Né en 1253 dans le Japon médiéval, sous le 89ème empereur, Go-Fukakusa, Jirômaru Keisuke reçut dès son plus jeune âge l’éducation de son père, Yotyla Keïsuke, un samouraï de renom au service de l'empereur. Son enfance fut morne puisqu'il vécut presque seul : son père était souvent en guerre et sa mère était morte en couche. Il n'avait ni frère, ni sœur, seulement une nourrice qui le bordait le soir et un précepteur austère qui lui apprenait les bases de l'écriture, de la lecture et des traditions de son pays.
Dès ses six ans, Jirômaru fut formé aux armes et à l’art de la guerre par un maître samouraï. Son destin était tout tracé, à la fois par les traditions et par la volonté de son père. Ainsi, il ne put faire aucun choix. Cela le conditionna très tôt. Pour le plus grand plaisir de son père, le jeune garçon se montra exceptionnellement doué dans les disciplines martiales et tomba rapidement amoureux de la guerre.
Il faut noter qu'en l'absence d'amour maternel et de camarade de jeu, Jirômaru passait son temps libre à étudier, cherchant toujours ce qui pouvait l'instruire d'avantage. Naturellement, il s'intéressa très tôt aux stratégies militaires pour parfaire ses connaissances guerrières. Sa jeunesse ne fut donc guère joyeuse mais elle en fit une des plus fines lames de son temps.
Jirômaru grandit sans jamais tomber amoureux, sans jamais se destiner à autre chose qu'à la guerre. Il s'entraînait presque jour et nuit avec son maître, ne laissant son corps se reposer que lorsqu'il mangeait. C'était devenu un mode de vie, une obsession. Entre ses 15 ans et ses 19 ans, il se fit quelques compagnons d'arme avec lesquels il s'entraînait toujours, cherchant l'excellence sans jamais goûter la saveur de la vie. Jirômaru maîtrisa rapidement l’art du kendo et il fut bientôt connu dans son village pour sa foi envers les principes du Bushido et sa bonté. Il était en effet toujours prêt à défendre l'opprimé ou à éloigner les bandits des montagnes avec les guerriers affectés à la protection du village. C'était un jeune très prometteur, que les anciens auraient voulu garder auprès d'eux. Mais son avenir allait l'éloigner sensiblement de ses origines...

L'année de ses 21 ans, son père mourut. Une maladie pulmonaire, dont l'origine ne fut jamais connue de son fils et qui rongeait le pauvre homme depuis plusieurs années, finit par avoir raison de lui. Lorsqu'il sentit que son heure était venue, il confia à son fils son sabre et lui conjura de faire passer le nom de leur famille à travers les siècles : l'honneur et la gloire devaient être ses principaux buts. Ainsi Jirômaru reprit-il le flambeau de son père et il finit par entrer dans l'armée spéciale de l'empereur. Pendant des années il se perfectionna dans l'art de la guerre et devint l'un des plus jeunes et des plus grands stratèges de son temps. Le nom des Keisuke marqua l'Histoire de sa région natale.

Ainsi, Jirômaru enfouit ses sentiments derrière une lourde cuirasse de fer et devint peu à peu un véritable homme de guerre, veillant à la protection de l'empereur, au bien-être du peuple et surtout à l'anéantissement des ennemis de sa nation. Il fut un des samouraïs les plus nobles et les plus respectés de son ère. Non seulement sa force et son courage ne trouvaient pas d'adversaire à sa taille mais en plus sa jeunesse et sa bonté d'âme en faisait un homme admirable.

Puis, l'année de ses 28 ans, en 1281, alors qu’il était parti en expédition avec une unité de jeunes guerriers qu'il devait former, un Vampire du nom de Sendori Matosaï détruisit sa vie. Au coeur d'une rizière, ses hommes et lui tombèrent dans une embuscade tendue par des Créatures de la Nuit. Sans savoir ce qui leur arrivait, persuadés qu'ils avaient affaire à un clan rebelle, ils luttèrent pour leur survie et l'anéantissement de leurs ennemis. Seulement, face à pareilles créatures, ils n'avaient aucune chance. Jirômaru fut bientôt parmi les derniers encore debout. L'un des Vampire, un dénommé Matosaï, l'isola alors et, pendant que ce qu'il restait de ses hommes hurlait dans les herbes, l'être de l'Ombre planta ses canines dans la peau tendre de son cou. Ne souhaitant plus vivre pour lui-même, le vieil être de la nuit avait choisi Jirômaru comme compagnon et infant. Tandis que le jeune samouraï mourait dans ses bras, la vile créature lui proposa de devenir son successeur, d'obtenir un don fabuleux : celui de l'immortalité.
Faisant preuve d'une lâcheté inattendue, le samouraï voulut sauver les dernières gouttes de sa vie qui s'écoulaient entre les terribles crocs de cet être surnaturel. Il accepta donc l'offre empoisonnée de celui qu'il allait bientôt devoir appeler "maître" et but son sang maudit pour obtenir une seconde vie.

