. Ils n'avaient pas pu bien identifier les causes du décès, mais dans des temps comme ceux-ci on n'y faisait pas réellement attention. Une infection avait alors été supposée, peut-être avait-il été touché par les bactéries ? Toujours en était-il qu'après son service le médecin avait déclaré avoir de la fièvre et des douleurs musculaires. Il n'avait survécu qu'une semaine...
Un enterrement fut donc organisé. Le corps de l'homme fut enfermé dans un cercueil et rapatrié en Angleterre. Les préparation de la cérémonie durèrent deux mois environs. Ce ne fut que le 10 Août que son corps rencontra enfin la terre du cimetière.
Celimus avait été présent en compagnie de sa sœur. Le gamin était venu également. L'annonce de sa mort ne lui avait fait ni chaud ni froid. Ils avaient tous été abandonnés... il n'eut qu'un regret, ne pas l'avoir tué de ses propres mains. Il lui avait fait cependant honneur. L'homme avait emporté ses secrets dans sa tombe.
Celimus ne s'était rendu à l'enterrement que par respect pour s sœur qui elle avait légèrement pardonné à leur géniteur leur abandon. Son père étant mort tout lui revenait donc, il était le fils légitime et héritier des terres bien qu'ils ne possèdent presque plus rien...
Décembre 1837 « Je ne finirais peut-être jamais père mais j'aime les enfants autant que toi Maman. »
Le décès du père de famille n'avait pas été une nouvelle qui les avait fait sauter de joie malgré leur ressentiment face à ce géniteur qui s'était permis de les laisser seul dans la société lugubre de Londres à cette époque. Le mariage de sa sœur avait chamboulé légèrement son petit quotidien de grand frère protecteur. Il était vrai que le promis avait souvent rendu visite à Lisa mais
Celimus ne s'était jamais imaginé la voir partir avant lui. Il n'avait aucune épouse ni future promise, il se retrouvait délibérément seul sans qu'il ne puisse y faire réellement quelque chose. Heureusement Nathanael était là, il l'aidait dans les tâches quotidiennes de la vie et s'occupait de faire du ménage lorsque le maître partait. Il revenait parfois tard le soir et s'endormait dans le fauteuil du salon sans pouvoir saluer
Celimus. Celui-ci ne le laissait jamais bien longtemps parmi ces coussins et préférait l'allonger dans un lit. Il dormait avec lui en attendant de trouver un petit lit pour qu'il puisse se reposer seul. Cela ne dérangeait pas le jeune homme qui appréciait la compagnie. Être seul l'oppressait, il avait besoin de compagnie. Ce petit garçon avait l'air nettement plus courageux que lui. Il éteignait les lampes sans avoir peur par la suite du monstre qui pouvait sortir du placard ou surgir d'en dessous du lit. Mr
Adam était fier de voir son petit garçon ainsi. En même temps il avait bien grandi. Il avait même réussi à lui apprendre à lire écrire et compter ! Pour son plus grand désespoir Nathanael ne s'intéressait pas vraiment à la littérature. C'était d'un réel dommage.
Formé par un maître d'armes
Celimus savait parfaitement manier toutes les lames possibles et inimaginables, il aimait d'ailleurs beaucoup cela et s'occupait lorsqu'il ne travaillait pas à perfectionner son art du combat. C'est ainsi que vers le mariage de sa sœur il prit la fonction de maître d'armes et enseigna donc cet art aux personnes qui désiraient savoir se défendre. Il s'occupait bien souvent d'enfants de petits nobles ou de bourgeois lorsque leur père respectif n'était soit pas à même de se battre ou bien de s'occuper de leur progénitures.
C'est ainsi qu'il travaillait parfois à domicile, laissant Nathanael s'occuper de la maison. Il lui avait trouvé une occupation pour les journées où il ne pouvait pas être là. Après avoir ouvert le carnet de son père pour au moins la millième fois de sa vie il se lanç
a dans la médecine par les plantes. Du moins... il vendait des baumes, des onguents, des mélanges de plantes lorsqu'il n'était pas là.
