L'Ombre de Londres
Bienvenue sur l'Ombre !

La capitale vit dans le chaos : les Vampires complotent toujours, les Hunters s'allient et s'organisent, les Alchimistes se révèlent, les Lycanthropes se regroupent et les Loups-Garous recommencent à tuer !

Citoyen de l'Ombre, te voilà revenu dans nos sombres ruelles...

Bon jeu !
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Forum RPG - Londres au XIXème siècle. Incarnez Vampires, Loups-Garous, Lycanthropes, Homonculus, Chimères, Alchimistes, Hunter...et choisissez votre camp dans une ville où les apparences n'ont jamais été aussi trompeuses...
 
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Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42]

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Comte Keï
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Comte Keï
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Date d'inscription : 01/11/2007
Race : Vampire
Classe sociale : Aristocrate
Emploi/loisirs : Lord / Comte de Scarborought / Metteur en scène
Age : 589 ans
Age (apparence) : 28 ans
Proie(s) : Les Humains (pour se nourrir), les Vampires (secret)
Secte : Indépendant
Clan : Ventrue
Lignée : Kyasid (les ombres)
Rang Pyramidal : Premier
Crédit Avatar : KH_CT
Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Empty
MessageSujet: Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Icon_minitimeSam 8 Mar - 9:40

[HRP/ De retour de « Rêve écarlate »/HRP]

Chapitre I – Dévoration

Les catacombes. Funeste lieu pour de funestes desseins...

Sous les pieds des londoniens grouillait en réalité une incroyable quantité de créatures étranges et menaçantes. Leurs pires craintes n'osaient pas encore en définir les affreux visages mais, d'instinct, ils évitaient ces souterrains nauséabonds. Même les pauvres ères sans toit n'y cherchaient plus refuge depuis longtemps. Une « ombre » s'y « terrait » et il fallait « être fou » pour descendre dans sa gueule pleine de crocs. Étrangement, les croyances populaires faisaient de cet espace entre le monde des vivants et celui des morts des récits qui n'étaient pas très loin de la réalité. Persuadés que des monstres y rôdaient, de jour comme de nuit, plus personne ne se sentait assez hardis pour y traîner ses frusques. Même les Hunters de ce siècle redoutaient ces tunnels humides et, depuis que la grande époque de leurs chasses groupées était terminée, depuis que la Guilde s'était tue, aucun n'avait tenté d'y pénétrer pour traquer leurs pires ennemis : les Vampires.
Car c'était bien là un nid de Vampires, ces créatures buveuses de sang, incommodées par le soleil, auxquelles l'ont prêtait volontiers tous les plus grands complots du monde. C'était même un haut lieu chez ces immortels, le siège d'une partie de la Camarilla, cette secte qui prônait l'utilité des Humains autant que leur infériorité, protégeant leurs trop jeunes yeux grâce au secret de la Mascarade. On y trouvait quelques grands noms, quelques légendes également, mais aussi et surtout de piètres pantins qui se croyaient tout aussi importants que leurs vieux congénères, des infants, des disciples, des goules...tout un ramassis de longues dents sans âme.
Pour comprendre le fonctionnement des catacombes, il fallait y être invité par l'un des résidents, posséder un certain statut ou avoir eu l'audace de s'y présenter un beau jour pour « affaires ». Sans cela, des entraves étaient disposées de telle sorte que l'entrée devenait impossible. Maîtres des illusions, ses gardiens égaraient les imprudents et les rejetaient à l'extérieur sans qu'ils ne comprennent comment ils avaient cheminé jusque là. Parfois, les indésirables disparaissaient et l'on n'entendait plus jamais parler d'eux. Ici, les lois vampiriques s'appliquaient avec vigueur. Malheur à celui qui prétendait faire sa propre loi dans le domaine des puissances qui résidaient là !


****************

Jirômaru était déjà dans un tunnel.

Ses grandes bottes cirées faisaient résonner ses pas contre les murs arrondis qui l'environnaient. Passer les gardiens n'était, pour lui, qu'une formalité comme une autre car, si aucun membre du Sabbat n'avait droit de séjour ici, les Indépendants, eux, étaient tolérés dans une moindre mesure. Mais surtout, lui était en outre le Prince de la ville, leur maître à tous ; il avait le droit d'inspecter chaque parcelle de son « territoire » : nul ne pouvait s'y opposer sans trahir la fidélité jurée à leur arrivée. L'hospitalité accordée par une telle figure demandait toujours une contre-partie : celle de la transparence. Évidemment, le Comte n'était pas dupe. Qui le serait dans sa situation ? Nombreux étaient les Vampires qui ne s'étaient pas présentés devant lui à leur arrivée, partant de là, nombreux étaient sans serment. De même, bien des infants étaient nés sans avoir été identifiés, c'était inévitable. Imaginer que le contrôle entier de ses confrères lui était possible relevait de la naïveté la plus stupide. Mais le Comte était cependant certain d'une chose : les Vampires de la Camarilla le craignaient et le respectaient. Malgré les complots réguliers que fomentaient certains crétins de la secte pour l'éliminer, ce dont il n'avait généralement cure, la plupart d'entre eux respectaient encore les lois ancestrales. Sa qualité de doyen en faisait toujours la figure d'autorité principale, qu'elle soit appréciée ou non.

A l'entrée des catacombes, son ombre avait donc jeté à genoux les gardiens. Ils n'étaient pas assez fous pour s'opposer à son arrivée, même si ces derniers temps avaient malheureusement accéléré les tensions entre lui et la Camarilla. Jirômaru n'était pas idiot, il savait que sa présence, rapidement annoncée, allait remuer la boue de ce marais stagnant et provoquer quelques vagues, mais c'était bien volontaire. Les grands pontes de la secte allaient crier au scandale et craindre pour leurs vies le temps de sa visite tandis que leurs disciples allaient se retrouver perdus entre deux puissances, incapables de décider de leur allégeance. Il était temps qu'il leur rappelle son statut ! Certes les dirigeants de la Camarilla semblaient avoir découvert une partie de ses plans machiavéliques mais ils erraient encore dans la brume et, même s'ils spéculaient, aucun n'avait réellement compris l'ampleur de sa traîtrise prochaine. Beaucoup la sentaient mais personne ne l'estimait à sa juste valeur. Autant les intimider d'avantage, cela les ferait réfléchir à deux fois avant de risquer leur peau dans une éventuelle bataille. Jirômaru comptait bien continuer d'insinuer le trouble dans leurs rangs. La soumission par la peur. C'était ainsi qu'il allait opérer. Par la peur et le doute. Oseraient-ils continuer leurs petites investigations à son encontre après ce passage dans leurs quartiers ? Tous comprendraient que c'était un avertissement...

Sur son passage, les Vampires qu'il rencontrait dans les « ruelles » souterraines s'arrêtaient pour le saluer humblement. Courbettes, murmures, coups d'oeil rapides, sourires feints ou non, les membres de la Camarilla ne souhaitaient pas d'incident politique. La plupart d'entre-eux respectaient naturellement le Comte. C'était leur aîné, le père de la ville, leur hôte...Sa puissance et son rang les fascinaient souvent, sans compter que son clan, celui des Ventrues, était réputé pour être un des plus nobles de leur race. Certains n'osèrent pas le regarder, d'autres l'auraient volontiers touché comme une idole païenne. Son aura était impressionnante, quoique atténuée pour éviter les conflits stériles. La curiosité des uns se mariait à l'admiration ou à la haine des autres. Les lèvres se faisaient complaisantes, caressantes, flatteuses, terriblement hypocrites. Jirômaru ignora tout ces imbéciles, écartant d'un revers ceux qui voulaient lui faire un baise-main, marque de servitude, de fidélité et de soumission qu'il détestait particulièrement à cause du contact physique.

Dans sa tenue, le Comte n'était pas plus élégant que d'habitude. Il portait un pantalon blanc, une chemise sombre et son fameux manteau rouge. Ses bottes claquaient sur les pavés humides et ses longs cheveux blancs n'étaient couverts d'aucun chapeau. Le fait qu'il n'aie ni son haut de forme, ni ses gants, ni sa canne-épée pouvait paraître étrange mais ce qui attirait l'attention c'était surtout son plastron argenté. Il ne le mettait pas souvent, d'ailleurs il ne l'utilisait généralement que pour ses soirées de chasse au Loup-Garou. C'était comme une petite armure qui recouvrait son ventre, un blason aussi, qu'il arborait parfois dans les bals. En vérité, il revêtait ce soir les habits dans lesquels ses confrères le reconnaissaient comme un chef de clan plutôt que comme un aristocrate de renom ou une entité sans visage. C'était également stratégique s'il y avait combat...


****************

Officiellement, ce qui amenait Jirômaru Keisuke en ces lieux était un rendez-vous qu'il avait pris avec l'un des Vampires les plus âgés de sa génération, un certain Helmet Travis Joyce, membre de la Camarilla depuis près de 160 ans, immortel depuis plus de 523 ans. Longtemps, il avait été à ses côtés dans ses intrigues politiques, surtout à Londres. Mais il y avait toujours eu une rivalité bien désagréable entre eux. Car si Jirômaru n'avait pas été plus vieux que lui, c'était certainement lui qui aurait pris la tête des Vampires de la capitale britannique. A ses yeux, le Comte était donc un arriviste qui lui avait pris sa place sans scrupule, mais c'était aussi un maître et un ami. Sans grande rancune, le vieux Vampire avait même toujours espéré que se soumettre à son aîné le pousserait à jeter plus qu'un œil sur lui. Son désir le plus cher était d'avoir l'occasion de goûter à son sang. Il était si puissant, si vivant...C'était pour cela qu'il l'avait aidé à monter dans la société anglaise sans éveiller les soupçons, c'était pour cela qu'il l'avait assisté dans ses magouilles au sein même de la Cours...Mais ces temps de connivence avaient touché prématurément à leur fin, à son plus grand damne, lorsque son ami avait décidé de veiller sur la reine plutôt que de la dévorer. Trop de divergences, trop de déceptions avant même la naissance de la jeune Victoria : Joyce avait fini par se retirer dans son antre en abandonnant ses extravagantes ambitions. Jirômaru lui avait finalement toujours semblé inaccessible. C'était donc empli de frustration qu'il s'était ainsi replié dans sa retraite, utile pour la politique de la Camarilla. Mais, marqué du sceau de l'Indépendance à cause de ses anciens liens avec le Comte, il était finalement toujours resté en marge.
Aujourd'hui, leur rendez-vous était soit-disant liés aux récents événements qui avaient fait trembler la capitale. Le théâtre, les Hunters, la terrible ascension vers la violence qui était en train de s'opérer au cœur de leur ville. Mais, s'ils allaient converser et peut-être créer une nouvelle alliance, cette dernière ne retrouverait jamais son prestige d’antan. Tout deux en étaient fortement conscients.