Lorsqu’il revint chez lui, les sens sur-développés, doté d'une nouvelle vision du monde et de pouvoirs encore latents, ses instincts meurtriers et sa soif de sang eurent raison de ses quatre serviteurs. Jirômaru réalisa alors qu'il venait de faire une terrible erreur et que, s'il lui restait une âme, cette dernière était corrompue par le démon.
Il fuit donc le pays en proie à une douleur infernale : lui qui avait combattu le mal depuis tant d'années faisait maintenant partie de ceux qui ne méritaient pas de vivre. Il ne voulait pas blesser les siens, ni entacher l'honneur de sa famille. Il aurait dû mourir ce soir-là, il partirait donc en se faisant passer pour mort.
De son ancienne vie, il n'emporta que son sabre et son couteau au manche d'ivoire tandis qu'il dissimulait son armure de samouraï dans le caveau de sa famille.

Dans sa course, il fut rejoint par son créateur qui, malgré le refus de son infant, l’aida à survivre dans sa nouvelle vie en apparaissant sur son chemin de manière toujours inattendue et pourtant calculée...

Russie
1281-1284

Jirômaru traversa les terres gelées de l'actuelle Russie et rencontra bien des peuples, certains barbares d'autres illustres. C'est durant cette période qu'il tomba gravement malade et qu'il perdit ses cheveux. C'est là qu'il faillit périr dans les steppes gelées et qu'il s'abandonna à la plus terrible des dépressions. Son créateur tenta de lui redonner envie de vivre, car son disciple tenta plusieurs fois de se supprimer lui-même, sans succès. En Russie, Jirômaru ressentit la morsure du froid, malgré sa nouvelle nature, la faim la plus cruelle, la honte la plus tenace. A part cet être abominable qu'était son "maître", il était seul et la vision de ses hommes massacrés profondément ancrée dans son esprit le torturait constamment. Il haïssait ces crocs dans sa bouche, ces envies meurtrières qui le traversaient...Il haïssait son choix. Il se haïssait.
Finalement, après six mois de dépression, alors que son corps avait presque atteint un seuil de non-retour, même pour un Vampire, il se releva soudainement. Son esprit meurtri commençait en effet à ourdir des plans de vengeance, véritable motivation pour vivre lorsque l'on n'a plus rien. Il accepta l'aide de Matosaï, même si cela le gonfla de rage, dans l'unique but d'obtenir assez de force pour lui faire payer ce qu'il lui avait fait subir. Sa route reprit donc, malgré sa souffrance silencieuse. Il buvait le sang des animaux qu'il réussissait à capturer, évitant soigneusement les Humains. Parfois, son créateur lui donnait un peu du sien pour assurer sa survie. Cela contribua grandement au transfert de son pouvoir des ombres. Ainsi, sans le savoir, le vieux Vampire renforçait l'être qui mettrait un terme à son immortalité...


Mongolie
1284-1287

Le jeune Vampire finit par arriver en Mongolie où il découvrit le calme des collines et des plaines. Il y apprit à vivre la nuit, à lire dans les ténèbres et à écouter les sons cachés aux mortels. A cette époque, son créateur disparut soudainement durant une longue période. Les raisons de cet éloignement ne furent jamais connues de l'ex-samouraï mais le Comte pense aujourd'hui que Matosaï l'a volontairement laissé seul afin qu'il se débrouille par lui-même et se refasse une santé qui se dégradait systématiquement en sa présence. Il survécut donc en ces lieux tout d'abord en solitaire, grâce à son nouveau corps et aux animaux dont il se nourrissait parfois. Mais plus il avançait dans le monde et plus il lui était difficile de résister au goût du sang humain et à la mort qui revenait le hanter…