Celimus avait appris tout ce que son père avait su autrefois. Ainsi intimement il connaissait les secrets de la médecine et aurait pu se proclamer médecin. Mais cela aurait été trop encombrant pour lui. Il soignait ses blessures et celles du petit c'était déjà bien, il ne voulait pas s'occuper des autres, cela l’agaçait au plus haut point. Beaucoup de clientes se rendait dans la boutique de la mère à
Celimus, elles venaient régulièrement pour des petits problèmes et cela compensait le manque d'argent des deux jeunes hommes. Il leur fallait vivre convenablement tout de même !
Le jeune homme éduquait un futur marié à Trafalgar Square. Un soir qu'il rentrait chez lui, son sabre sur le flanc gauche, il prit la direction de Whitechapel. Il avait ramassé pas mal d'argent ce soir là, peut-être pourrait-il se faire un peu plaisir avec Nathanael et s'acheter un beau morceau de viande dans l'abattoir ? Il paierait cher, de ç
a il en était sûr mais il désirait au moins que le gamin mange bien. Ainsi il s'arrêta dans l'abattoir le plus propre du quartier (ce qui n'était pas tâche aisée à trouver) et en ressortit avec des bons morceaux de bœuf, de quoi tenir pendant une semaine à deux ! Il allait traverser un petit pont lorsqu'il s'arrêta soudainement, sa viande empaquetée dans un drap à carreaux. Il fronç
a les sourcils et distingua alors une silhouette recroquevillée sur elle-même dans l'obscurité. Il s'approcha d'elle. Elle recula et s'enfonç
a dans les profondeurs de l'obscurité. Se pinçant les lèvres, il observait l'enfant. Car oui c'était une petite fille qui devait être âgée à peine de sept ou huit ans. Elle était maigre et craintive. Un peu enfant sauvage. En réalité elle grognait et se déplaçait presque comme un animal mais elle avait reçu une éducation. Elle se comportait simplement comme les chiens et les rats pour se protéger. Finalement, le voyant respecter une distance convenable elle montra son propre corps et s'exclama « Elia. »
Celimus fit de même pour se présenter et elle finit par se loger dans ses bras en tremblant de froid. Il avait plu la veille, l'enfant avait réussi à survivre, il ne savait par quel miracle... Elle ne portait que des haillons ainsi qu'une vieille couverture. Ainsi il la ramena à la maison. Après l'avoir décrassé il prépara à manger et nourrit les deux enfants qui ne tremblaient pas de froid mais bien de faim. Il remarqua alors qu'elle ne se jetait pas sur la nourriture. Elle restait silencieuse et bien éduquée. Après un petit signe de la main et des paroles apaisantes elle commenç
a à manger avec rapidité manquant de s'étouffer à quelques moments. Nathanael se mettait à rire et lui servit un verre d'eau en lui demandant de faire attention sinon elle n'arriverait pas à digérer correctement. Plus tard elle leur annonç
a qu'elle venait de s'enfuir d'un orphelinat, cela ne faisait que deux semaines qu'elle traînait dans les rues.
Les prochains jours, semaines et mois se déroulèrent à merveille. La petite fille avait sympathisé avec leur deux nouveaux amis. Entre temps
Celimus avait fait la connaissance de Rosa, Anne-Marie et Gabriel. Cela formait une véritable petite famille. Le jeune homme en avait besoin, il avait tout perdu, sa mère, son père, sa fiancée et sa sœur qu'un homme lui avait arraché... Il ne restait plus qu'eux, des êtres innocents qu'il fallait éduquer et nourrir. Cela ne dérangeait pas ce futur loup-garous qui s'en occupait comme s'il s'agissait réellement de ses propres bambins. Il les aimait tellement... Aussi réalisa t-il la cruauté de la vie... Combien d'orphelin était encore dans les rues ? Ils ne demandaient qu'à être adopté et la plupart était lâchement abandonné par la moitié de la population londonienne.