Officieusement, le Comte c'était donné plusieurs missions.
La première consistait à faire peur à la Camarilla en lui prouvant qu'il n'hésitait pas à rencontrer ses membres chez eux. Descendre sans frémir dans ce trou remplit de hyènes allait peut être leur montrer qu'il n'était toujours pas intimidé par leurs menaces et qu'elles avaient plutôt intérêt à ne pas le chercher d'avantage.    
La seconde mission qu'il s'était donnée visait à vérifier que Joyce ne l'avait pas trahi. Les murmures de la Camarilla et les divers avertissements qu'il avait lui-même reçus de ses pontes commençaient à l'exaspérer. Qui avait donc soufflé à leurs oreilles séniles des informations qu'ils n'auraient jamais dû entendre ? Angelstone l'avait prévenu : la secte se doutait qu'il tramait quelque chose de dangereux dans leur dos. Seul Joyce pouvait avoir parlé. C'était un rendez-vous qui risquait de très mal tourner...
Mais il y avait également sa propre santé en jeu : Joyce était un des rares Vampires à savoir que Jirômaru était atteint d'une dégénérescence particulièrement difficile et que cette dernière le rendait parfois malade. Certes, ses cheveux blancs laissaient à penser qu'il était fortement touché par cette malédiction, mais peu de personnes osaient imaginer à quel point le Comte en souffrait. Jirômaru ne venait pas se confier à son confrère, non, cela aurait été bien pathétique et inutile, il venait en réalité se repaître de son sang pour enrayer la progression catastrophique de la maladie qu'il sentait resurgir en ces temps troublés. N'avait-il pas de nouveau ces stigmates disgracieux sur son torse de marbre ? N'avait-il pas vu son reflet changer dans le verre de son étagère lorsqu'il s'était entretenu avec Ludwig ? C'étaient bien là les signes avant-coureur de sa perte. Oui...Il avait besoin de sang. Certes Maria n'aurait pas hésité à lui donner tout son saoul, ses autres disciples non plus, à part Salluste dont l'état de santé ne le permettait certainement pas, ou Arath dont le caractère trempé oserait peut-être aller jusqu'au refus de s'offrir, mais il fallait maintenant qu'il s'abreuve d'un sang plus puissant que celui de ses calices ou de ses disciples. Il avait besoin d'un sang gorgé de pouvoir, gorgé de sagesse. Il avait besoin de régénérer ses cellules à l'aide de celles d'un autre...

Tout avait été prévu. Cela faisait maintenant deux jours que son calice principal, Ludwig Zwitter, était parti pour Milan. Le Comte l'avait envoyé chez un ami, un Vampire de confiance nommé Alceo Adamo, afin que le jeune Allemand se fasse une nouvelle santé. C'était-là son excuse pour l'écarter des guerres futures. L'air de Londres lui avait déjà trop terni le teint et les intrigues qui se jouaient désormais autour de son maître ne feraient que le blesser davantage. Ludwig était un Humain encore trop jeune et trop faible pour supporter le poids de son immortel tuteur. Contrairement à ce qu'il pensait, il n'était pas assez fort pour le suivre ou le soutenir. Et puis, comment aurait-il réagit face au refus prolongé de son maître en terme de sustentation ? Lui qui adorait lui tendre son cou pour satisfaire ses besoins...Ne serait-il pas devenu fou en voyant son maître s'abreuver au cou d'un autre et le rejeter systématique pour « la pauvreté de son sang » ? En soit, Jirômaru n'avait que faire de jalousies puériles et, s'il en avait éprouvé le besoin, rappeler à l'ordre le jeune Allemand aurait été d'une indéniable simplicité. Cependant, non seulement cela n'aurait pas enrayé le malaise du jeune homme mais en plus le Calice n'aurait peut-être pas réussi à surmonter les épreuves qui l’attendaient maintenant. Sa raison aurait sans doute disparue. Elle qui était déjà si fragile...
Ludwig était son serviteur, il n'avait pas à juger les actes de son maître et son être tout entiers lui appartenait, mais, quelque part, Jirômaru désirait le protéger du monde et de lui-même. Joyce risquait demander une contre-partie à leur nouvelle alliance, et cette contre-partie ne serait certainement pas le jeune Allemand...
 

****************

Après une demi-heure de marche, l'ex-samouraï arriva enfin devant la demeure de son ancien collègue. Helmet Travis Joyce possédait un véritable palace sous les pavés londoniens. Le Comte n'y était venu qu'une paire de fois, avant que Joyce ne rejoigne complètement la Camarilla, mais il se souvenait de cette porte massive qu'il retrouvait ce soir. Elle était peinte en vert, bardée de fer et gravée de symboles ésotériques qui auraient fait pâlir le plus fervent des abbés. Une fois que les deux portiers l'eurent fait entrer dans les formes, le patriarche fut conduit dans un des salons de Joyce.
Avant même d'entrer, l'odeur du sang lui chatouilla les narines. Que trafiquait donc encore ce vieux cinglé ? Joyce n'avait été accepté au sein de la Camarilla que par respect pour son âge et pour son excédent soucis de la Mascarade, autrement, il possédait bien plus que bon nombre de Vampires les goûts pervers et sanglants du Sabbat. C'était aussi en cela que Jirômaru et lui avaient décidé de se séparer.

Joyce l'accueillit à bras ouvert au milieu de ce salon orné de tapisseries du Moyen-Âge. Il n'était vêtu que d'un peignoir grossier dont la ceinture venait à peine d'être serrée...Un verre de sang à la main, il lui sourit de toutes ses dents :


- Jirômaru ! Je ne t'attendais plus ! Je croyais que tu débarquerais plus tôt ! Entre, entre !

Le Comte détestait ces familiarités. Les autres Vampires le vouvoyaient et l'appelaient « maître ». Joyce s'était terriblement relâché depuis qu'ils avaient arrêté de faire affaire ensemble. Autrefois, il l'avait révéré comme un damné. Aujourd'hui, c'était devenu un Vampire aux allures de jeune m'as-tu vu, un peu dandy, complètement décadent. Il avait le visage d'un homme d'une quarantaine d'année mais la voix d'un jeune gamin insupportable. Ses cheveux, aux épaules, étaient noirs et filasses, ses ongles un peu longs. Il avait l'allure de ces aristocrates déchus, livrés à leur solitude et à leurs vices depuis plusieurs années. A la vérité, Jirômaru lui trouvait un air terriblement maladif. Derrière son sourire se sentait la dégénérescence due à son âge. Pourtant, il ne semblait pas avoir un seul cheveux blanc...

S'avançant vers lui, le Comte le salua d'un coup de tête tandis que l'autre en face esquissait une courbette un soupçon ridicule.


- Toujours terré dans ce trou à rat Joyce...Murmura le Comte en lui jetant un regard hautain. Je m'attendais presque à me faire mordre en venant ici mais tes petits amis ont l'air d'avoir compris qu'il valait mieux pour eux qu'ils gardent leurs distances...

- Allons ne dis pas de sottises Jirômaru ! Pouffa le Vampire. Tu sais bien qu'ils sont plus lâches qu'autre chose ! Te mordre...toi ? Haha ! Pff...Et ne m'appelle pas par mon nom ! C'est d'un convenu ! Après toutes ces années...

Joyce, qui avait dit cela d'un air détaché, vida un peu hâtivement son verre avant de le poser sur une table. Le Comte sourit. Son air contrit lui avait suffit : son ancien collègue rêvait toujours de plonger ses crocs dans son cou...Intéressant...Il pourrait toujours en jouer...

Installés tous deux dans de grands fauteuils, ils abordèrent bien vite les véritables motivations du Comte. Ce dernier refusa le verre de sang que lui tendit son confère avant d'entamer les hostilités.


- La Camarilla s'affole ces derniers temps...Mon retour sur la scène publique et mes petites joutes avec les Hunters ont perturbé ses vieux gâteux. Ils m'ont envoyé un messager Joyce...pour me prévenir que si je continuais mes petites intrigues ils n'allaient pas tarder à réagir...Sais-tu ce que cela signifie?

Joyce quitta son sourire. Contre toute attente, il prit la question très au sérieux. Il se pencha en avant, comme pour éviter que des oreilles mal-attentionnées ne puissent écouter ce qu'il avait à dire, et grinça entre ses dents :

- Ces crétins pensent que tu veux leurs têtes et que ton statut d'Indépendant n'est en fait qu'un leurre. Ils imaginent que ton vœux le plus cher est de les remplacer à la tête de la Camarilla. Moi je sais bien que non...Mais vas leur faire entendre raison sans les alarmer d'avantage...

Le Comte lui jeta un regard mauvais.

- Qui voudrait gérer la secte ? Si je n'ai rejoint aucun parti c'est bien pour m'affranchir de leurs niaiseries. J'ai bien assez à faire avec mes disciples...Son regard perdit un peu de sa colère. Un fin sourire étira ses lèvres glacées. Mais...laissons-les croire ce qu'ils veulent...Ils sont si stupides ! Pendant qu'ils s'amusent avec ces idioties, je peux agir en paix. Pfff...Me proclamer roi peut bien leur venir à l'idée que je n'accepterais pas...

- Je le sais bien...Je le sais bien...mais...tu n'as toujours pas renoncé?

Le Comte leva un sourcil.

- Je ne suis pas comme toi, Joyce, lorsque je m'engage dans une mission je la mène à son terme.

Le Vampire rougit en détournant le regard. Les yeux du Comte le dérangeaient toujours autant.

- Tu sais pourquoi j'ai cessé de te suivre...

- Ho oui je le sais...Répondit le Comte en se penchant en arrière pour croiser ses jambes et poser un coude sur l'accoudoir de son fauteuil. La tête penchée sur le côté, il sortit les canines d'un air ravi pendant que ses cheveux glissaient sur son épaule. La lâcheté...c'est ce qui a toujours conduit tes pas...

- Non ! Protesta vivement Joyce les poings serrés comme un gamin mit face à une injustice.  Il y a...aussi...

- L'amour ? Coupa le Comte en souriant de plus belle face au visage tordu de son confère.

Il y eut un silence. Joyce n'osait plus regarder son aîné. Ce dernier le regardait avec une ironie à peine dissimulée.


- Oui...Murmura finalement le Vampire en détournant à nouveau le regard comme s'il fut gêné par cet aveu.

- Ce n'est pas une nouvelle. Fit le Comte avec un rictus. Tu m'as toujours aimé, comme tous ceux qui ne désirent que mon regard et mon sang. Te crois-tu donc différents des autres, Joyce ? Crois-tu que tu le mérites plus que d'autres ? Cette fidélité m'est bien égale si elle n'est qu'intéressée. Je ne me soucie que du véritable amour, celui que me porte Salluste, par exemple, celui que me portait la douce Estelle, oui, Estelle...