La Mongolie fut une des étapes les plus importantes de son existence vampirique. C'est là qu'il réussit à reprendre quelque peu goût à la vie par lui-même et qu'il rencontra notamment une tribu mongole, la tribu d'Orlen, qui devint presque une seconde famille. Ses cheveux repoussèrent pendant cette période paix. Ils poussèrent vite et restèrent d'un blanc étonnamment pur. L'origine de ce phénomène n'est pas certaine : la dépression et son don vampirique se seraient mêlés pour donner naissance à cette teinte particulière. Depuis, il se fait passer pour un albinos aux yeux des mortels lorsqu'il ne les teints pas pour se refaire une identité. Aujourd'hui, il a compris que son Don a été altéré dès cette époque et que sa dégénérescence se préparait déjà.
Discret, malgré son mal, accepté de tous dans la tribu, il vécut parmi les Mongoles dans une paix qu'il n'aurait jamais espérée. Il s'intégra rapidement, grâce à la bienveillance des Orlen et n'eut jamais à regretter aucune faute : il buvait le sang des animaux qu'il chassait avec eux le soir et se retint toujours de les mordre. Pourquoi la tribu acceptait-elle un être de son espèce ? Il ne vivait que la nuit, se nourrissait uniquement de sang, ses cheveux étaient blancs comme la neige, ses canines plus pointues que celles de n'importe qui...Il était tout bonnement effrayant ! Mais la tribu d'Orlen avait une loi, une loi sacrée, qui avait instauré qu'il ne fallait jamais condamner quiconque sans avoir de réelle raison. Jirômaru ne blessa jamais personne, au contraire, son aide guerrière fut la bienvenue en cette périodenet son amabilité ne leur fit jamais défaut. De plus, il était arrivé avec un enfant dans les bras, le jeune Kushi (Vie Heureuse), qui s'était foulé une cheville dans une plaine alentour et que l'on ne retrouvait plus depuis plusieurs jours. Cela avait suffit à ce peuple sage et bon pour l'accueillir sans le mettre à mal à cause de sa nature. D'ailleurs, ils n'avaient pas eu dans leur folklore d'histoires concernant les Vampires. Ils se firent donc leur propre définition de ces êtres surnaturels et appelèrent Jirômaru "Mönkh-Erdene" qui signifie Joyau éternel.

Un jour, l'ex-samouraï aida même une jeune femme, Bolormaa (femme de cristal) à accoucher d'une petite fille. Cet événement marqua sa vie bien plus qu'il ne l'aurait imaginé. Les petits yeux couleur noisette du nouveau-né le frappèrent par leur innocence. Le Vampire qu'il était fut alors complètement retourné à l'idée qu'il ne pouvait plus avoir de descendance à cause de sa nature. Cette prise de conscience le blessa violemment. Il plaça donc toute son affection en cette enfant, comme un désespéré. Il eut même l'honneur de choisir le nom de la petite, sa mère lui accordant toute sa reconnaissance. En souvenir de son défunt mari, tué au combat dans les plaines glacées, elle ne lui demanda qu'une chose : que son nom finisse par un "a". Jirômaru la nomma ainsi Sarantuyaa, un nom mongol qui signifie "Rayon de lune". Il commença alors à lui servir de père, sans pour autant développer quoi que ce soit de sentimental ou de charnel avec sa mère qu'il appréciait comme tous les autres membres d'Orlen.

Mais alors que Jirômaru songeait à rester pour toujours dans cette tribu, l'Appel du Sang le força à s'en éloigner. Son corps recommençait à dépérir, malgré sa bonne volonté, et il lui devint bientôt insupportable de côtoyer des Humains. C'est donc le coeur lourd qu'il abandonna ce qui aurait pu devenir son nouveau foyer pour une quête insensée : celle de la maîtrise de soi.



Trahison de l'amour
1288-1289

Après un an de voyage solitaire, pendant lequel il développa un goût particulier pour la poésie nocturne et la musique, il arriva en l’actuelle Transylvanie en 1288. C'est là que sa raison se perdit dans l'amour et la haine.