Celimus trouvait cela des plus injustes, chaque enfant devrait avoir une famille, l'Angleterre devrait faire quelque chose ! Il trouvait cela honteux que des milliers d'enfants restent dans les rues ou bien encore sans parent ! Combien en mourrait chaque années ? Non mieux, combien périssait chaque jour des maladies et du manque de nourriture ?
1838 : « je ne m'attendais pas à cela... je me haïrais toute ma vie »
Tout semblait bien se passer entre ces jeunes gens. Chaque enfant prenait part à la vie de la maison.
Celimus avait été forcé de travailler beaucoup plus. Il n'avait pas les moyens de nourrir tous ces enfants mais au moins ils avaient un lit, des vêtements et du pain. Parfois de la viande et très souvent des légumes. C'était moins cher... les pommes de terre étaient à portée de main, à vrai dire la petite ferme de
Celimus possédait comme un grand potager dans lequel ils cultivaient d'excellent légumes. Ils en avaient besoin. Il fallait qu'ils vivent tout de même !
Celimus, quant à lui, avait du proposer ses services en tant que mercenaire. Il tuait pour de l'argent. Cela ne lui rapportait pas beaucoup, il s'agissait quelques fois de simples informations ou observations : une femme qui trompait son mari, un transfert de marchandise, une affaire de vol. Il ne tuait pas forcément mais quand cela lui arrivait il gagnait assez bien sa vie. Seul Nathanael était au courant, pas pour les meurtres mais pour le reste. Ainsi il ne s'étonnait pas de voir son ami rentrer avec un beau morceau de viande ou de nouveaux vêtements pour les enfants.
C'était en juin que se passa le drame. Le froid avait laissé place à une certaine chaleur dissimulée sous les affreux nuages bas et grisâtre de Londres. Ne pourraient-ils donc jamais apercevoir les rayons du soleil ? Cela n'avait pas empêché la petite troupe de s'en aller en direction d'un lac. Ils avaient demandé service à un ouvrier qui passait à cheval avec une immense charrue. Il les avait transportés jusqu'à la lisière de la forêt et était venu les chercher au courant de la soirée. Les enfants avaient passé leur journée dans l'eau, cela leur faisait du bien, heureusement elle n'avait pas été très fraîche et même Anne-Marie avait osé s'y aventurer.
Celimus avait partagé ce petit moment avec eux, cela leur faisait du bien à tous. Un jour il leur construirait une cabane pour y passer un jour ou deux, cela les détendrait. Ils avaient besoin de passer un moment au calme une fois de temps en temps... c'étaient tout de même des enfants !L'homme était donc revenu, la nuit allait presque tomber et la lune était bien haut dans le ciel... Elle s'était arrondie comme pour sourire aux habitants de la ville, comme pour les illuminer dans leur affreuse soirée. Les enfants grimpèrent un à un dans la charrue tirée par deux chevaux... Puis une petite touffe de cheveux s'éloigna du groupe en courant.
Celimus sentit son cœur battre la chamade, mais où allait-elle ? Il jeta un regard entendu au fermier qui lui laissa un de ses chevaux et partirait pour la ville avec les enfants si le jeune homme ne revenait pas dans les dix minutes qui venaient. Il s'en alla alors en courant à la poursuite de la jeune Elia. La jeune fille était repartie vers le lac précipitamment. En réalité elle avait oublié quelque chose... Une chose assez précieuse à ses yeux... Un bruit se fit entendre alors qu'elle se penchait vers le bord de l'eau. Puis un autre. Soudain un cri perçant arriva jusqu'aux oreilles du jeune homme qui se figea d'effroi. Il hurla alors à plein poumon :
- ELEA !!!! ELEA !!!!