Joyce grimaça. Puis, il se ressaisit :

- Tu as toujours été cruel. Cruel et naïf...Estelle le voulait elle aussi.

Sa moue se voulait aussi sombre que victorieuse mais lorsqu'il vit le sourire que lui opposait le Comte, il la perdit.

- Ta jalousie m'aura toujours débecté Joyce. Prends garde, cela te rend si laid...

Joyce soupira et se leva, furieux de la tournure que prenaient les choses. Il avait honte et en même temps il respirait à nouveau. Savoir que Jirômaru était là était aussi terrifiant qu'envoûtant. Lui qui avait toujours désiré son attention, lui qui avait rêvé de son sang, d'une union de pouvoir, avait ce soir la possibilité de s'en rapprocher à nouveau. Ces années passées loin de lui l'avaient cruellement meurtri. Pourquoi n'avaient-ils jamais su s'entendre ?

Mais le Comte n'était pas là pour discuter de ce genre de stupidité. Il avait désormais la certitude que Joyce ne l'avait pas trahit, c'était déjà une bonne chose. Maintenant, il comprenait mieux les ridicules précautions de la Camarilla. Que ses membres imaginent qu'il désirait en prendre le contrôle expliquait beaucoup de choses, notamment le regain d'intérêt que lui portaient individuellement ses membres prêts à trahie leurs maîtres actuels. De même, cela expliquait également que la secte ne soit pas intervenue au théâtre malgré le péril que cela avait été pour la Mascarade : l'aider n'aurait fait que les humilier et les pousser reconnaître que la nouvelle force des Hunters nécessitait de nouvelles alliances. Le Comte aurait risqué de monter dans l'estime des plus jeunes et les grands pontes auraient peut être subi une mutinerie bien plus rapidement que ce qu'ils avaient estimé. Mais ils se trompaient, ho oui, terriblement. Le Comte n'avait que faire de ce genre de pouvoir. S'il avait toujours refusé d'appartenir à une secte, ce n'était certainement pas pour prendre la tête de l'une d'entre elles. Leur ego démesuré fourvoyait ces vieux fous ! Quelque part cela rassurait le Comte. Du moment qu'ils ne comprenaient pas qu'il en avait au Père et à la Mère, tout lui convenait. Cependant, cette méfiance les poussaient malheureusement à traîner dans ses pattes et à envoyer des espions rôder dans son sillage. Le risque qu'ils découvrent réellement quelque chose commençait à poindre. Il fallait éviter à tout prix cette escalade vers la guerre. Ses desseins ne pouvaient souffrir pareil manège.

Se levant à son tour, Jirômaru rejoignit Joyce qui s'était arrêté devant une étagère où il collectionnait des papillons sous verre. C'était la même chose que pour Chastity : l'envie, le besoin de conserver la vie, la couleur, tout ce qu'ils ne pouvaient côtoyer à cause de leur nature, afin de pouvoir s'en délecter et rêver. Joyce était un homme brisé. Depuis longtemps son immortalité lui pesait. Avoir rangé les armes n'avait fait que le conduire à la ruine de ses dernières forces. Il n'était plus aussi puissant qu'auparavant, loin du monde, retiré dans les sous-terrains poisseux des catacombes, même s'il gardait en lui une force toute relative à son âge et à son expérience.

Sentant dans son dos son aîné, il frémit :


- Pourquoi es-tu venu Jirômaru?

Le Comte se tenait derrière lui, le dominant de sa taille de titan. Son sourire avait disparu même si, au fond, il jubilait de ce qui allait suivre.

- Je suis venu prendre ton sang.

Un sourire timide s'étala doucement sur le visage de Joyce. Oui, il avait une ouverture, c'était maintenant ou jamais ! Jirômaru Keisuke avait besoin de lui ! C'était inespéré ! Oui, cette fois-ci il pourrait réclamer ce qu'il considérait comme son dû ! Entre deux aussi grandes puissances, il était stupide de ne pas partager savoirs et pouvoirs...
Faisant volte face, il se rapprocha du lord.


- Et...qu'obtiendrais-je en échange? Demanda-t-il d'un air malicieux comme s'il était certain que le Comte allait lui donner ce qu'il désirait le plus au monde.

L'ancien samouraï le saisit par le col de sa robe de chambre pour le ramener doucement contre lui. Son regard semblait soudainement plus tendre mais ce n'était qu'une illusion. En vérité, Jirômaru riait de toute son âme. Il allait piéger cet imbécile...C'était presque trop facile...


- Cela dépend de ce que ton sang a à m'offrir...Murmura-t-il en frôlant de sa bouche le cou de son confrère.

Joyce blêmit. Sentir Jirômaru si près de lui ne le rassurait finalement pas. Et puis...s'il donnait son sang maintenant, rien ne lui promettait qu'il pourrait ensuite avoir le sien.


- Ola...je...Faisons un échange...Pas de ça Jirômaru...Fit-il en reculant pour tenter de se défaire de l’étreinte de son aîné. Puis, lentement, il se rapprocha finalement lui aussi pour toucher de son nez ses longs cheveux blancs. D'accord...mais alors...Laisse-moi...moi aussi...Continua-t-il comme enfiévré en s'approchant du cou de Jirômaru.

Ses canines brillèrent à la lueur des lampes à huile qui éclairaient la pièce. Le Comte eut un rictus méprisant. Il le lâcha brusquement et s'éloigna soudainement en faisant mine de ne plus être intéressé.


- Comme tu veux...C'est bien dommage...

- Attends! S'exclama Joyce en esquissant un geste pour le rattraper. C'est d'accord ! Tu auras mon sang ! De toute façon...je savais que ce jour était inévitable...Mais...Ne peux-tu... ? Ne serait-ce qu'un peu?

- Tu as toujours été d'une impatience déplorable Joyce...

Le Vampire tremblait d'émotion. Pour lui, laisser son ancien collègue partir c'était se condamner à la misère pour toujours. Il ne voulait plus rester ici à ruminer sa frustration, il voulait satisfaire son désir et vivre de nouvelles aventures aux côtés de cet être si fascinant. L'opportunité qui se présentait à lui était certainement la dernière qu'il aurait jamais.

- Je serai patient Jirômaru...Je serai patient ! Mais..promets-moi ! Je ne veux pas être une marionnette.

Le Comte se retint d'éclater de rire et de partir pour de bon. Joyce n'avait jamais été autre chose qu'une marionnette et cela ne changerait jamais ! Qu'espérait-il donc ? Lui qui connaissait ses desseins n'avait-il donc jamais poussé la réflexion jusqu'à son terme ? Une fois qu'il aurait éliminé le Père et la Mère, que croyait-il donc qu'il allait faire ? Commencer par tuer les plus anciens d'entre eux, les plus dangereux, puis éradiquer tous les autres ! Lui serait certainement le premier ! Quel idiot ! Décidément...

- Je te le promets. Fit soudainement le Comte avec un sourire presque amical. Mon sang sera tien dans un avenir proche.

Le regard de Joyce rayonna de joie. Jirômaru détourna le sien dont il n'arrivait pas à détrôner le dégoût et la méchanceté. Quelque chose le dérangeait dans ses plans. Comment allait-il opérer pour la suite ? Le crime impardonnable était là...Oserait-il continuer plus avant ?

Enfin, Joyce se retrouva à genoux devant lui. Dégageant ses cheveux, il lui tendit le cou dans un mouvement de soumission absolue. Il ferma les yeux et murmura :


- Vas-y...Si cela peut t'aider...Si cela peut nous lier...

Jirômaru l'attrapa par le col sans ménagement pour le forcer à se relever.

- Pas comme ça, Joyce, je ne te marquerai pas. J'ai encore besoin que la Camarilla imagine que nous ne sommes pas sous l'égide d'un pacte.

Joyce grimaça mais il semblait que cette nouvelle condition ne lui paraissait pas particulièrement étrange. Après tout, c'était vrai que s'il portait la marque du Comte Kei, la Camarilla risquait fortement de le dénigrer totalement. Doucement, il allait donc se mordre le poignet droit avant de le tendre à son aîné mais Jirômaru l'arrêta dans son geste.

- Pas ici...et puis...nous avons le temps...

Joyce fronça les sourcils et un silence s'installa. Le Comte semblait lui-même perturbé. Ne voulait-il donc pas son sang ? Que voulait-il finalement ? Un simple accord sans action ? Il ne comprenait pas. Jirômaru avait toujours été mystérieux et fourbe. Le Vampire s'en méfiait comme de la peste mais son désir était plus fort que tout. C’était ce qui avait motivé chacun de ses gestes à l'époque où ils louvoyaient ensemble dans les hautes sphères.
Au bout d'un moment, il haussa les épaules et reprit son ton clownesque :


- Comme tu veux ! C'est vrai que rien ne presse. Prends donc un verre ! Viens, allons nous prélasser un peu plus loin...J'ai quelques livres dans ma chambre qui pourraient t'intéresser. Tu sais, je me suis beaucoup intéressé aux Hunters ces derniers temps, comment ne pas voir qu'ils se sont multipliés alors que des Bloody Rose traînent à chaque coin de rue !? Alors j'ai fait ma petite enquête vois-tu et j'ai trouvé quelques informations qui pourraient te plaire...Tu te souviens de la famille Fellow ? Ils ont eu un fils et je suis persuadé qu'il vit encore quelque part à Glasgow. Le traquer pourrait être amusant...

Écoutant sans grand intérêt les pitreries de son confrère, le Comte le suivit. Joyce avait toujours été une sorte de gai-luron sournois. S'il voulait se mettre à traquer les Hunters, le Comte doutait que ce fut pour permettre à sa race de survivre. C'était sans nul doute simplement pour le plaisir de la chasse, pour jouir de leur lente agonie...

****************

Lorsqu'ils pénétrèrent dans la chambre, Jirômaru fit aussitôt une grimace. Dans le grand lit qui trônait au centre de la pièce gisaient deux petits corps : des enfants. Ils ne devaient pas avoir 10ans. C'étaient deux garçons.
Le Vampire laissa son regard brumeux parcourir leurs chairs à nue. Ils étaient vivants quoique lacérés en plusieurs endroits. C'était leur sang qu'il avait senti en entrant tout à l'heure. Mais ce qui le révulsa le plus, ce fut qu'ils avaient clairement été utilisés pour satisfaire les désirs lubriques de son confrère. Leurs pauvres petits visages étaient baignés de larmes et, s'ils dormaient, ce n'était que d'épuisement ou de désespoir. Grimaçant de dégoût face à leur innocence bafouée, le Comte ramena son regard sombre sur son hôte.


- Tu es un malade Joyce...

- Et c'est toi qui dis ça ? Rit le Vampire en écartant les bras d'un air heureux comme pour faire l'ouverture d'un nouveau spectacle. Et toi ? Combien d'esclaves as-tu sous l'opéra ? Haha !

- Aucun de cet âge-là. Répondit froidement le lord en se dirigeant vers le lit.