A nouveau faible et désespéré, refusant de se nourrir depuis quelques temps, ses forces l'abandonnèrent. Un matin, alors qu'il était au seuil de la mort, il fut recueilli de justesse par une jeune femme, dont le teint pur et les mains d'une douceur incomparable marquèrent violemment le coeur de Jirômaru. Ce fut comme l'arrivée d'un ange. La belle jeune femme aux cheveux dorés, nommée Elonie, ne cessait de prendre soin de lui. Ainsi, durant cinq mois, il vécut avec elle en cachant sa véritable nature derrière le masque de la maladie. Mais son esprit se perdit peu à peu dans les ténèbres de ses cauchemars et son amour, qui ne cessait de grandir pour elle, fut anéanti...

Un jour, alors que l'aube brillait déjà sur la rosée pendue aux branches des arbres, Elonie quitta ses bras pour ouvrir les rideaux d'un coup sec. Elle pensait que son amant était enfin suffisamment rétabli pour apprécier la lumière du jour. Jirômaru, trop plein de son bonheur, ne réagit pas assez tôt pour éviter la brûlure du soleil levant. Il crut mourir à nouveau et, la dernière chose qu'il vit avant de sombrer fut le regard horrifié de son amour qui réalisait que son amant n'était pas de ce monde.
Lorsqu'il revint à lui, terriblement blessé et cruellement affaibli, Jirômaru était enfermé dans une cave humide. Ses geôliers ne répondirent pas à ses questions : où était Elonie ? Que faisait-il là ? Que s'était-il passé après sa chute ? Durant deux semaines, le Vampire moisit ainsi dans cette cave sans voir personne. Mise à part une main d'homme glissée dans une ouverture de la porte pour lui donner une gamelle ridicule, rien de vivant n'était à sa disposition, même pas un rat. Au bord de la mort, Jirômaru s'accrocha à son Don Obscur.
Un soir de pleine lune, il réussit à sortir de sa prison de pierre et de misère grâce à ses pouvoirs de Vampire. L'ombre fut son alliée, même si la lune en rongeait les bords. Le geôlier vidé de son sang, l'ex-samouraï retrouva quelques forces et parvint à atteindre la maison où Elonie résidait certainement dans le désespoir.
Mais ce qu'il vit lui glaça l'âme et brisa les derniers vestiges de sa raison. Elonie l'avait déjà oublié : elle était là, dans leur chambre, avec un autre...Elle prenait du plaisir et en donnait...Elle gémissait des mots tendres à l'oreille du fils du voisin et livrait son corps à ses caresses...
La rage submergea le Vampire qui se sentit trahi et humilié. Son sabre une fois retrouvé, il plongea le village dans la mort et les flammes. Ce fut un carnage. Elonie, femme aimée, femme à qui il aurait voulu dévouer son immortalité, fut laissée agonisante sur le parvis de l'église, une lacération en forme de croix sur la poitrine.

Pour Jirômaru, cet épisode marqua sa chute dans la violence. Le sang ne lui était plus une substance interdite mais une bénédiction. C'était pour lui le symbole de sa vengeance. Ainsi se mit-il à haïr sa race d'origine dont il quitta les rangs désormais insignifiants. Il entra ainsi dans une phase sanguinaire.

Carnage en Transylvanie
1289-1300

C’est en cette année de changement que réapparut Matosaï. Étrange hasard...Jirômaru ne se rendit pas compte, sur le moment, que la coïncidence était trop grande pour ne pas avoir été calculée par le vieil immortel. Il l'accompagna donc sans discuter dans la suite de son périple. Revenu pour apprendre à son élève tout ce qu'il devait savoir au sujet de sa race maudite, Matosaï aida ainsi son infant à développer ses pouvoirs et à s'en servir. Il lui apprit à boire le sang d'autrui sans se mettre en danger, et à s'en délecter. La torture, la fureur, la jouissance de posséder la toute puissance lui furent inculquées à cette époque. Jirômaru changea ainsi radicalement de comportement : il semblait désormais accepter sa nature diabolique et même s'en réjouir. Le sang d'innocents souilla ses mains et emplit sa gorge. L'Homme avait enfin disparu, le Vampire était né.

Depuis cette époque, des rumeurs horribles circulent sur ces régions de montagnes et de forêts profondes. Dracula n'a pas été la seule légende de ces lieux étrangement affectionnés par les Créatures de la Nuit.

Jirômaru demanda alors à Matosaï de l'attendre en Allemagne, après ces vingt ans passés à répandre la terreur en Transylvanie en sa compagnie. Il avait longuement étudié les sciences obscures et cela faisait un moment qu'il avait compris comment utiliser une partie de ses pouvoirs surnaturels. Maintenant, il avait besoin de reprendre son voyage en solitaire. Matosaï accepta sa demande à la condition que ce dernier viendrait le retrouver en Allemagne avant dix ans.