Mais rien... Elle ne lui répondait pas elle continuait de crier, non de s'égosiller... c'était de la peur... De la souffrance, de la douleur. Puis le silence se fit, lourd et pesant. Lorsque
Celimus arriva l'enfant était à terre. Une plaie béante au niveau de l'estomac. Elle se tenait le ventre comme elle le pouvait et le regardait d'un air effrayé. Elea respirait difficilement, à chaque fois que ses poumons s’emplissaient d'air elle poussait un gémissement et aussitôt le sang abondait un peu plus de son corps. La suite restera un souvenir flou pour
Celimus. Une créature étrange avait alors surgit de nulle part, entravant son chemin alors qu'il allait rejoindre l'enfant. Celle-ci sembla lui sauter à la gorge et le mordit. Il ne se souvint que de la douleur fulgurante. Un coup partit. Il venait de faire feu, son pistolet à percussion au niveau de la poitrine de l'immense loup. De l'argent, oui... Il avait un beau jour, après un duel entre gentilshommes, trouvé deux balles d'argent. Encore abasourdi par la détonation de son revolver il réussit à repousser le corps. Un cri s'évada de sa gorge. Devant lui se tenait le corps de l'enfant, pantelant, presque sans vie sur le sol. Elle respirait faiblement. Il avait tiré de trop prêt, la balle avait traversé le corps du monstre pour venir se loger dans celui de l'enfant. La gamine le regarda avec incompréhension. Elle écarquilla les yeux sous l'effet de la douleur et tandis qu'il la prenait dans ses bras et tentait de compresser la blessure elle lui logea dan la main un petit bracelet de perles vertes. Des jades.
Celimus lui avait fait cadeaux de ces quelques perles pour qu'elle s'amuse avec et fasse de jolis bijoux. Bracelet que
Celimus gardera toute sa vie.
A partir de ce jour il se haït. Il haït le monstre qui avait attaqué sa petite fille. Ce monstre qui, par la même occasion, l'avait fait devenir une créature abominable lors des soirs de pleine lune. Elea fut enterrée, dans le jardin, sous un rosier, en souvenir de son amour pure et de son innocence. Par manque d'argent elle n'eut pas de sépulture à la hauteur de ce qu'elle était.
Celimus avait fait de son mieux pour lui offrir un repos éternel. Elé
a était morte et une partie de
Celimus s'était envolée avec elle.
1839-1842 : « j'ai finalement réussi à dompter cette malédiction qui me pèse... Seras-tu un jour fière de moi Maman ? »
Les mois se sont écoulés après la mort de cette tendre enfant.
Celimus se sentait toujours autant coupable... Il l'avait achevé... peut-être était-ce bien mieux ainsi ? Elea avait lentement souffert quelques secondes avant sa mort, peut-être que ce coup de grâce avait été une sorte de bénédiction pour elle ? Toujours en était-il qu'il se considérait plus que jamais comme un meurtrier, il avait tué son deuxième petit orphelin... Son ami en quelque sorte, sa petite sœur... Il se haïssait et cela ne changera plus jamais. Désormais il oubliait son père, sa lâcheté, il se considérait bien trop comme un monstre pour pouvoir juger à nouveau cet homme. Cependant les enfants avaient réussi à le divertir. Il les aimait vraiment. Seul Nathanael connaissait la vérité. Chaque nuit de pleine lune
Celimus s'attachait, sa première expérience en tant que loup-garou avait été des plus monstrueuses. Cette nuit-là il s'était attaqué à un jeune homme près du port. Cela avait été affreux... immonde, il se souvenait encore du goût du sang...
Trois autres enfants avaient rejoint la brochette de bambins. Un petit qui se nommait Flitz et des jumeaux Maxime et Herman. Tous s'entendaient à merveille. Dans le courant de 1839,
Celimus apprit l'ouverture d'une excellente fabrique d'armes. Il lui en fallut bien peu pour s'y précipiter et admirer tous les fleurets présents. Après y avoir fait quelques emplettes il discuta avec le patron de l'entreprise. Un brave gars. Les deux jeunes gens paraissaient bien s'entendre. L'affinité n'était pas encore présente. Quelques temps plus tard ils se rencontrèrent sous leur forme lupine, ce fut le début d'une grande amitié. Les deux hommes s'invitaient assez régulièrement et ce qui réchauffait le cœur du jeune homme fut de voir l'amour que portait Francis aux enfants. Au moins quelqu'un le comprenait. Quelqu'un comme lui .
[passage à revoir après le(s) rp(s) flashback.]