- Ha parce que la vie change d'importance selon l'âge de celui qui la porte ? Ne me fais pas rire ! Pouffa-t-il. Puis, venant près du Comte qui vérifiait le pouls des enfants, il ajouta d'un air complice: D'ailleurs, j'ai entendu dire que tu t'amusais bien avec un certain Arnoldo...n'est-ce pas ?

Jirômaru serra les poings.

- Ce n'est qu'un calice. Grogna-t-il entre ses dents furieux que le nom de son calice puisse sortir d'entre les canines d'un autre.

- Haha ! Qu'un calice...oui...oui...

Joyce s'éloigna en riant de plus belle. De son côté, le Comte plia la couverture du lit pour recouvrir les enfants. Jamais il ne s'était sexuellement intéressé à de si jeunes Humains. Jamais. Pour lui, boire le sang d'un enfant jusqu'à lui prendre la vie était une chose, le torturer en était une autre. Arnoldo était jeune, certes, il n'avait qu'une quinzaine d'années, mais c'était presque de sa propre volonté qu'il servait de calice et puis il n'avait jamais souffert d'avances perverses. Pénétrer son esprit avec le sien pour le formater quelque peu ou pénétrer sa peau de ses crocs pour s'en nourrir étaient deux actes déjà assez abominables pour en plus prétendre pénétrer et briser son intégrité de cette façon-là !

- D'ailleurs, continua Joyce en se servant un nouveau verre de sang, tu comptes le transformer un jour, non ? Il doit être impatient le bougre ! Haha ! Faut pas attendre qu'ils deviennent fous ! C'est moins amusant sinon ! Plus ils sont jeunes mieux c'est...

Une pointe de haine traversa le Comte. Son regard se fit soudainement si menaçant que Joyce fléchit.

- Qu...quoi ? Tu les préfères mûrs ? Bah ! A chacun son truc...

Il avait donc transformé un enfant... ? C'était impardonnable ! Lui qui connaissait ses plans, lui qui avait toujours appuyé ses desseins, repeuplait finalement la surface de la terre à son insu en utilisant de jeunes humains ? C'était un crime des plus graves au sein des règles ancestrales ! Comment pouvait-il croire qu'il s'en sortirait en agissant de la sorte ? Ce n'était qu'un imbécile. Un imbécile qui allait servir ses intérêts bien plus facilement que prévu...

- Ha ha ha...Rit le Comte en se passant la main sur le visage. Alors tu l'as fait ?

- Que...qu'est-ce que j'ai fait ? Bégaya Joyce en faisant l'innocent.

- Où est-il? Demanda le Comte d'un air aussi neutre que possible.

Joyce sourit avec sournoiserie et désigna un rideau.


- Par-là...C'est « elle, c'est une fille. Je m'amuse bien avec...Si tu veux je te la prête...Ne t'en fais pas, elle ne bois pas encore beaucoup...

Le Comte lui sourit d'un air terriblement jubilatoire.

- La voilà mon excuse...Je vais maintenant pouvoir te tuer sans me poser de question. Nul ne pourra rien y redire Joyce...Tu as franchit les limites de l'interdit.

Il y eut un instant de silence puis le Comte se dirigea vers le Vampire, une flamme dans les yeux. Joyce paniqua aussitôt, abandonnant son verre sur le tapis.

- Tu sombres dans la démence Jirômaru ! S'écria-t-il en s'agitant. La peur avait littéralement transformé son regard. Tu es fou...Je l'ai toujours su !

- Fou ? Ho non je ne suis pas fou...Fit le Comte en s'approchant lentement de son ancien acolyte. Son regard pénétrant lui donnait un air carnassier.

- R...Recule ! Tu ne peux pas me tuer ! Tu n'en as pas le droit !

- Ho que si...et tu le sais très bien...

Le teint du Vampire n'aurait pu être plus pâle. Il avait encore blêmi et ses membres tremblaient maintenant de la plus terrible des peurs. Trébuchant, il recula, plaçant entre lui et le Comte une chaise dont il tenait le dossier. Puis il s'en détacha pour reculer encore.

- Je...Allons tu me connais ! Je ne suis pas méchant...Arrête ! Recule !

Le Comte fit le tour de la chaise, clairement satisfait de la terreur qu'il lisait maintenant sur le visage de son confrère. Lorsque ce dernier se retrouva acculé à une commode, Jirômaru lui sourit. Il le toisait de haut, canines sorties.

- Quel pitoyable spectacle, Joyce...Tu n'es même pas capable de m'attaquer pour te défendre. Aurais-tu perdu tes pouvoirs ?

Le Vampire esquissa un pâle sourire. Il ne savait plus sur quel pied danser.

- N...Non...je...

Le Comte se pencha alors en avant pour lui murmurer à l'oreille :

- Je plaisantais.

Son regard croisa le sien et, avec un sourire plus prononcé, il recula pour laisser le Vampire respirer. Il portait sur le visage l'expression d'un homme fier de son petit effet. Il lui tourna alors le dos comme pour s'éloigner. Joyce s'était figé puis, comme un oreiller perd toutes ses plumes dans une bataille, il soupira pour relâcher ses muscles. Une main sur son poitrail, il bégaya son soulagement :

- Ha...huhg...tu m'as fait...peur...J'ai cru que...

Soudain, il cracha du sang. Le Comte lui faisait de nouveau face et une de ses mains, effilée comme un poignard, venait de lui traverser le corps de part en part.

- … ?!

Les crocs de Jirômaru frôlèrent son oreille dans un rictus sarcastique:

- Je plaisantais...au sujet de notre alliance. Tu n'as aucun futur. Mon sang ne sera jamais tien...

Le Comte fit pivoter sa main avant de l'enlever d'un coup sec. Dans un râle, Joyce s'effondra. Le Vampire lécha sa main couverte de sang tout en regardant son adversaire rejoindre le sol. Le tapis s'imprégna de ce que son confrère perdait maintenant. Lentement, Jirômaru se baissa pour se mettre à la hauteur de Joyce. Ce dernier glapissait sa douleur comme un chien. Sans lui laisser le temps de parler, le Comte l'attrapa brusquement par les cheveux et enfonça ses crocs dans son artère tout en lui maintenant les mains de la sienne libre. Joyce tenta vainement de se débattre mais son sang coula rapidement le long des lèvres de Jirômaru et de son propre cou. Il allait mourir ! Alors que le Comte avalait goulûment tout ce que pouvait lui fournir son confrère, ce dernier se mit à lutter mentalement pour le repousser. Leurs esprits combattirent alors violemment. Joyce n'était pas né de la dernière pluie et, s'il était physiquement impuissant face à la poigne du Comte, beaucoup plus entraîné au combat, il possédait une force mentale autrement plus impressionnante. Jirômaru partait avec le désavantage d'être blessé à ce niveau-là, à cause de la Mère et de Ludwig, mais il ne comptait pas perdre cette bataille...Ce soir, il allait s'imprégner des pouvoirs de cet immortel pour se renforcer et maintenir le fragile équilibre de son être. Il en avait besoin pour éviter que sa chute ne soit prématurée. Joyce avait eu la folie de lui offrir sa vie sur un plateau en avouant son dernier crime. Rien ni personne ne pourrait lui reprocher cette mise à mort, c'était son droit ! Et la Camarilla le craindrait d'autant plus qu'il se ferait passer pour le juge venu exercer sa mission en son sein même...
Peu à peu, le patriarche sentit ses forces se gonfler d'énergie. Oui...le sang de Joyce était fort concentré et, même si le Don Obscur n'en était pas pour autant plus présent et que des siècles de vie n'avaient fait que l'amoindrir, il conservait cette puissance des Premiers... Quelle délectation !
Cependant, Jirômaru se mit bientôt à saigner du nez. Sa tête lui faisait mal. Joyce faiblissait mais son esprit était toujours là. Ne se laisserait-il donc pas faire jusqu'au bout ?! Le pauvre être décadent luttait pour sa survie. Son corps était presque perdu mais il ne comptait pas rendre ce qu'il lui restait d'âme sans résister. De son esprit, il détruisit soudainement les barrières mentales du Comte. Sous le choc, ce dernier faillit lâcher prise. Mais ses crocs, profondément enfoncés dans la chair de son ancien allié, ne se détachèrent pas de son cou. Le bras droit de Jirômaru se figea dans une glace artificiellement créée par son adversaire. La souffrance que cela lui coûta fut telle qu'il en rugit de rage tout en continuant son œuvre terrible. Ses yeux désormais entièrement blancs brillaient d'une nouvelle force.  

Joyce perdit.
Il fut vidé de son sang jusqu'à la dernière goutte.
Les ombres envahirent la pièce.
La Bête soupira son bonheur.
Jirômaru le dévora sans vergogne.


Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Comte_16

Shakespeare, Macbeth, I, 4, 1605 :

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MessageSujet: Re: Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Icon_minitimeDim 9 Mar - 18:23

Chapitre II – Ichtus

La souffrance.
Jirômaru ne se souvenait pas avoir autant souffert depuis qu'il était à Londres. Dans sa tête, des milliers de voix semblaient hurler toutes à la fois. Il crispa ses longs doigts d'albâtre à la racine de sa chevelure immaculée et poussa un râle qui remua chacune de ses entrailles. Le sang de Joyce ne contenait pas qu'un magnifique pouvoir, il avait aussi un goût de ruine. Tel un millésime passé d'âge, il développait les sens autant qu'il les obstruait. Sa teinte, claire et puissante, stagnait dans une infâme lie noirâtre que le Comte n'avait malheureusement pas omis de boire elle aussi. Il avait tout pris, sans distinction, et la cruelle vérité le frappait désormais : il allait véritablement posséder plus de pouvoir qu'il n'en avait jamais eu, son aura s'était déjà décuplée, mais il n'avait pas réussit à ralentir sa dégénérescence, au contraire, il l'avait même sûrement accélérée...

Jirômaru serra les dents. Sur ses genoux, une dizaine de petits cristaux de glace tombèrent en fine pluie brillante. A travers son manteau et sa chemise, le sort continuait de ronger son bras glacé. Il était en partie brisé et sa peau se délitait par endroit. Le Vampire le ramena contre lui. Même si la froide enveloppe disparaissait maintenant que Joyce était mort, ses effets duraient et cela était si vif qu'il gémit sa douleur dans un rictus cependant presque amusé. Son regard brumeux glissa sur le cadavre de son ancien collègue. Ce dernier ne ressemblait plus à un être humain. C'était un amas de chairs informe, une charpie nauséabonde dont les os ne paraissaient même plus répondre aux lois élémentaires de la nature. Distinguer son visage dans cette immonde carcasse relevait de l'impossible. Et pourtant, le lord lui adressa un sourire narquois :


- Même mort tu me serviras encore...