Le rayon de lune
1305-1312

Pendant cinq ans, Jirômaru se retrouva ainsi à nouveau seul. Ses pas le reconduisirent naturellement dans les pays de l'Est : quelque chose l'y appelait. Son brûlant passé le poussait à revenir sur ses traces.
De retour en Mongolie dans sa tribu de coeur, en 1305, le Vampire retrouva ses amis et surtout la petite Sarantuyaa. Cela faisait dix-huit ans qu'il n'était pas revenu et cependant il fut accueilli par la tribu avec tous les honneurs. Malheureusement, il apprit que la mère de Sarantuyaa était morte, tuée par des loups. Le drame avait remué tout le monde et une chasse à la bête avait été lancée. Cela s'était déroulé quelques mois avant son arrivée. Jirômaru décida de prendre part à ces chasses et il rencontra ainsi ses premiers Loups-Garous. Sa haine, déjà inscrite dans son sang obscur, mais aussi attisée par les enseignements de son maître, fut multipliée par cet événement. Depuis cette période, il ne songe qu'à anéantir ces bêtes enragées. Pour elles, il n'a aucune pitié.
Par la suite, il resta dans la tribu pendant trois ans, s'occupant de Sarantuyaa. Son amour paternel pour elle se confirma et la jeune femme le lui rendit sans limite. Tel un père et une fille, ils s'aimèrent, et Jirômaru apaisa sa colère grâce à elle.

En 1312, Jirômaru se sentit obligé de transformer Sarantuyaa pour la sauver d'une forme rare d'hémopathie. Chose étrange : les cheveux de la petite devinrent d'un blanc soutenu, comme si elle avait intégré visuellement ceux de son père adoptif. La tribu expliqua aussitôt ce phénomène par le fait que Jirômaru était béni et qu'il avait transmis à Sarantuyaa la force de son âme. Le Vampire, lui, comprit immédiatement que son Don Obscur avait conservé ses souffrances passées et qu'il était complètement soumis à la dégénérescence. A partir de ce jour, il refusa de le transmettre à qui que ce soit.
L'ex-samourai s'occupa de l'éducation vampirique de la petite avant de la laisser dans sa tribu à un précepteur de confiance et un maître d'arme. Elle apprit de nombreuses choses en un an et continua sa formation par échanges épistolaires avec son père adoptif tandis qu'elle s’entraînait à défaire les Loups-Garous dans les contrées mongoles éloignées. Sa tribu la voyait comme l'incarnation d'un dieu sur terre.
Puis le temps de quitter la tribu arriva pour Jirômaru : il devait retrouver Matosaï en Allemagne et mettre en place le plan machiavélique qu'il avait érigé contre ce dernier. Il quitta donc la Mongolie le coeur gros mais plein d'espoir pour son avenir avec Sarantuyaa.



De retour en Allemagne, après une absence prolongée, l'ex-samouraï retrouva Matosaï. Ce dernier passa l'éponge sur son attente et lui confia qu'il devait se rendre en Angleterre pour régler quelques affaires d'importance. C'était personnel et cela ni pouvait attendre, ni se faire avec son disciple. Laissant donc Jirômaru seul, le Vampire disparut à nouveau.

Italie
1313-1389

Jirômaru hésita à retourner en Mongolie mais il préféra profiter de ce qu'il était en Europe pour voyager en Italie. Il y étudia les antiques civilisations avec passion et il y resta durant plus de cinquante ans. Tandis que son maître voyageait de son côté plus au Nord, l'ex-samouraï se délecta de la culture romaine sans omettre d'écrire à sa fille adoptive. Jirômaru changea de nom. Il se fit appeler Kozo Kuro (trois bonheurs noirs) et se teignit les cheveux en noirs. Jirômaru fut rapidement fasciné par l'Italie : les vestiges de ses anciennes civilisations, son art, sa politique, ses codes, son théâtre...tout l'intéressait ! Si on le questionnait, sans nul doute répondrait-il encore aujourd'hui que cette période fut une des plus heureuses de sa vie. Il évoluait sans maître, au milieu des plus grands idéaux et des vestiges, perdu dans les livres et les parchemins poussiéreux. Le climat lui était propice, même si la chaleur lui déplaisait souvent, et la nature y était si belle qu'il passa un temps considérable dans les branches d'un pin près de la villa dont il s'était emparé impunément.
C'est là qu'il étudia profondément l’art oratoire et qu'il entreprit de parfaire ses connaissances, mais c'est également en ces lieux qu'il vécut ses plus grandes années de débauche. En effet, entouré d'une petite bande de Vampires qu'il avait rencontrés presque par hasard au cours d'une soirée, il se laissa aller aux plus grands excès. Lui qui avait toujours été dans la retenue, éduqué pour l'art de la guerre et non pas celui du sexe, décida d'expérimenter sa virilité et de laisser libre court à ses pulsions les plus inavouées jusqu'alors. Sa villa fut ainsi le lieu d'orgies nocturnes dignes des empereurs romains d'autrefois. Le sang y coula à flot et la volupté s'y débrida dans de véritables bacchanales.

Cependant, même si Jirômaru vivait pleinement son immortalité, Sarantuyaa lui manquait profondément. Après quelques lettres échangées avec elle, cette dernière le rejoignit et l'ex-samouraï se concentra sur son éducation, abandonnant quelque peu ses moeurs débridées. Ce fut une bouffée d'air, un véritable bonheur, que de retrouver son infante.
Malheureusement, en 1380, la jeune femme préféra retourner en Mongolie : les steppes glacées lui manquaient cruellement et le climat Italien n'était pas fait pour elle. Jirômaru la laissa donc retrouver les siens. Ils se donnèrent rendez-vous en Angleterre.

France
1389-1391

Sans prévenir Matosaï, Jirômaru remonta alors jusqu’en France. Il n'y demeura qu’un bref moment ne supportant pas le système politique et le désordre du pays. Il n'y apprit même pas la langue alors qu'il avait appris l'italien à la perfection. Tout ce qu'il retira de ce passage en France, ce fut le faste et le luxe qu'il pourrait se payer grâce à son immortalité et dans lesquels il se fit prince. Quelques uns de ses "amis" d'Italie l'avaient suivi et c'est en France qu'il recommença à se forger une réputation de séducteur et de violent débauché. Sans son maître, sans sa fille, sans personne à manipuler expressément ou à choyer, il se permit de nouveaux excès. Aujourd'hui, le Comte conserve encore des traces de ces années, notamment en terme de sadisme.

Allemagne
1391-1398

En 1391, Jirômaru fit un séjour de sept ans en Allemagne où il développa son don pour le théâtre et la représentation, et particulièrement la tragédie dans laquelle il excellait. Aujourd'hui, il ne se souvient pas réellement de ces sept années.


C’est en l’an 1398 qu’il atteignit l’Angleterre. Bien vite, il se rapprocha de l'aristocratie et obtint des titres de noblesse.

La guerre des deux roses
1398-1462

Jirômaru suivit de très près la guerre civile qui opposa la maison royale de Lancastre et celle de York. Cette guerre fut appelée "la guerre des deux roses" en raison des symboles des deux dynasties : une rose rouge pour la maison des Lancastre et une rose blanche pour celle des York. Jirômaru entra dans le conflit et se rangea aux côtés des York. Il assista au couronnement d’Édouard IV en 1461 et continua de sillonner la noblesse anglaise. A sa grande joie, ce fut la maison des York qui finit par emporter la guerre en 1485 (le Comte l'apprit par courrier tandis qu'il était en voyage en Afrique)
Depuis cette époque, le Comte signe ses crimes d'une tête de rose blanche, en souvenir de son combat politique.


Matosaï retrouva Jirômaru en 1462 et, durant près d’un siècle, il continua d’être son instructeur. Un redoutable Vampire aux pouvoirs phénoménaux et aux desseins obscurs ne pouvait être qu'un bon maître. Cependant, bientôt l’élève dépassa le maître. Sa situation agréable dans la noblesse anglaise et son ambition profonde rendirent Jirômaru sournois en plus d’être cruel.
Ensemble, Matosaï et lui firent un long voyage en Afrique pour y rencontrer les Vampires robustes de ce pays. Leur expédition fut difficile mais Jirômaru y apprit de nombreuses choses et en revint avec un camarade: Manouk, Vampire empoisonneur.