Le Vampire se leva alors et tituba jusqu'à un fauteuil dans lequel il se laissa tomber. Tremblant de tout ses membres, il n'arrivait pas à contenir en lui ce qu'il venait d'ingurgiter. Son estomac se soulevait, son esprit s'écroulait. Un fin filet de sang coulait de son nez, souillant un peu plus sa chemise noire déjà imbibée du sang de sa victime. Ses crocs tiraillaient ses gencives à vif. Quelque chose palpitait dans ses veines. Joyce se débattait encore un peu...

Enfin, le Comte soupira. Les yeux fermés, il tenta de calmer son âme. Ce nouveau meurtre marquait un tournant décisif dans son parcours. Il n'aurait plus le droit à l'erreur.


****************

- Maître ?

Elle se tenait là, dans l'encadrement de la porte dont elle avait écarté le rideau. Elle était si petite, si frêle...Elle ne devait pas avoir 12 ans. Sa courte robe bleue bordée de dentelles blanches lui donnait un air que les Humains auraient qualifié d'angélique. Elle tenait une peluche dans les mains. C'était un petit poisson fait d'une toile de lin blanc, rayé de rose, certainement rembourré de coton.
Où Joyce avait-il pêché cette gamine ? Dans la rue ? Chez un aristocrate ? Qu'importe. C'était la preuve vivante de son crime. Une infante hors des lois, un danger pour l'Humanité. Elle lui fit penser à Elizabeth, la jeune Vampire que gardait maintenant Wynn Leichenhalle pour lui. Pourquoi le Don Obscur était ainsi gaspillé ? Ces êtres finissaient toujours par mourir sous la torture des Hunters, par crever de faim ou pire : par plonger dans la folie après avoir réalisé quelques carnages. Ils étaient impossibles à contrôler, trop naïfs pour survivre dans ce vaste monde, trop irresponsables pour que l'on puisse les laisser errer au milieu des Humains sans que leur race ne risque d'être entièrement découverte...

Jirômaru s'essuya la bouche et le nez d'un revers de manche. Ses yeux brillaient d'une lueur rouge, celle du sang, celle de son péché. L'hésitation s'y installa, la gêne peut-être aussi. Puis, ramenant à ses côtés sa cape d'un geste lent, il se leva et s'agenouilla devant la petite qui s'était timidement approchée de l'étranger qu'il était. Le Comte fit en sorte que sa carrure cache à ses yeux d'enfant son maître en lambeaux. Doucement, il lui prit les mains. Son regard s'attrista tandis qu'il caressait ses beaux cheveux blonds d'un geste tendre. Au fond, même si cela lui coûtait de l'avouer, il était soulagé de voir qu'il ne s'était pas trompé. Si Joyce lui avait menti, si cette petite n'avait pas existé, son jugement aurait été qualifié de crime impardonnable. Mais ce qu'il s'apprêtait à faire lui fendait le cœur.


- Je suis navrée petite, mais ton existence n'est pas permise...Fit-il d'un air franchement désolé.

- C'est quoi mon existence ? Demanda la petite le plus innocemment du monde en le regardant d'un air interrogateur.

- Tu ne le sauras jamais...

Enveloppant l'enfant de sa cape et de ses bras, Jirômaru se pencha en avant pour planter ses crocs dans sa chair afin de lui prendre la vie. Même immortelle, sans le fluide vital, si jeune et si faible, si démunie qu'elle était, il était impensable qu'elle survive.
Mais alors que ses crocs saillants touchaient la peau de l'enfant, cette dernière remua dans ses bras.


- Attends.

Jirômaru fut surpris de son ton sec et sans appel. La jeune fille semblait avoir compris ce qu'il allait lui faire et pourtant elle n'était pas effrayée. Elle lui demandait juste un délais et sa petite voix avait été bien plus ferme que ce que l'on aurait pu attendre d'une si jeune personne.
Reculant son visage, il l'observa, silencieux. Ses grands yeux verts le fixaient d'un air décidé.


- Qu'y a t-il? Demanda alors le Comte avec un sourire qui se voulait rassurant, presque paternel.

- Tu le garderas pour pas qu'il soit tout seul? Fit-elle en lui tendant son poisson de coton.

Jirômaru laissa son regard tomber sur la peluche. Lentement, il tendit la main.

La part d'humanité qu'il reste en chaque Vampire et différente d'un individu à l'autre. Avec l'âge et le temps, nombreux sont ceux qui finissent par l'oublier ou du moins par l'écraser au fin fond de leur esprit. Chez Jirômaru, cette facette était cachée au monde. Il la maquillait souvent derrière le dédain, la haine, l’indifférence ou le refus. Mais en vérité, il la conservait, précieusement, malgré la douleur dont elle affligeait son âme. C'était le reliquat de ce qu'il était réellement : un Humain, un simple Humain, contaminé, transformé par ce qu'il avait toujours qualifié d'assassin. Matosaï, son maître, lui avait ainsi ouvert la voie de l'immortalité pour en faire son disciple et compagnon d'infortune, mais il lui avait surtout offert une vie de souffrance et de haine. Jirômaru avait toujours rejeté sa nature, il avait même failli en mourir à plusieurs reprises, jusqu'à ce qu'il comprenne qu'il pourrait l'utiliser comme une arme...


****************

Une ombre grandit, puis deux, puis trois...
La chambre fut bientôt envahie d'une quinzaine de Vampires et tous, sans exception, mirent un genoux à terre.
Le Comte se releva paisiblement et leur fit face. Devant lui, la fillette tenait toujours son poisson contre elle. Une main sur sa petite tête blonde, le lord les dévisagea un par un d'un air dur.
 

- Ce n'est pas parce que j'ai tué cet inconscient que vous avez le droit de poser le pied dans son domaine sans y avoir été invités...

L'un des Vampires, sans doute le plus vieux, se redressa et s'avança un peu pour s'adresser à son aîné tout en conservant une main sur son cœur en signe de respect.

- Maître Keisuke, je suis Jean de Boubers-Abbeville, Prince de Tuncq, en France et...  

- Je sais qui vous êtes et ce que vous faites ici. Coupa le Comte en lui jetant un regard hautain.  Inutile de palabrer.

- Oui, veuillez m'excuser. Répondit l'autre en courbant l'échine. Mais vous devez savoir que...

- Depuis quand les Princes étrangers viennent-ils parler à la place des sujets d'un autre?

Le silence se fit et le Vampire recula face au regard impérieux de son aîné. Il était trop conscient du respect qu'il lui devait et du risque d'incident diplomatique que sa présence représentait à cette heure. Sa visite de courtoisie à Londres n'était destinée qu'aux membres de la Camarilla, Jirômaru l'avait compris dès leur première rencontre. Ce dernier était venu se présenter au Prince de Londres pour répondre aux lois vampiriques, avançant qu'il rendait visite à un ami et qu'il ne pouvait pas « ignorer un aussi puissant et respectable confrère ». En vérité, il était venu ici renforcer les liens entre les hauts pontes de la Secte et conclure quelques accords dont le lord ne soupçonnait que trop bien les buts...

Un autre Vampire prit rapidement sa place pour éviter que la situation ne s'envenime. Il était plus vieux et plus à même de mener la discussion. Le Comte le connaissait sous le nom d'Elvis W. Valentine. C'était un haut membre de la Camarilla qui siégeait aussi à la Chambre des Lords.


- Maître Keisuke, veuillez nous excuser pour cette...intrusion, mais nous ne pouvons fermer les yeux sur...

- HA ! Vous ne pouvez pas fermer les yeux sur ça? Rugit le Comte en désignant la dépouille de Joyce d'un geste méprisant de la tête. Mais ça...Fit-il en poussant brusquement la fillette devant lui. Vous le saviez pourtant...n'est-ce pas ?

La petite ne les écoutait plus. Ses yeux étaient rivés sur son maître dont elle venait d’apercevoir la charogne. Elle n'en reconnaissait que l'odeur. Une foule de sentiments semblaient la traverser et se faire pousser en avant de la sorte ne sembla pas la sortir de son état de choc.

De son côté, Valentine avait blêmi. Non, ils ne savaient pas que Joyce avait transgressé les lois, mais l'avouer prouverait que trop bien le laxisme de la Camarilla. Un crime d'une telle force, commis au sein même de leur organisation...Comment pourrait-il le justifier sans passer pour un incapable ?
Saisissant la petite par un bras, le Vampire l'observa un instant comme s'il voulait vérifier que le Comte ne se moquait pas d'eux. C'était une infante, tout le désignait, depuis son teint jusqu'à son regard en passant par ses petites canines et son odeur. Mais elle était effectivement trop jeune...Oui, Joyce avait osé la transformer sous leur toit alors qu'elle n'avait qu'une douzaine d'années ! Quel imbécile ! Cela avait permis au Comte d'entrer dans les catacombes avec une bonne excuse...Il était certainement venu fouiner ici pour trouver leurs points faibles et ce crétin de Joyce lui avait offert sur un plateau leurs têtes grâce à cette erreur ! Quelle affaire ! Il fallait impérativement reprendre la situation en mains.


- Très bien, fit-il en se relevant et en recommençant les courbettes, Joyce a eu ce qu'il méritait, Seigneur...Je suis confus que son attitude aie pu vous décevoir...Cela ne se reproduira plus, soyez-en certain. Nous serons plus vigilants à l'avenir...

Il aurait aimé ajouter que la présence du Comte n'était plus désirée à partir de cet instant et qu'ils allaient se charger de la suite sans qu'il n'y ai besoin de lui dans les parages, mais cela n'était évidemment pas possible. Se contentant d'une nouvelle série de courbettes, il s'éloigna en emportant la fillette avec lui. Cette dernière ne réagit pas, se laissant faire comme une poupée.

- Excusez-nous encore...Nous allons faire le ménage...

Le Comte ne lui accordait déjà plus son attention. S'il avait pu, il l'aurait brûlé sur place. Oser venir lui demander de rendre des comptes dans sa propre ville ! Avec un étranger en plus ! Cela ne pouvait que l'irriter au possible. Même s'ils étaient dans un des repaires de la Camarilla, il ne pouvait tolérer que de pareils idiots puissent permettre aux leurs de pareils écarts. Ils connaissaient les règles ! Ho oui...Ils ne les connaissaient que trop bien...Le fait qu'ils ne réagissent pas plus que cela à la mort de Joyce le prouvait assez bien. Même si certains jetaient des regards dégoûtés à sa carcasse fumante, aucun n'aurait osé parler de crime impardonnable dans ces conditions. Évidemment, tous le maudissaient d'avoir ainsi pris la vie d'un si grand Vampire car chacun était conscient que cela n'avait été qu'une excuse pour qu'il se gorge de son pouvoir et gagne en puissance. Cette histoire ferait beaucoup de vagues dans le monde de la nuit : Jirômaru commençait à devenir bien trop dangereux...

Le groupe s'éloigna en silence. Mais, alors que le Comte les ignorait pour retourner auprès du cadavre de Joyce, son regard fut attiré par un petit objet qui tomba au sol. Ses yeux emplis de limbes reconnurent le petit poisson de la jeune fille.


- Valentine, laissez-moi l'enfant.

Tous les Vampires s'arrêtèrent et se tournèrent vers lui. Son regard brillait derrière ses longs cheveux blancs. Sa cape sanglante luisait à la lueur des lampes à huile. Ce tableau en marquerait plus d'un à vie. Jirômaru semblait soudainement vieux, vieux et terriblement puissant. Son regard était celui d'un homme las, brisé, mais aussi celui d'un tueur maculé de son crime.
Valentine hésita. Il gardait contre lui la petite qu'il tenait d'une épaule. Mais, lentement, il se détacha du groupe pour venir à la rencontre du Comte qui l'attendait.


- Serait-ce osé de vos demander ce que vous allez en faire, Seigneur Keisuke? Demanda-t-il avec une lueur de défit dans le regard.

Le Comte lui sourit en passant sa langue sur ses lèvres.


- A votre avis...?

Valentine frissonna et lâcha l'enfant.

- Oui...bien sûr...Nous pensions l'enterrer, la « celer », mais...vous pouvez en disposer...Bien entendu...

La Loi des Vampires condamnait à l'enfermement à vie quiconque transformait un Humain trop jeune. Cela était évidemment synonyme de mort et nombreux étaient ceux qui se permettaient de les achever en les « dévorant » ou en les exposant à la lumière du soleil. Pour les infants créés hors des lois, la sentence était similaire.
Valentine avait prévu d'enfermer la jeune fille dans un cercueil et de la brûler vive afin d'être certain qu'elle ne s'échapperait pas des catacombes. Mais si le Comte désirait s'emparer lui-même de sa vie, c'était son droit...Du moment qu'elle ne ressortait jamais des catacombes...

Une fois que tous les Vampires eurent disparu, Jirômaru ramassa la peluche en forme de poisson et vint s'agenouiller devant la petite. Il lui tendit son bien avec un sourire.


- Où en étions-nous ? Ha oui...Tu veux savoir pourquoi je ne vais pas le garder?

La fillette ne réagit pas. Le Vampire fronça les sourcils et claqua des doigts devant son jeune visage. Elle cilla et le regarda d'un air interrogateur.

- Parce qu'il va rester avec toi, pour toujours...

La fillette tendit la main et reprit son poisson. Ses yeux s'emplirent de larmes.

- Mais...Maître Joyce a dit que tu allais me manger...

- Maître Joyce s'est trompé...


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MessageSujet: Re: Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Icon_minitimeJeu 13 Mar - 9:44

Chapitre III – Entrave

- Dis-moi...Quel est ton nom ?

- Jenny.

- Hé bien...Jenny, nous allons bientôt sortir, mais avant j'aimerai que tu fasses quelque chose pour moi...

Le Comte donna la main à la jeune fille. Cette dernière n'hésita pas. Elle le suivit sans rien dire, serrant contre elle sa peluche de coton. Arrivé devant le lit de Joyce, Jirômaru s'arrêta et lâcha sa petite paume. Il souleva la couverture pour découvrir les deux jeunes garçons que son confrère avait abandonnés. Ils dormaient toujours. Le Vampire s'assied près d'eux, s'enfonçant dans le matelas fatigué. Glissant ses doigts sur le visage du plus vieux, le Comte essuya ses larmes presque sèches.

La fillette l'observait d'un œil posé. Ce grand monsieur aux longs cheveux blancs avait quelque chose de triste dans son regard. Il était étrange. Tout chez lui semblait froid et cruel, pourtant elle le trouvait beaucoup plus chaleureux que son maître. Il faisait peur, à sa façon, mais, quelque part, il la rassurait aussi. C'était comme si elle le connaissait depuis longtemps et que, quoi qu'il puisse lui faire, cela ne pouvait être qu'en sa faveur. Ce qu'elle ne savait pas, c'était que le fait que le Comte aie tué son maître en assimilant son sang le désignait automatiquement comme son nouveau maître. Son impression était donc surtout due à un instinct hiérarchique qui induisait son jeune esprit.

Jirômaru souleva le petit corps du garçon pour le maintenir contre lui. Doucement, il passa sa main devant son visage.
L'enfant s'éveilla soudainement. Il regarda autour de lui, perdu et affolé. Puis, voyant le Comte, il se débattit pour tenter de s'enfuir. Le Vampire le maintint fermement et lui prit le menton d'un geste un peu brusque. Il l'obligea à le regarder dans les yeux.


- Écoute. Fit-il fermement.

Le garçon s'immobilisa. Les yeux grands ouverts, il gémit un peu puis se tue complètement. Le Comte lui sourit.


- Tu vois cette jeune fille ? C'est Jenny. Elle va vous conduire, toi et...ton petit frère, à la salle d'eau pour vous laver. Réveille-le, habillez-vous et revenez ici. Nous allons partir tous ensemble.

L'enfant obéit. Il était sous l'emprise du Vampire mais aussi de ses peurs. Sa volonté était toujours présente mais il ne pouvait pas résister à cet ordre. Le Comte n'avait pas besoin d'user beaucoup de son pouvoir pour influencer un esprit si jeune afin qu'il soit obéi. Son statut d'adulte était déjà un poids.
Jenny avait compris son rôle. Elle allait devoir aider ces jeunes camarades à se laver un peu et à se vêtir. Cela sembla follement l'amuser. Prudent, Jirômaru se leva pour se pencher vers elle pendant que le jeune garçon réveillait doucement son petit frère.


- Jenny...Tu ne dois pas les mordre. Tu le sais ça? Il ont déjà mal...

- Oui. D'accord. Répondit-elle tout sourire.

C'était délicat. Jenny était un Vampire très jeune, trop jeune, et les deux enfants saignaient un peu. Un accident pouvait vite arriver.
Lorsque le plus jeune des deux garçons fut éveillé, son frère lui expliqua qu'ils allaient partir. Le petit commença à pleurer. Jenny sautilla alors jusqu'au lit et lui montra son poisson de coton.


- Tu viens ? On pourra le mettre dans l'eau!

Le Comte laissa les enfants se tendre les mains et former une ribambelle, la plus âgée devant, le plus jeune derrière. Puis, il les suivit pour vérifier qu'aucun Acolyte ne traînait dans le domaine de Joyce. Apparemment, comme à son habitude, il n'avait pas de mignon ni de serviteur de leur race. Un calice peut être, mais, s'il était là, ils ne l'avaient pas encore croisé. Comment son cofnrère avait-il pu vivre ainsi sans serviteur ? Cela avait toujours paru incongru au Comte. Un homme de son âge, de sa puissance et de son rang ne pouvait pas vivre décemment sans domestique ou disciple ! Il n'avait même pas une goule à son service...Jenny devait certainement avoir été créée récemment pour palier à cette absence de compagnon. Quel gâchis !

La salle d'eau était petite mais bien agencée. Lorsque Jirômaru en franchit le seuil, Jenny était déjà occupée à remplir la baignoire de fer blanc avec de l'eau qu'elle trouvait dans des seaux un peu plus loin.


- C'est froid...Fit-elle en haussant les épaules. Mais si on frotte ce sera mieux.

Le Comte resta quelques minutes, le temps d'aider la jeune fille à porter les seaux qui étaient, pour elle, d'un poids difficile à gérer ; le temps aussi de s'assurer que les enfants ne courraient plus aucun danger immédiat. Puis, il confia les garçons à Jenny qui avait déjà jeté son poisson dans le bac pour les pousser à le suivre. C'était une gamine drôlement mature pour son âge, et maligne. Joyce l'avait peut être choisie pour son esprit autant que pour ses magnifiques cheveux blonds...

**************

De retour dans la chambre, le Comte se tint un moment sur la terrible trace de sang qu'avait laissé le cadavre de Joyce. Les hommes de la Camarilla l'avaient emmené avec eux pour le brûler. Quelle plaie ! Cela ne l'arrangeait pas ! Il aurait voulu achever son œuvre. Joyce était mort, de cela il était certain, il ne comptait pas prendre le risque qu'il se régénère un jour, mais s'il avait pris son sang et réduit son corps en cet amas ignoble, il n'avait pas récupéré tout ses pouvoirs. Mais c'était désormais trop tard. Son esprit avait disparu, ses pouvoirs avec. Sa chair aurait pu être consommée par la Bête mais ce qu'il lui restait de fluide vital devait maintenant avoir un goût de poison...

- La peste ! Bande de crétins...

Le Comte fouilla la poche intérieure de son manteau et en tira une tête de rose blanche. Elle était un peu défraîchie et elle avait apparemment reçu un coup. Un de ses pétales était déchiré. Sans s'en préoccuper, le Vampire en respira le parfum. Il était léger, presque imperceptible, mais il était toujours là. Puis, avec un rictus méprisant, il laissa tomber ce petit bout de fleur sur le tapis gorgé de sang. Sa blancheur fut immédiatement souillée.

Jirômaru s'éloigna ensuite vers un fauteuil pour s'y asseoir. Dans un soupir, il se prit la tête dans une main. Comment allait-il bien pouvoir sortir ces trois enfants sans déclencher un conflit ? Il comptait certes sur son autorité et sa force, mais il n'était pas assez fou pour croire qu'il pourrait emporter avec lui deux Humains sans attirer les regards ni, surtout, quitter les catacombes avec une infante hors des lois...S'il s'était trouvé une excuse pour tuer Joyce, la Camarilla n'attendait que son tour d'en trouver une pour le coincer. Un Prince qui contourne ses propres lois ne peut pas espérer conserver le respect de ses confrères. Lui aussi il pouvait être jugé, malgré son âge, malgré son statut. La société vampirique était bâtie autour de principes ancestraux qui ne pouvaient pas être bafoués à tout va. Depuis la fin des Sang Purs, la hiérarchie passait par un rapport de force et une politique à laquelle chacun devait se tenir. Jirômaru n'était pas indétrônable et il en avait fortement conscience.

Comme pour confirmer ses pensées, son nez se remit à saigner. Sortant un mouchoir d'une de ses poches de pantalon, le Comte fit pression dessus en grognant de colère. Décidément, pénétrer l'esprit de Glen avait été une bien mauvaise idée ! Même s'il en avait appris plus que jamais sur la Mère, il l'avait payé cher, peut-être trop cher. Il ne pouvait plus utiliser ses dons psychiques sans en souffrir. Cependant, pour une fois, il se trompait sur la source de son mal. Ce n'était pas le fait d'avoir un peu usé de son don de fascination ou d'injonction sur l'enfant qui altérait maintenant la blancheur de son mouchoir, ni son combat contre Joyce, mais bien le fait d'avoir dévoré ce dernier. Son corps, quoique habitué aux tourments, ne pouvait contenir aussi facilement autant de pouvoir et de sang. Quelques siècles plus tôt, il n'avait pas réussi à ingérer son maître, son corps l'avait entièrement rejeté. Aujourd'hui, assimiler un Vampire lui était encore difficile.