Sur le voyage de retour, Jirômaru tua Matosaï, son créateur et maître. C'était en 1572 et ce fut son premier crime impardonnable chez les Vampires. Sa fille devait bientôt le rejoindre et il ne pouvait pas prendre de risques inutiles. Et puis, sa vengeance longtemps ourdie pouvait enfin se réaliser...
Maître des ténèbres et fin manipulateur, Jirômaru avait suffisamment développé ses pouvoir pour piéger Matosaï. Il réussit à le coincer dans ce qu'il appelait déjà à l'époque sa "Pièce Noire", une forme de dimension parallèle, close et pourtant infinie, matérialisée par son esprit. Le vieux Vampire n'eut pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait : Jirômaru lui planta son poignard d'argent dans le cœur avec un sourire vainqueur. Matosaï n'était évidemment pas sans ressource, mais la Pièce Noire avait la terrible particularité d'empêcher quiconque d'utiliser ses pouvoirs et Jirômaru était non seulement plus jeune, à la fois de corps et d'esprit, mais aussi préparé de longue date à cet événement. Ses capacités martiales et sa poigne eurent raison de cet être qu'il n'avait jamais appelé "maître" que pour mieux le tromper.
Les derniers mots de Matosaï furent : "Je le savais...Je l'ai toujours su...Cela devait arriver."
Son corps, exsangue, fut abandonné dans la Pièce Noire. Sans être vivant à portée de crocs, sans cercueil pour se régénérer et sous la pression constante de l'esprit de son infant, il finit par être délaissé par le Don Obscur et par finalement réellement mourir. Son cadavre décharné est toujours présent dans cette pièce mystérieuse et matérialise la clé pour en sortir.

De retour en Angleterre, Jirômaru asservit ses autres élèves anglais et devint ainsi le chef d’une grande troupe de Vampires meurtriers. Il gagna en puissance et en renom, tant chez les Humains que chez les Vampires. Il aimait le théâtre et commença à mettre en scène des pièces blasphématoires et horribles, fortement critiquées par la communauté vampirique, et dont l'inspiration lui venait de Paris.

Sarantuyaa le rejoignit alors. Malade malgré sa vampirisation, elle décida avec son père d'être plongée dans le "grand sommeil" afin de laisser mûrir ses pouvoirs. Ce fut une nouvelle séparation, douloureuse et cruelle, mais leurs plans nécessitaient cette mise en stase. Sarantuyaa dort ainsi dans un cercueil sous l'Opéra depuis des siècles.
Il faut cependant noter que cette jeune femme n'est pas la seule créature qui attend l'appel du Comte car le maître d'arme de la jeune femme fut également transformé en Mongolie et l'accompagne dans son sommeil.



Pendant deux siècles, Jirômaru tua à l’aveuglette dans la noblesse anglaise et monta par assassinats près du trône royal.
Condamné par la communauté des Vampires pour avoir torturé quatre de ses disciples sans raison apparente, Jirômaru réussit à faire porter le chapeau au plus vieux d’entre-deux et s’en tira sans dommage. Laissant ainsi tomber d’un coup ses élèves, Jirômaru aspira à la paix pendant un moment et resta en compagnie de peu de Vampires de sa lignée. C'est là qu'il se perfectionna dans ses pouvoirs d'ombre.

En 1606, le Comte fit un voyage d'agrément en Italie lors duquel il rencontra Maria qui devint son amante pendant presque 10ans.

Il devint lord, par tours et détours, et sut se faire accepter comme favori par la reine Victoria. Nul ne connait exactement ses relations avec la reine : est-il son conseiller ? son précepteur ? L'hypnotise-t-il ? En tout cas une chose est certaine : il la protège.



Aujourd’hui, sous le règne de Victoria, le Conte Keï a de nouveau des projets en tête. Lui qui s'était pourtant fait la réputation de sortir peu souvent depuis une vingtaine d'années, rôde à présent dans les rues à la recherche de quelque chose ou quelqu’un…et fréquente de nouveau l'Opéra et le Théâtre.
Nul ne sait ce qu’il a derrière la tête mais ses meurtres, signés d’une rose blanche, ne présagent rien de bon…
Récemment, il a été pris dans la tourmente qui rôde autour de l'héritière des Spencer : la jeune Sarah et lui semblent avoir un lien particulier. D'ailleurs, il l'a demandée en mariage en pleine représentation théâtrale et l'a sauvée d'un enlèvement perpétré par le Sabbat. Cependant, la mort de Dorian Spencer, le père de Sarah, est venue compliquer les choses...