- T'es malade?

Le Comte sursauta. Jenny se tenait là, près de lui. Elle le regardait d'un air intrigué. Sa petite main tenait celle du plus jeune garçon. L'autre les suivait, le poisson en peluche dans les mains. Ce dernier dégouttait sur le tapis et l'enfant en semblait gêné. Tous étaient vêtus.

- Hein ? T'es malade?

Jirômaru sourit à la fillette et se leva pour lui ébouriffer les cheveux.

- Un peu...Mais ce n'est pas grave. Vous êtes prêts ? On va sortir...

Les enfants avaient nettoyé leurs petits corps bien plus rapidement que ce à quoi s'était attendu le Comte. Et même si le plus jeune portait sa chemise à l'envers, au moins leur jeune nudité n'était-elle plus infamante pour eux. Jenny semblait les avoir adoptés. Elle leur avait demandé leurs noms pendant leur "bain". C'était Garry pour le plus vieux et Peter pour le plus jeune. Pimpante, elle les avait répétés au Comte qui rangeait son mouchoir avant de le suivre vers la porte d'entrée.

**************
Lorsqu'ils franchirent le seuil de la demeure de Joyce, le Comte, sur ses gardes, fut surpris de ne trouver personne dans les couloirs sombres des catacombes. Prudent, il tenait dans sa main celle de Jenny qui tenait celle de Peter. Garry suivait sans jamais s'éloigner des autres.
Sondant la zone de son esprit, Jirômaru fronça les sourcils : pourquoi avaient-ils ainsi laissé autant d'espace ? A quoi jouait donc la Camarilla ? Il n'y avait plus personne dans les couloirs. Pourtant, le jour n'était pas encore prêt de poindre. Le soleil caresserait la surface de la terre d'ici au moins deux heures. Étaient-ils tous de sortie ? Non...Ils n'auraient jamais laissé leur domaine vide alors qu'il y était. Était-ce par respect ou par crainte qu'ils le laissaient ainsi partir ?


- Maître Joyce est parti? Demanda Jenny de sa petite voix claire.

- Chuuut...Il ne faut pas parler Jenny...Lui répondit le Comte un doigt sur les lèvres. Maître Joyce est parti, mais ses amis peuvent encore nous faire du mal, tu comprends?

La petite eut un rictus dubitatif, comme si elle doutait fortement que quiconque puisse lui faire du mal dans ces souterrains. C'était une réaction étrange que le Comte ne releva pas tant il était occupé à vérifier la voie qu'ils empruntaient. Peter serra un peu plus fort la main de la jeune fille et Garry pressa un peu la peluche pour en faire partir l'eau.

Au bout d'une demi-heure, alors qu'ils n'avaient rencontré personne jusqu'ici, les souterrains semblèrent soudainement s'animer. Des Vampires apparurent au détour des tunnels. Ils restaient dans l'ombre, loin des torches qui s'agitaient contre les murs et esquissaient une courbette au passage du Comte. Ce dernier les ignorait, se contentant d'avancer le plus rapidement possible avec les enfants. Mais bientôt il ne pu continuer sans jouer de son aura. Les Vampires se firent de plus en plus nombreux et il remarqua que leurs regards brillants s'attardaient sur les deux garçons. Il ne fallait pas traîner.
Pour s'était-il ainsi encombré de trois enfants ? Deux Humains et une infante hors des lois...C'était ridicule ! Mais son heure approchait et il opérait désormais comme il l'avait toujours voulu. Ces deux gamins lui faisaient pitié et Jenny, même si elle était désormais de l'autre monde elle aussi, pourrait toujours lui servir.


- Monseigneur...Ravi de vous rencontrer...

Le Comte ne s'arrêta pas. A peine jeta-t-il un regard à cet Acolyte qui lui faisait une courbette. Mais lorsque ce dernier attrapa Garry par le bras, le cri que poussa le garçon fut aussitôt couvert par le hurlement de peur que l'Acolyte poussa : le Comte le tenait déjà par la gorge tout crocs sortis.

- Oserais-tu me voler mon bien?

- ...NON...NON...Monseigneur...pardonnez-moi!

Le Comte le jeta à terre en l'écrasant d'un regard avant de prendre Garry dans ses bras pour le porter et continuer son chemin. Il ne fallait plus perdre une minute. Le piège se resserrait, il le sentait. Jenny avait rit en regardant l'Acolyte à terre, puis elle avait suivit les pas de son nouveau maître en secouant un peu le petit Peter qui semblait transit de peur.

- Aller, dépêchez-vous.

Qu'allait-il faire de ces gosses ? Pourquoi prendre autant de risques inutiles ? Songer que c'était sa part d'Humanité qui resurgissait relevait de l'idylle, mais le Comte était seul et, dans sa solitude, il n'était jamais le même qu'en présence de ses disciples ou de ses confrères. La Camarilla et ses fidèles l'avaient toujours connu sous son plus terrible jour car aucune situation n'avait exigé de lui qu'il bascule de leur monde à celui de sa propre mascarade. Mais aujourd'hui, il devait faire un choix : celui de laisser mourir ces enfants pour affirmer une fois pour toute son statut souverain ou celui de les sauver et de détruire ce qu'il restait de son image de Prince.

Contre son torse, il sentit qu'une petite chose trempée imbibait le tissu de sa chemise. C'était la peluche que tenait toujours le garçon. Il s'en fallu de peu que le Comte ne l'abandonne mais il sentit ses petits doigts s'intéresser au col de son manteau et sa foi en ses plus grandes convictions l'envahit. Il accéléra le pas. Jenny trottina en tirant sur la main de Peter.


Monseigneur...
Que faites-vous? Sir...Pourquoi tant de hâte?
C'est pour qui?
Où va-t-il ?
Venez vous rafraîchir...
Cette petite est un crime !
Monseigneur...
C'est ridicule !
Accordez votre regard...
Qu'a-t-il fait à Joyce ?
Elle est trop jeune...


Ils sortaient de l'ombre, de leurs demeures, de tunnels annexes. Ils chuchotaient et se rapprochaient toujours davantage. Ils frôlaient les enfants de leurs griffes...C'était insupportable !
L'aura du Comte les écrasa tous, les forçant à garder leurs distances. Jenny en fut mal à l'aise et Peter pris le relais pour la tirer en avant. La sortie n'était plus très loin. Pourquoi n'avait-il pas pris le même chemin qu'en entrant ? Il s'était considérablement allongé la distance qui le séparait à la nuit.

Enfin, ils furent de nouveau seuls. Les Vampires ne les avaient pas suivis. C'était une chance ! Mais quelque chose fit ralentir le Comte. Ses sens avaient repéré une odeur particulière : celle de ce poison noir qu'utilisaient les Hunter dans leurs armes anti-vampires.


- Jenny, reste près d...

Un trait noir transperça le Comte de part en part. Il avait surgit du plafond dans un flash lumineux et lui était entré dans le corps par son omoplate gauche avant de se ficher au sol comme une lance faite de ténèbres. Jirômaru poussa un cri de douleur et laissa tomber Garry qui atterrit durement sur le sol glacé du tunnel. Un second trait obligea le Vampire à plier, il s'était fiché dans son genoux gauche, puis un troisième lui traversa le bras droit, un quatrième bloqua sa cuisse droite, un cinquième son mollet gauche...Bientôt, le Vampire fut pris dans un entremêlement de lances noires qui l'immobilisaient au sol dans une position grotesque. Jirômaru hurla sa rage et sa souffrance. Jenny attrapa Garry par la manche et le ramena à elle. Peter se mit à pleurer de peur.
Tout s'était passé à une vitesse phénoménale.

Le sang du Comte ne coulait pas. Ces lances faisaient partie d'un piège élaboré par les Hunters d'autrefois, c'était une « Entrave », une cage pour Vampires...


Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Comte_16

Shakespeare, Macbeth, I, 4, 1605 :

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Comte Keï
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MessageSujet: Re: Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Icon_minitimeLun 24 Mar - 0:25

Chapitre IV – Ave Maria

Alors que l'on pense toucher du bout des doigts les ténèbres les plus profondes, il y a toujours un monstre, avatar du Démon, prêt à nous dévoiler un nouveau gouffre, plus abrupte, plus cruel, plus proche de notre suintant péché...

- Tiens, tiens, tiens, mais que vois-je ? Ne serait-ce pas notre cher comte Keisuke?

Il était là, ses cheveux effilochés luisaient à la lueur des torches lointaines. Son regard, aussi étriqué que celui d'un cafard, le regardait comme un enfant observe une mouche prise au piège dans une toile d'araignée. Légèrement courbé en avant, il était sorti de l'ombre lorsque l'Entrave l'avait entièrement immobilisé.
Thomas Rowe...Une figure connue de l'Ombre. C'était un noble abject, partisan de la Camarilla dans le seul vrai but de protéger son « fils » du Sabbat qui le poursuivait de ses rancœurs. Rowe était en effet un membre du clan des Tzimisces, un clan très largement opposé à celui de la Camarilla et l'un des fondateurs du Sabbat, mais son éloignement précoce et sa prétendue volonté de « justice » et de « paix » avait presque effacé ses origines sauf pour quelques connaisseurs. Aussi était-ce un hypocrite, sournois et calculateur, un tueur sans scrupule, tout juste assez discret pour éviter d'attirer sur lui les foudres de ses supérieurs hiérarchiques.
Le Comte le connaissait d'une aventure qui les avait réunis dans la tourmente d'une nuit d'hiver, à Birmingham. Tous les deux avaient été invités, il y avait maintenant presque un siècle et demi, à un bal où le gratin de leur race avait été rassemblé par le Marquis de Postlethwaite, un aimable membre de son clan, les Ventrues. Rowe, qui n'avait pas supporté le poids de son aîné, avait été d'une insolence très désobligeante à son égard. Il avait, en outre, manqué de tuer une domestique humaine et le Comte l'en avait empêché de justesse. La soirée avait ainsi pu être sauvée mais le poison de la haine en avait profité pour se faufiler dans leurs veines.

A ses côtés, quatre autres Vampires, des Acolytes, riaient dans la pénombre. Ils avaient attrapé les enfants qui se débattaient en pleurant. Seule Jenny ne gesticulait pas beaucoup, préférant essayer de mordre les mains de son agresseur plutôt que de tenter de réellement s'extirper de son étreinte. Rowe, lui, affichait un sourire amplement satisfait.
Approchant un peu plus de Jirômaru, il le toisa de haut, profitant que son confère soit prisonnier des liens perfides de l'Entrave.


- Alors ? Qu'en pense notre nouveau Saint Sébastien ? J'espère que ce n'est pas trop inconfortable... ?

- RECULE ! Hurla le Comte en faisant un geste comme pour le mordre. Ses cheveux blancs en bataille battaient un visage crispé par la rage.

- Ho mais c'est qu'il mordrait l'animal...Rit l'autre en s'éloignant d'un air amusé. Au fait, c'est gentil de nous avoir apporté un peu de nourriture...

Le regard du Comte tomba sur les enfants. Garry se débattait dans les bras d'un Vampire de grande taille qui le tenait d'une seule main. Peter pleurait, complètement incapable de bouger ne serait-ce qu'un doigt tellement celui qui l'avait attrapé lui serrait les poignets dans son petit dos. Jenny montrait les dents et crachait comme un chat sans pour autant bouger. Lorsqu'elle vit que le Comte la regardait, elle lui sourit d'un air désolé.
Cela déstabilisa un instant le Vampire qui, perplexe, se sentit transpercé d'un sentiment qu'il n'avait plus éprouvé depuis longtemps...

Rowe arracha alors soudainement Garry aux mains de son complice avant de le jeter à terre sans pitié. La peluche de coton en forme de poisson vola contre un mur et resta inerte sur le sol. Le Comte le foudroya de son regard brumeux.


- TOUCHE-LES ET JE TE PROMETS QUE L'ENFER NE SERA QU'UNE CARRESSE LORSQUE JE T'AURAI ENTRE MES MAINS!

A ce cri terrible qui fit frémir les Acolytes, Rowe s'arrêta alors qu'il s'apprêtait à mettre un coup de pied dans l'enfant qui se relevait tout tremblant. Lentement, il se retourna vers son confrère.

- Ho.. ? Serais-tu donc devenu sentimental Jirômaru? Fit-il avec surprise.

- Ce sont MES proies! Répondit l'ex-samouraï en crachant sa colère.

Le Vampire leva un sourcil et revint vers son aîné. Il alla jusqu'à s'accroupir devant lui pour mieux le dévisager d'un air moqueur.


- Ils ne portent pas ta marque mais celle de Joyce...Et Joyce...tu l'as tué non ? Ils ne sont donc à personne ! C'est au premier de les croquer que reviendra l'appartenance...

- Je t'ai dit de RECULER!

Jirômaru sentait ses forces l'abandonner. Lui qui venait pourtant de se gorger d'un nouveau pouvoir se retrouvait piégé, incapable d'esquisser le moindre geste. Serrant les crocs, il tenta de dégager l'un de ses bras mais aucun de ses muscles ne répondait plus. L'Entrave était puissante, elle était ancienne, aussi ancienne que la fin de la Guilde des Hunters, et le seul moyen de la désactiver était de briser le symbole qui était dessiné au plafond au-dessus de sa tête. Impossible pour lui...

Rowe s'approcha d'avantage, un sourire victorieux trônait sur ses lèvres étirées. Son regard se fit plus sournois que jamais et, dans un souffle, il murmura près de la joue du Comte quelques mots menaçants tout en approchant sa main de son visage :


- Tu es un criminel, moi je le sais...Et ce sang qui coule dans tes veines...ce sang si puissant...

Ses doigts entrèrent en contact avec la peau de Jirômaru qui avait les canines sorties à leur maximum. Le dégoût et la plus terrible des haines défigurait chacun de ses traits. S'il l'avait pu, il lui aurait arraché la tête ! Comment osait-il le toucher !?

Ce sang...il m'appartiendra bientôt ou ne sera à personne ! Je vais observer chacune de ses gouttes souiller ce sol...

Sa main glissa le long du cou de son confrère et, soudain, une perle écarlate glissa sur la surface de son ongle planté dans sa peau blanche. L'aura de son aîné, jusqu'alors étouffée par l'Entrave, se libéra. Les Acolytes reculèrent mais Rowe se mit à rire avec démence.

- Ho oui ! Tu es plus fort encore que je ne le croyais, mais même toi tu ne peux briser ces liens! Hahaha !

Il crispa ses doigts autour du cou de Jirômaru et tous ses ongles percèrent sa peau de la même manière. Le Vampire tenta de se dégager mais les lances noires aspiraient la moindre parcelle de force qu'il déployait. Rowe approcha ses crocs.

- Non...Je ne vais pas attendre...Ce serait idiot...Je vais te dévorer maintenant ! Ton pouvoir et celui de Joyce seront à moi ! Celui de tout ceux que tu as dévorés avant lui aussi ! Ce ne sera pas long...

**************

Une sensation glacée le long de son cou...Une lame qui glisse contre sa jugulaire...Un frisson...Une mort certaine...

- Lâche . mon . maître .

Une silhouette se découpait dans l'ombre derrière Rowe.
Ces mots, durs et froids, taillés à la hache, c'était une femme qui venait de les prononcer. Elle tenait un long fleuret dont la lame n'avait qu'à recevoir un coup de poignet pour égorger le Vampire.
Rowe tourna lentement la tête dans sa direction, pris de court. Il gardait les mains levées en signe de paix, hautement perturbé par la lame qui frôlait son artère.


- ...Ton...maître? Demanda-t-il d'une voix quelque peu aiguë.

Le Comte ne pouvait lever la tête assez haut pour voir qui était la nouvelle venue mais il n'avait pas besoin de la regarder pour savoir qui c'était...Son parfum, il l'aurait reconnu parmi mille autres. N'avait-elle pas été son amante pendant près de dix ans ?


- Maria...

Les lances de ténèbres qui l'entravaient se fissurèrent soudainement dans un craquement sinistre et bientôt elles disparurent dans une bourrasque de poussière noire. Le Comte se retrouva contre le sol, libéré de ses liens. L'Entrave avait été brisée.
Une main noire comme la nuit lui fut tendue. Son regard de brume se leva sur elle et, avec un sourire mesquin, il la prit pour se relever.


- N...Non...Non ! NON!

Rowe paniquait. Que faisait donc cette femme ici ? Comment avait-elle pu l'atteindre alors qu'il avait avec lui quatre Acolytes ? Et ce grand noir qui portait un tas de colliers tribaux sur son torse dénudé...Qu'est-ce que c'était ? Comment avait-il pu balafrer ainsi le symbole de son piège et libérer le Comte ?!

Un poignard à lame d'argent traversa soudainement son poitrail. La douleur fut terrible mais le Vampire n'eut que le temps de cracher une gerbe de sang avant de recevoir la semelle d'une botte de cuir dans la face. Son nez fut écrasé sous le choc et sa tête partit en arrière jusqu'à ce qu'elle ne heurte les dalles humides du tunnel.
Son cri résonna contre les murs arrondis pendant que le Comte essuyait son poignard sur sa propre manche carmin. Une lueur meurtrière animait son long visage. Rowe resta affalé sur le dos dans une position grotesque. Ses mains se crispèrent sur sa blessure qui grésillait. Un râle ignoble sortit de sa gorge. Mais, déjà, le monde entier l'oubliait...

Lorsqu'il se tourna vers les enfants, Jirômaru les trouva libres en compagnie de deux visages familiers. Les autres Vampires gisaient comme des poupées de chiffon sur le sol.

Maria, Manouk, Marco et même Ambre étaient là...


- Venez maître, il faut partir.

Le Comte sourit à l'Allemand aux cheveux blonds. Ce qu'ils faisaient tous là était évident : ils étaient venus le chercher, inquiets de ne pas le voir revenir à ses heures habituelles. Mais comment l'avaient-ils retrouvés ? Son regard tomba sur Maria. Elle seule savait ce qu'il était parti faire...L'avait-elle donc trahi ? Il lui avait pourtant fait promettre...

- Maître ! Vos yeux! S'écria-t-elle en lâchant son fleuret de surprise.

L'arme teinta à terre comme le glas final d'un duel à mort. Le Comte fronça les sourcils d'un air inquiet en lui faisant totalement face.


- Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? Tu n'es pas encore hab...

- Ils sont noirs!

Manouk attrapa le Comte par une épaule pour le tourner vers lui. Ce dernier se dégagea en grognant de colère mais le géant à la peau noire semblait tout aussi surpris que sa consœur, ce qui l'alerta assez pour qu'il ne puisse que se poser d'avantage de questions.

- Ils sont...redevenus normaux...? Souffla Ambre les mains jointes sur sa bouche.

Jirômaru sentit monter en lui un mélange de crainte et de joie. Qu'est-ce que c'était que cette histoire ? Lui qui avait perdu son iris dans sa longue errance sur les terres glacées de l'Est, il y avait plus de 550 ans...C'était insensé !


- C'est pas noir, c'est marron...marron très foncé...Fit soudain la jeune Jenny en lâchant la main d'Ambre pour s'approcher du Comte.

La petite l'observa un instant et lui sourit.


- T'es moins malade maintenant hein ?

Jirômaru resta interdit. Il la regarda, perdu dans un océan de pensées. C'était donc vrai ? Ses yeux avaient-ils réellement changé ? Était-ce, comme le suggérait la petite, une forme de guérison ?

- Maître, il faut partir.

Manouk avait remarqué que les Acolytes remuaient un peu. Son poison ne ferait bientôt d'effet à cause de leurs capacités régénératives et il était grand temps de quitter ces lieux infestés de chiens à la solde de la Camarilla. L'état de son maître le préoccupait et il se demandait ce qu'il pouvait bien faire avec ces trois enfants mais le plus important était de s'éloigner des Vampires de ce tunnel et de trouver refuge avant l'aube.

Ambre prit Gerry dans ses bras, Manouk souleva Peter et Jenny se laissa porter par Marco. Maria resta encore un instant figée devant le Comte dont les yeux avaient perdu leur voile de brume. Cette vision la troublait profondément. Jamais Jirômaru n'avait paru plus effrayant mais aussi plus humain...


**************

Le Comte et ses compagnons quittèrent les catacombes en toute hâte, abandonnant derrière eux Rowe et ses complices sans se retourner. Jenny chantonnait quelque chose à l'Allemand qui la tenait d'un bras contre sa hanche. Peter ne disait mot dans les bras du grand noir qui l'avait quelque peu endormi. Garry avait l'air perdu, le nez dans les boucles rousses de la comédienne.

- Le poisson! Fit-il en se redressant soudainement d'un air paniqué.

- Tiens, je l'ai ramassé, ne t'en fais pas... Fit aussitôt Maria en lui tendant la peluche.

Le gamin la saisit en poussant un soupir de soulagement.

Des catacombes, le groupe passa dans les égouts. De là, regagner l'Opéra sans sortir sous les rayons de l'aube était facile, il suffisait de suivre les noms des rues répétés dans les tunnels nauséabonds qui s'enfonçaient sous les pieds des londoniens et connaître les passages de son repaire...


[HRP/ Suite sous l'Opéra, post "Abysses"[/HRP]


Un goût de péché originel [Comte] [05/04/42] Comte_16

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